Sa passion : chasseur de sons

décembre, 2020
Vissoie, Dübendorf
Pierre-Marie Epiney

Natif de Vissoie, Paul-André Florey (*1936) a vécu une grande partie de sa vie à Dübendorf où il a travaillé en qualité d’instructeur technique en uniforme avec le grade d’adjudant sous-officier, fonction qu'il occupa durant 34 ans.

Une passion l’a accompagné sa vie durant : la capture de sons, l’enregistrement de la mémoire d’Anniviers. Sa collection de témoignages, il l’a généreusement mise à disposition de chacun en déposant son fonds à la médiathèque du Valais. Le catalogue compte plus de 220 heures d’enregistrements qui sont intégralement disponibles en ligne. Rendez-vous ici puis écrivez "Paul-André Florey".

A l’image de Belà Bartok (1881-1945) qui parcourait les campagnes hongroises en quête de musique populaire, Paul-André a mis sur bande magnétique le témoignage de nombreuses personnalités connues ou non qui s’exprimaient en français ou en patois. Citons Norbert Roten [ici], René-Pierre Bille [ici], le curé Joseph Francey [ici], Rose de Pinsec [ici], Catherine Amoos [ici]… son père Edouard Florey [ici] dont il possède 20 heures d’enregistrement.

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L’origine de sa passion ?

Ecoutons-le :

« Et moi, curieux de nature, tout petit encore, j’aimais prendre place dans un coin du local et écouter les conversations des « grands ». Quand ceux-ci disaient quelque chose qui ne devait pas être entendu des enfants, ils le disaient en patois. C’est ainsi que j’ai un peu appris le patois.

Dans ces rencontres on ne parlait pas seulement affaires. Mais de tout et de rien et cela m’a donné l’occasion d’entendre une quantité de récits du temps passé.

Je m’intéressais beaucoup aux histoires d’autrefois : la manière de vivre des gens, leurs soucis, leurs peines, leurs joies ... L’histoire, d’une manière générale, depuis mon jeune âge, m’a toujours captivé et en particulier l’histoire du val d’Anniviers. »

En 1956, apprenti radioélectronicien il put s’offrir un magnétophone qui lui permit de réaliser enfin son rêve d’enfant. Seule entrave : le prix des bandes magnétiques. Une heure d’enregistrement coûtait la moitié d’un mois de salaire.

Fête-Dieu à Vissoie en 1958

En 1958, il réalisa ainsi son premier grand projet : un reportage complet de la Fête-Dieu à Vissoie que l’on peut entendre ici.

Voici son souvenir de cette prise de son mémorable :

« Durant mes instants de loisir j’ai mis au point une espèce de scénario. Je voulais que tout le déroulement de cette journée religieuse y figure. La diane le matin, les mortiers, la grand-cloche, le carillon, les fifres et tambours, la fanfare, la messe, la procession, l’après-midi convivial sur la place de Fêtes, les discours… Il fallait aussi organiser la logistique, car le magnétophone de grande dimension pesait une vingtaine de kilos et il fallait le déplacer au fur et à mesure du déroulement de la journée… Depuis la maison où nous habitions en ce temps-là…, je pouvais bien enregistrer la diane.

L’arrivée des détachements des différents villages de la paroisse, pouvait être enregistrée depuis le balcon du Café des Alpes… Pour la messe, la fenêtre du clocher qui donne sur le chœur de l’église était un endroit idéal. Pour la procession de nouveau, je déménageais le magnétophone sur le balcon du Café des Alpes. L’après-midi, sur la place de Fêtes, j’avais installé mon microphone sur le balcon du chalet de la musique. Et pour les vêpres je me rendais à nouveau à la fenêtre du clocher.

La matière première étant récoltée, il fallait maintenant écrire le texte et faire le montage. Un ami, Bob Chappelet, a écrit le texte que je confiais à …Bernard Crettaz [lien] , un étudiant, pour le mettre en valeur… »

Une rêverie radiophonique qui lui vaudra un 1er prix

En 1963, travaillé par le Heimweh (mal du pays) – il était exilé à Dübendorf – il réalise une rêverie radiophonique que vous pouvez apprécier à cette page.

Sa douce mélancolie le poussèrent à retrouver les bruits qui bercèrent son enfance : les conversations en patois, les cloches de Ste-Euphémie (l’église de Vissoie), la fanfare « l’Echo des Alpes », la voix forte du huissier qui fait les publications, le chœur mixte de la paroisse, le curé Francey… les sons de la campagne : le battage du blé avec le fléau, la flûte du berger, les sonnailles des troupeaux, le cor des Alpes… Cette collection d’images sonores a touché le jury puisque ce document lui vaudra le premier prix à l’échelon national dans la catégorie « reportage » du concours international des « Chasseurs de son ».

Collaboration avec la radio

Sa collection d’enregistrements de textes en patois lui vaudra d’offrir sa collaboration à la radio romande dans le cadre de l’émission «Province». Il offrit aussi ses archives sonores à Radio Rhône dans « Le moment patoisant ».

Sur les traces de son père

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A l'image de son père Edouard Florey (1901-1985), dont on peut lire une autobiographie à cette page, Paul-André a fait œuvre utile puisque sa passion témoigne de ces temps pas si lointains où la vie rude a nourri une mémoire qu'il aurait été dommage d'oublier.

Merci donc Paul-André de ta patiente quête d'archives sonores qui constitue une riche bibliothèque offerte à tous !

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