Paul HINDEMITH, Concerto pour clarinette, Robert KEMBLINSKY, clarinette, Orchestre de Chambre de Lausanne, Paul HINDEMITH, 27 octobre 1958, Théâtre Municipal, Lausanne

27 octobre 1958
Radio Télévision Suisse
René Gagnaux

L' enregistrement qui vous est ici proposé en écoute est vraiment historique! Heureusement que grâce aux archives de la Radio Télévision Suisse cet enregistrement a été conservé!

D' une part, les enregistrements avec Robert KEMBLINSKY en soliste ne sont pas nombreux, d'autre part, il est sous la direction du compositeur, Paul HINDEMITH, seulement quelques années après la première audition de l'oeuvre aux USA!

Et en plus, les enregistrements du Concerto pour clarinette sont extrêmement rares, je n'en connais même pas une petite demi-douzaine, dont celui réalisé à Londres pour le disque le 22 novembre 1956, London, Kingsway Hall, avec le clarinettiste français Louis Cahuzac et le compositeur, à la tête de l'Orchestre Philharmonia, ainsi qu'un autre fait en DDR: Hans-Detlef Löchner, Dresdner Philharmonie, Herbert Kegel, Lukaskirche, Dresden, 8-11 mars 1982, Eterna 827797.

Paul Hindemith a été un pionnier dans l'écriture de la «Gebrauchsmusik», la musique destinée à une utilisation précise: parmi ces oeuvres souvent assez particulières est un concerto pour clarinette et orchestre - son premier d'une série de concertos pour instruments à vents, composés de 1947 et 1949. Le concerto pour clarinette fut écrit en 1947 pour Benny Goodman, qui en donna la première audition en 1950 avec l'Orchestre de Philadelphie sous la direction d'Eugene Ormandy.

De style néo-classique, ce concerto est en quatres mouvements - sonata-allegro, scherzo, variation, rondo:

"[...] le premier est un allegro symphonique, très lyrique et plein d'énergie; le second est un scherzo complexe et plein d'esprit; le troisième est une pastorale très gracieuse et le dernier mouvement est un rondo très vif, qui souligne l'intérêt que Hindemith portait à la clarinette comme instrument lyrique. [...]" cité de cette page de Wikipedia

Paul HINDEMITH lors d'une séance d'enregistrement pour le disque photo de presse de la Deutsche Gramophon

Le 27 octobre 1958, Paul HINDEMITH dirigeait le 3e concert d'abonnement de l'Orchestre de Chambre de Lausanne:

Extrait de la Gazette de Lausanne du 27 octobre 1958

Le concert fut diffusé sur l'émetteur de Sottens le jeudi 30 septembre 1958 - la symphonie de Schubert et le concerto d'Hindemith - et le jeudi 18 décembre 1958 - l'Octuor d'Hindemith.

Il fut commenté dans la Gazette de Lausanne du 13 décembre 1958, avec les comptes-rendus des 4e et 5e concerts d'abonnement de l'OCL:

"[...] Paul Hindemith a été l'hôte de l'Orchestre de chambre de Lausanne, lors du troisième concert de l'abonnement au Théâtre municipal. L'auteur de Mathias der Mahler présentait au public deux de ses oeuvres : l'Oktett pour clarinette, basson, cor, violon, deux alti, violoncelle et contrebasse et le Concerto pour clarinette et orchestre. Il conduisait enfin la troisième symphonie de Schubert.

On s'est plus a considérer Hindemith, dans certains milieux, comme un intellectuel de la musique, créateur de formes puissantes et bien définies, mais abstraites, capables de frapper, mais non d'émouvoir. Ce jugement sommaire, ne résiste pas à un examen attentif et désintéressé. Certes Hindemith est un admirable théoricien qui a su préciser son art avec une lucide intelligence. Il a écrit des traités d'harmonie et de contrepoint et enseigné son art dans des universités d'Amérique et d'Europe (notamment à Zurich). L'illustre compositeur est fermement attaché à notre époque par un besoin presque instinctif de définir une direction, d'imposer un ordre logique dans le mouvement multiple et souvent contradictoire des formes de pensée et d'expression.

Mais Hindemith est avant tout le créateur sensible et inspiré de quelques-unes des plus belles partitions de la musique contemporaine. Ses premières oeuvres témoignent déjà d'une vigueur et d'une hardiesse qui proclament la force étrange et bouillonnante du génie. Le style peu à peu s'épure: l'harmonie acquiert cette couleur originale et inimitable qui fait le prix de Mathias, de Nobilissima Visione, des sonates pour divers instruments, des quatre tempéraments. La complexité à la fois sereine et mystérieuse du contrepoint relie Hindemith aux plus grands maîtres du passé, notamment à J.-S. Bach. La beauté massive (mais aussi parfois délicate et transparente des thèmes) s'allie chez lui à l'équilibre de l'architecture. Musique de granit par sa structure inébranlable, mais d'un granit vivant, modelé, traversé soudain par d'étranges lueurs qui, l'éclairant de l'intérieur, confèrent à la perspective sa véritable profondeur.

