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Funiculaire du Righi

Funiculaire du Righi

août, 1895
Edition F. Cali, Genova 1895
Yannik Plomb

Le vent marin portait l'odeur du sel et des épices dans les ruelles tortueuses de Gênes. Sur les hauteurs escarpées de la ville, deux hommes observaient le panorama. Le port, grouillant d'activité, s'étendait en contrebas, tandis que les toits ocres se succédaient à l'infini sous un ciel d'azur. Franz Josef Bucher et Josef Durrer, venus des montagnes suisses, se tenaient là, le regard fixé sur l'avenir.

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Edition F. Cali, Genova 1895

Depuis leur enfance à Kerns, ces deux hommes n’avaient cessé de rêver grand. L’un, Bucher, un homme audacieux et emporté, parlait d’un ton passionné, ponctuant ses phrases d’un “Subito !” tonitruant, le seul mot italien qu’il connaissait. L’autre, Durrer, plus réservé, analysait les moindres détails, soupesant chaque projet avec une précision d’orfèvre. Tous deux avaient bâti une entreprise florissante, partant d’une simple fabrique de parquets en Suisse centrale pour étendre leurs ambitions bien au-delà des Alpes.

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Edition Brunner & C, Como e Zurich 1913

Mais ici, à Gênes, l’enjeu était tout autre. La ville s’étendait sur des collines abruptes, rendant la circulation difficile. Les deux entrepreneurs avaient remporté un contrat pour construire un funiculaire reliant les hauteurs de Castellaccio à la ville basse. Un projet d’envergure, risqué, semé d’embûches. La pente était raide, le terrain capricieux, obligeant les ouvriers à creuser plusieurs tunnels dans la roche. Bucher voyait déjà le train escalader la colline, un symbole de modernité et de progrès. Durrer, lui, peaufinait les plans, s’assurant que chaque pièce de l’engrenage fonctionnerait à la perfection.

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Edition F. Cali, Genova 1895

Les jours se succédaient, rythmés par le fracas des pioches et le grondement des explosions contrôlées. Mais la fortune se montrait capricieuse. Les coûts s’envolaient, et le projet, trop ambitieux, menaçait de les ruiner. Bucher, obstiné, refusait de céder. Il trouvait toujours un créancier, un investisseur, un pari à tenter pour sauver l’œuvre en devenir. Durrer, plus prudent, s’inquiétait de ces décisions impulsives.

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sans éditeur ,1895

Finalement, en 1893, le funiculaire vit le jour. La ville, émerveillée, célébrait cette prouesse technique qui portait un nom évocateur : Righi, en hommage à la montagne suisse, mais affublée d’un “H” italien. Les billets se vendaient par centaines, les passagers s’émerveillaient de pouvoir dominer la ville sans effort. Pourtant, la réussite ne calma pas les tensions entre les deux hommes. Lorsque la vente des lignes de funiculaire rapporta un million de francs, Bucher s’arrangea pour empocher la totalité de la somme, laissant Durrer furieux mais impuissant. Une photographie le montrait, triomphant, assis dans son jardin de Kerns, le premier millionnaire du canton d’Obwald.

Archives de l'Etat d'Obwald

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Edition F. Cali, Genova 1913

Ce fut la goutte de trop. En 1895, la rupture devint inévitable. L’entreprise fut scindée : Bucher garda les hôtels, Durrer les parquets. L’un continua à bâtir des palaces, de Lucerne au Caire, tandis que l’autre, plus humble, resta fidèle à ses racines. Le temps passa, les souvenirs de leurs exploits s’effacèrent peu à peu. Mais dans les collines de Gênes, le funiculaire Righi continuait son ascension, rappelant aux voyageurs l’audace de deux Suisses venus conquérir les hauteurs d’une ville italienne.

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Publicité Hôtel du Righi, Gênes 1895

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Yannik Plomb
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7 février 2025
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