Dostoïevski et le Valais Repérage

Charly Arbellay
Charly Arbellay

1821-2021

Bicentenaire de la naissance de Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski.

Sa passion dévorante du jeu transitait par le Valais

L’édition du Petit Larousse illustrée de 1924, imprimé 43 ans après la mort de Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski (1821-1881), présente l’écrivain russe comme suit :

Romancier russe, né à Moscou, auteur de romans d’une grande profondeur psychologique et d’un pathétique saisissant : Crime et châtiment, la Maison des morts.

L’Idiot, Le joueur, les Frère Karamazov, Les démons, Les carnets du sous-sol, etc., n’y figurent pas.

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  • Fiodor Dostoïevski, peint par Vassili Perov en 1972. Photo Arbellay août 2021.

Dostoïevski s’est rendu à plusieurs reprises en Suisse, notamment en 1862, 1863, puis 1867, 1874. Son plus long séjour eut lieu de 1867 à 1868 ou il vécut avec son épouse Anna Grigorievna Snitkina, à Genève, puis à Vevey. Au bout du lac, le couple a perdu sa fille Sofia trois mois après sa naissance. Une plaque commémorative, dans l’ancien cimetière de Plainpalais, rappelle sa mémoire.

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  • Son épouse Anna Grigorievna en 1870. dr

Pour Genève l’écrivain n’a pas toujours eu des propos très amènes, parfois même odieux sur sa ville d’accueil et sur la Suisse en général qu’il a haï, contrairement à son épouse Anna, jeune talentueuse écrivaine et collaboratrice.

En Valais

Atteint d’une passion dévorante pour le jeu, Fiodor Dostoïevski a fréquenté le casino de Saxon-les-Bains à maintes reprises entre 1867 et 1868. Il faut préciser que la ligne du Simplon venait d’être ouverte facilitant les déplacements.

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  • Vue générale de Saxon-les-Bains. Gravure de l’époque. Dr.

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  • Le casino de Saxon-les-Bains vers 1870. Dr.

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  • La salle de jeu où Dostoïevski perdit tant d’argent. Collection Montangero.

Selon Mikhaïl Chichkine, auteur de La Suisse russe, l’écrivain aurait subi à Saxon « de monstrueuses pertes ». Il était incapable de se maîtriser ! Anna, son épouse relève dans l’une de ses correspondances que Fiodor a dû « mettre au clou son manteau et son alliance ». Il réclamait sans cesse à son éditeur des avances sur ses romans qu’il dépensait aussitôt et dont il n’arrivait plus à rattraper le retard de ses livraisons.

Même si un soir il gagnait 1300 francs (une somme énorme pour l’époque alors que la demi-livre de pain coûtait 18 centimes), le lendemain, il perdait tout. Fiodor justifiant sa déconvenue, écrira à Anna qu’il est resté un jour de plus à Saxon parce que « cette canaille de valet de chambre a oublié de me réveiller comme j’en avais donné l’ordre et j’ai raté l’unique train pour Genève… ».

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  • La gare de Saxon qui n’a que très peu changé depuis l’arrivée du train. Photo Arbellay août 2021.

Cependant, le démon du jeu produisait en lui une curieuse réaction : il rentrait à Genève et écrivait alors 160 pages de son romand l’Idiot. Le jeu était sa drogue !

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  • La principauté de Monaco a émis un timbre à l’occasion du bicentenaire de la naissance du plus célèbre joueur de la roulette. Photo Arbellay août 2021.

Bibliographie

  • Saxon-les-Bains, Jacques Montangero. – Monographic 1992
  • Mikhaël Chichkine – La Suisse russe – Fayard 2007.
  • Nash Gazeta – no 17 - Edition russe-français – Eté 2021.
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  • Roger Bornand

    Dostoïevski écrit à un ami «Je tâcherai de vous écrire de notre nouveau domicile. Montreux, dont vous parlez, est un des endroits les plus chers et les plus à la mode en Europe. Je vais chercher un village quelconque près de Vevey (…)». «Je connais Montreux, Chillon, etc. J'y suis allé plusieurs fois. C'est beau et sain, il n'y a ni ouragan ni changements fréquents. C'est là qu'il nous faudrait nous installer, moi pour écrire et Anna Grigorievna (son épouse, ndlr) pour sa santé. Mais voilà: Montreux, c'est cher et il n'y a que des pensions»… «D'après le Journal des Étrangers, il y a à Genève un nombre énorme d'aristocrates russes; c'est étrange, pourquoi passent-ils l'hiver ici, dans ce mauvais climat, plutôt qu'à Montreux?»

    Sa fille et biographe, Aimée Dostoïevski, suivit les traces de son père en Suisse et séjourna à Montreux, à l'Hôtel Les Narcisses, à Chamby, pour se soigner.

    • Charly-G. Arbellay

      M. Bornand, je vois que vous êtes un fin connaisseur de Dostoïevski. Cet écrivain était tantôt critique, tantôt admiratif. Mais jamais indifférent! Merci pour votre contribution.

  • Philippe Chappuis

    Bonsoir, je ne suis pas un connaisseur de l'écrivain russe, et j'ai apprécié votre document, excellent et complet, cependant ma réaction est un peu "à côté du sujet" mais je ne résiste pas à l'envie de partager ce qui suit. De l'oeuvre magistrale de Dostoïevski, je garde, dans ma mémoire, le témoignage très sensible et pertinent de l'une de ses traductrices en langue allemande, Swetlana Geier, dans ce magnifique récit filmé * Die Frau mit fünf Elephanten* du réalisateur Vadim Jendreyko . Dans ce récit captivant, mêlant autobiographie et travail de traductrice, elle transmet avec beaucoup de justesse de ton ce que la traduction des textes de Dostoïevski lui a apporté comme une source inépuisable d'humanité (5elefanten.ch/fr/biography-gei...) upload.wikimedia.org/wikipedia...

    • Renata Roveretto

      Cher monsieur Philippe Chappuis, touché.... vous nous compléter et vous nous faites découvrir à merveille le fond du trésor, comme prenant par décroissance toute la série des poupées russes... J'aime !

  • Roger Bornand

    Merci, passionnant.

Pierre-Marie Epiney
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26 septembre 2021
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