Le Concerto pour clarinette met en valeur l'instrument par l'éclat de ses traits et la clarté nerveuse de l'orchestration qui fait rebondir le soliste sans jamais l'étouffer. Mais l'essentiel est ici la qualité des idées et de leurs développements, la démarche si particulière des thèmes, la pureté du style. Robert Kemblinsky interpréta ces pages avec un art admirable.

L' Octuor, composé en 1957-1957, était donné à Lausanne en première audition suisse. Ce chef-d'oeuvre est un bel exemple de ce contrepoint linéaire qui développe et superpose les structures mélodiques avec une liberté apparente et cependant avec la logique la plus rigoureuse. Cette oeuvre austère, mais combien expressive, est animée par un constant rebondissement rythmique. Mais le rythme est ici inséparable des réalités harmoniques et contrapuntiques. En effet les rouages complexes qui assurent au mécanisme de la pensée sa vie diverse et profonde sont si étroitement liés que cet Octuor est en quelque sorte indécomposable: en cela Hindemith dépasse son époque tout en la réalisant. Il est déjà un classique.

Il convient de féliciter les instrumentistes de l'O.C.L. qui ont donné, sous la conduite du maître une traduction fidèle et intelligente de ces pages. Hindemith dirige ses oeuvres avec une calme autorité. Il donna en début de concert une interprétation sensible et personnelle de la troisième symphonie de Schubert, malgré un Finale trop lent. L'O.C.L. obéit aux intentions du maître avec une souplesse et une vivacité remarquables. [...]" cité d'une chronique parue dans dans la Gazette de Lausanne du 13 décembre 1958, signée seulement "L."

À ne pas oublier: cet extrait est rendu disponibles grâce aux splendides archives Le Temps, consultables LIBREMENT sur la toile, une générosité à souligner - et un point commun avec les archives de la RTS!

Le soliste du concerto pour clarinette était Robert KEMBLINSKY, qui fut clarinette-solo de l'Orchestre de chambre de Lausanne pendant une quarantaine d'années, depuis 1949 jusqu'à sa retraite!

Quelques photos avec lui dans les pages de Notre Histoire, grâce aux splendides pages de Martine DESARZENS:

- parmi les premiers musiciens de l' OCL à Radio-Lausanne, dans la 2e rangée, 2e depuis la gauche

- dans une photo d'ensemble de l'OCL, en haut à gauche

- dans l'article Jean-Marie Auberson, enfant génie du violon, chef d'orchestre, 2e photo, course de scooter... 2e depuis la gauche, à côté de Victor DESARZENS

Pour écouter cette interprétation CLIQUER sur les minutages ci-dessous - en début de ligne (ouvre une fenêtre sur l'archive de la Radio Télévision Suisse, au début du passage concerné): il s'agit d'une rediffusion récente, dans le 3e volet de la série de 10 émissions que François Hudry a réalisé pour les 75 ans de l'OCL

39:53 (2393) Paul HINDEMITH, courte présentation par François Hudry

40:41 (2441) Robert KEMBLINSKY, courte présentation par François Hudry

41:24 (2484) Paul HINDEMITH, Concerto pour clarinette et orchestre, Robert KEMBLINSKY, Orchestre de Chambre de Lausanne, Paul HINDEMITH, 27 octobre 1958, Théâtre Municipal, Lausanne

Ses différentes parties:

41:24 (2484) 1. Ziemlich schnell 08:03 (-> 08:03)

49:27 (2967) 2. Schnell 02:05 (-> 10:08)

51:32 (3092) 3. Ruhig 07:21 (-> 17:29)

58:53 (3533) 4. Heiter 06:29 (-> 23:58)

65:22 suite de l'émission

En cliquant sur les minutages, donnés ci-dessus en début de ligne, vous pouvez (ré)écouter directement la partie concernée (ouvre une fenêtre sur l'archive de la Radio Télévision Suisse, au début de cette partie).

CLIQUER ICI pour écouter le troisième épisode des «75 ans de l'OCL» depuis son début: ce volet était consacré à des oeuvres de Mozart - Serenade No. 9 en ré majeur, «Posthorn» (Cor de postillon), KV 320, Orchestre de chambre de Lausanne, Günter WAND -, Hindemith et Wagner interprétées par des solistes et chefs invités.

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René Gagnaux
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22 février 2018
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