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Campagne de presse hostile

1 juillet 1985
© Article, photos noir-blanc : Le Chien Magazine
Sylvie Bazzanella

Noblesse du Saint-Bernard (peinture de ~ 1695).

Les chiens du Grand-Saint-Bernard

Les chiens du Grand-Saint-Bernard et leurs gardiens viennent d'être les victimes d'une campagne de presse hostile.

A l'origine : un reportage pour un magazine allemand, rapportant des informations essentiellement fausses, dramatisation sentimentale.

En fait

L'un des reproches portait sur le fait que les chiens représentent un commerce. Mais il faut savoir qu'il y a plus de 150 ans que l'Hospice vend des chiots. Et si les entrées au chenil constituent un revenu, modeste mais appréciable, ce bénéfice sert au maintien du patrimoine du Grand-Saint-Bernard.

Un autre reproche touche aux conditions de vie des chiens. Tous les connaisseurs s'accordent à reconnaître qu'elles sont bonnes ; les chiots sont bien soignés : nourriture, propreté, soins vétérinaires. Ils ont une à deux heures de sortie par jour durant les quatre mois où ils sont au col, temps où leur condition est à comparer avec celles des animaux de zoo, de musées d'histoire naturelle et de cirques. Durant les huit mois où ils sont en plaine, chacun a son propre espace extérieur.

Enfin, les locaux d'exposition étaient trop étroits. Ils viennent d'être agrandis et modernisés. Ils seront inaugurés officiellement le 28 juin 1985. Invitation cordiale à tous les journalistes, aux amis de la nature et des animaux qui voudraient venir se rendre compte sur place de la situation exacte.

D'autre part, les chiens seront intégrés au Musée du Grand-Saint-Bernard, en tant qu'éminents témoins de l'histoire de ce lieu.

A. Campagne de presse injuste

Les chiens du Grand-Saint-Bernard viennent d'être les victimes d'une campagne de presse injuste, tout particulièrement dans les pays de langue germanique. Un reportage effectué en septembre 1984 par un journaliste allemand déclencha le « boulevard-presse ». La plupart des autres auteurs se contentèrent d'en reprendre l'ensemble des éléments ou seulement quelques aspects, les mélangeant parfois à quelques informations tirées de leurs archives.

Le reportage initial était essentiellement faux ; le reste fut dans la même ligne.

Informations erronées :

1. Soins donnés aux chiens

Il est absolument faux de prétendre que le chenil serait sale. Au contraire, il est d'une propreté assez exceptionnelle, en raison même des visiteurs. Pour les autres soins, alimentation, vétérinaires…, les témoignages des connaisseurs sont unanimes : les conditions des chiens sont excellentes (renseignements peuvent être pris auprès de la Société cynologique suisse ainsi qu'auprès du club suisse du saint-bernard : Herr Hans Jost, CH-4932 Ruetschelen).

Pour les promenades, il est faux de prétendre que les chiens ne sortent que deux fois un quart d'heure, par jour. Durant l'été, ils sont à l'extérieur d'une à deux heures par jour et, durant les huit mois où ils sont en plaine, autant qu'ils le veulent, ayant chacun leur espace au grand air. Il n'y a d'exceptions qu'en cas de force majeur : extrême mauvais temps, maladie du gardien… (renseignements peuvent être pris auprès de la Police cantonale, CH-1937 Orsières).

2. Tristesse des chiens

« Tous « les chiens de la race saint-bernard adultes donnent l'impression dêtre tristes. Cela tient à la forme de leurs yeux et à celles des taches noires de leur tête (renseignements peuvent être pris auprès de n'importe quel Club de chiens saint-bernard en Suisse, Autriche, Allemagne…).

3. L'étroitesse des cages

Seul reproche fondé du reportage initial, il faut cependant mettre en question la qualité du journaliste qui a ignoré qu'au moment même où il prenait ses photos, était déjà terminé à l'étage au-dessus de sa tête un nouveau local, prêt à offrir aux chiens plus du double de surface dès leur retour en juin 1985 (renseignements peuvent être pris auprès du vétérinaire cantonal de l'Etat du Valais, CH-1950 Sion).

