Vies de gosses

Vies de gosses

26 juillet 2022
Serge Goy

La joyeuse bande des anciens raconte quelques souvenirs de jeunesse. De gauche à droite : Georges Golaz, Bernard Candaux, Onorio Franchitti, Pierrot Chevalier, Michel Paltani, André Michot, Marcel Magnenat, Maurice Jaques et Jacques Benoit. Ils se rencontrent chaque mardi matin à 9h30.

Au passage, un petit mot de Marcel Magnenat.

1947, première date pour se situer ; ils étaient alors adolescents lorsqu’ils ont vu les rues du village se goudronner. C’est donc sur terre battue qu’ils ont auparavant mené les vaches, joué aux gnus, porté du bois, fait les commissions aux trois épiceries du village. C’est dans les bois environnants qu’ils ont fait des cabanes, joué aux indiens et notamment fait la guerre à ceux de Bofflens. Etonnamment, pas de ballons, donc pas de foot. C’est en longeant les rues du village qu’ils ont entendu les chars à cercle écrasant les cailloux, le charron travaillant le bois de ses roues, le maréchal-ferrant tapant sur son enclume, le beuglement des vaches dans les étables, les discussions des femmes emmenant leur linge au lavoir ou encore celui de deux hommes quittant bruyamment l’un des trois bistrots. Ils ont vu le battoir, le pressoir, la scierie ou encore la forge mus par la force de l’eau du Nozon.

Ils avaient, en-dehors de tout ça, d’autres occasions de passer leur temps. Ils étaient notamment appelés à chasser les « carcailles » ou hannetons. On tendait un fleurier sous l’arbre et on gaulait les branches pour les y faire tomber. On les vendait comme les escargots qu’on apportait au père de Georges Golaz. Jacques Benoit les amenait pour les vendre à 20 centimes le kilo. Georges se rappelle avoir vu sa cave envahie de gastéropodes en attente de livraison à Vallorbe. Au passage, le père faisait partie des dix-huit : il avait en effet dix-sept frères et soeurs !

Réalités de la vie

Mais ils n’avaient pas que ça à faire, car la vie de gosse était dure. Beaucoup étaient garçons de ferme, ce qui voulait dire ouvriers à très bon compte et sans reconnaissance souvent pour le travail accompli. Certains ont d’ailleurs passé une jeunesse bien terne suite à l’exploitation dont ils ont été les victimes. Les travaux de la ferme les attendaient et l’école était organisée autour de l’activité paysanne : les vacances notamment pour les moissons, les foins ou la garde les vaches. Depuis un certain âge, les garçons avaient congé l’après-midi pour s’acquitter de leurs tâches.

Il y avait trente élèves par classe, les grands aidant les petits. Le maître enseignant n’était alors pas un tendre ; il menait les choses à la baguette et dans le sens premier des choses. C’est les élèves eux-mêmes qui devaient les lui couper dans les noisetiers environnants. Il en avait une réserve au galetas du collège, réserve qui disparaissait régulièrement par le concours des élèves les plus entreprenants. Deux d’entre eux ont d’ailleurs pris la porte sur ordre du maître et non pas de la manière imagée comme il le pensait. Il a connu aussi la caisse à bois comme d’autres maîtres de cette époque. Ces enfants ont été de ceux qui sont allés chercher des cigarettes, chewing-gums et barres de chocolat quand les trains amenaient des soldats américains à la gare pendant la guerre. Ils ont aussi vu un avion militaire suisse atterrir dans un champ près du village.

Autres réminiscences.

Les quatre du jour ont vécu l’apparition du premier téléphone qui était à la poste, de la première télé et de la première voiture qui furent achetées notamment par Michel Paltani. Il faut dire aussi que Croy était un centre s’activités régional grâce à la gare vers laquelle convergeaient moultes marchandises comme d’énormes cubes de glace qui arrivaient dégoulinant sur la route depuis le lac de Joux, la liaison CFF par le Day n’étant pas encore faite. Une liaison par le rail entre le Pont et Croy passant par Vaulion avait même été projetée puis abandonnée.

Un tout dernier exemple qui en dit long sur les priorités d’alors : on misait le lavage des fontaines. Celui qui l’emportait devait s’acquitter de cette tâche et en payer le droit. Comme récompense, il pouvait ramasser les bouses des vaches autour des bassins.

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