4. L'histoire des chiens

Il serait trop long de relever toutes les erreurs dans ce domaine. Il faut au moins savoir que la commercialisation des chiens de la race saint-bernard ne date pas de 1970, mais de la première moitié du XIXe siècle, et que, dès le début de ce siècle au moins, la meute fut toujours, pour des raisons d'élevage, plus nombreuse que le nécessitait le travail de sauvetage.

Si l'utilisation des saint-bernard comme chiens d'avalanche a cessé vers 1970, c'est pour des raisons techniques ; trop lourds pour le transport en hélicoptère, moins rapides dans le travail que les bergers allemands et belges (renseignements peuvent être pris auprès des équipes de secours en montagne et des associations de conducteurs de chiens d'avalanches).

B. Situation réelle

1. Raisons pour garder des chiens du Saint-Bernard sur le col, en été

1.1 Intérêt culturel

Il paraît judicieux de garder une meute au lieu d'origine, là où ils ont acquis leur célébrité, en raison de leur travail.

Ils sont aussi le rappel d'une œuvre de bienfaisance éminente et héroïque inscrite dans l'histoire humaine des Alpes.

Le souvenir de l'activité passée des chiens s'estompe avec les années et se déforme ; il en est de même pour l'aventure humaine dont le Grand-Saint-Bernard fut le témoin à travers les siècles. C'est pourquoi un musée de plus de 500 m2 est en train d'être aménagé en lien avec le nouveau chenil. Les chiens y seront donc intégrés comme des témoins privilégiés. L'inauguration officielle aura sans doute lieu en été 1987.

1.2 Intérêt touristique

La célébrité du col tient en particulier au souvenir des chiens, image souvent auréolée de légende. Cela permet à toute une région de montagne aux conditions de vie difficiles d'avoir une tête d'affiche propre à attirer l'attention du monde touristique.

C'est même une des cartes de visite de la Suisse vis-à-vis de l'étranger.

1.3 Intérêt financier

Il est exact que les entrées que paient les visiteurs pour voir les chiens laissent un bénéfice à l'Hospice du Grand-Saint-Bernard, bénéfice modeste mais appréciable. Celui-ci n'est pas pour les « chanoines ». En effet, les membres de la communauté, au nombre de quatre, sont en bonne santé ( !) et travaillent, sans rémunération, au service de l'Hospice, maison d'accueil millénaire.

L'apport du chenil contribue quelque peu au maintien du patrimoine historique et culturel du Grand-Saint-Bernard. L'ensemble des revenus est d'ailleurs insuffisant à l'entretien des bâtiments et de leur contenu. L'aide généreuse des collectivités publiques et des particuliers assure, année après année les secours nécessaires.

2. Conditions de vie des chiens

Les chiens ne sont au col du Grand-Saint-Bernard qu'environ quatre mois par année, temps où la route est ouverte. Le reste de l'année, ils logent dans un chenil de plaine où leur entretien est plus facile : nourriture, soins vétérinaires, locaux.

Durant les quatre mois où les touristes viennent les visiter, leur situation doit être comparée à celle des animaux de zoo, d'un musée d'histoire naturelle ou d'un cirque.

C'est sans doute dans ces cadres-là que les animaux sont habituellement le plus entouré de soins et d'attention.

Le nouveau chenil qui sera inauguré le 28 juin 1985.

Il ne faut pas oublier que si l'on doit protéger les visiteurs contre une éventuelle agression de la part des chiens, nous devons surtout protéger les chiens par rapport au public. Le treillis très serré des cages avait pour but principal d'empêcher que les chiens soient victimes d'une nourriture déséquilibrée par l'apport des visiteurs, surabondance, excès de sucre…

Désormais les chiens seront derrière des baies vitrées, dans des cages beaucoup plus spacieuses avec une bonne aération et le public sera maintenu à quelque distance par une barrière.

Il reste à souhaiter que des critiques infondées ne suffiront pas à ternir l'image traditionnelle des chiens, symboles de bienveillance et de générosité et que les visiteurs apprécieront les nouveaux aménagements destinés à leur procurer plus d'agrément et d'enrichissement.

Une délégation du club suisse du saint-bernard, composée du président et de trois membres du comité, sera présente à l'inauguration officielle le 28 juin prochain.

© Le Chien 7

Revue mensuelle spécialisée des amis du chien - Juillet 1985

© Photo Sylvie Bazzanella

Fillettes en visite au chenil, juillet 2010.

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Sylvie Bazzanella
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26 novembre 2010
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