Château (1291)
Château (1291)
Bulle, le château vu depuis l'est, vers 1910 © Charles Morel Musée gruérien
Construit à partir de 1291 par l'évêque de Lausanne, seigneur de Bulle, le château conserve sa vocation administrative: il est occupé par la préfecture du district, le tribunal et la gendarmerie. La tour principale culmine à 33 m de hauteur. La cour intérieure est ouverte au public.
Fondation La construction du château dure quarante ans, elle commence sous l'évêque de Lausanne Guillaume de Champvent en 1291 pour se terminer en 1331. L'édifice est alors chargé d'assurer la défense de Bulle contre les prétentions des comtes de Gruyères vassaux de la Savoie, des comtes de Savoie établis à Châtel-Saint-Denis et de Louis de Savoie implanté à Romont; ce dernier tente de s'imposer à Vaulruz dès 1302. Le château permet de contrôler l'une des deux entrées principales de la ville au Moyen Âge: la Porte d'Enhaut. La Porte d'En bas (située au fond de la Grand-Rue et démolie en 1805), la petite entrée de la Poterne et un rempart qui entoure le centre historique actuel complètent le dispositif défensif.
Architecture Bien que la ville de Bulle n'ait jamais été directement soumise à la domination des seigneurs de la Savoie, les bâtisseurs du château s'inspirent de leur architecture militaire, en adoptant un plan géométrique simple: un carré avec quatre tous d'angle, dit «carré savoyard», qu'on retrouve dans les châteaux de Romont, Morges et Yverdon notamment. La tour principale est un donjon de 13.5 mètres de diamètre et de 33 mètres de hauteur ; au rez-de-chaussée, l'épaisseur des murs atteint 2.16 mètres. L'entrée d'origine de la tour est située à 9,7 m du sol. Trois autres tourelles surplombent les murs du château. Sans la grosse tour circulaire, le plan du château est presque carré: il mesure 44 mètres de long sur 41 mètres de large. La face nord (entrée principale) ainsi que les faces sud et est sont formées par trois bâtiments massifs ; une enceinte non moins solide en assure la jonction côté est. Ce carré est entouré d'un fossé de 17 mètres de large. Il n'est pas possible de dire si ce fossé était rempli d'eau en permanence ou uniquement en cas de danger. On sait par contre que le canal dit des Usiniers, seule ressource en eau courante de la ville à l'époque, passait entre le château et le tilleul et fournissait l'eau nécessaire au remplissage du fossé. Le château possédait un pont-levis à la fin du XIIIe siècle, dont les points d'attache sont toujours visibles de part et d'autre de l'entrée principale. Le château a échappé aux deux incendies dévastateurs de 1447 et 1805. Malgré quelques rénovations et modifications, il conserve aujourd'hui sa silhouette de forteresse médiévale.
Utilisation Au Moyen Âge, l'Évêque de Lausanne s'y fait représenter par un châtelain et un mayor. Le châtelain a la garde du château et y tient une cour de justice; il perçoit aussi les taxes et les impôts dus au seigneur par les Bullois. Le mayor assiste le châtelain et rend la justice en première instance. On prévoit que l'évêque doit pouvoir compter sur douze lits, établis dans le bâtiment voisin de l'hôpital, à l'emplacement actuel du couvent, s'il vient à passer par Bulle.
Dès 1537, après l'annexion de la ville de Bulle par Fribourg, le château sert de siège aux baillis fribourgeois, prédécesseurs des préfets modernes. Au XVIIIe siècle, à gauche de l'entrée principale, du côté de la chapelle de Notre-Dame de Compassion, se trouve le pilori, une petite bâtisse où les personnes ayant commis des fautes mineures sont entravées et exposées, condamnées à l'humiliation publique; à droite est installé le tourniquet, une cage tournante prévue pour le même usage.
Transformations Entre 1763 et 1768 des travaux importants sont entrepris à l'intérieur du château, dans l'appartement du bailli et la salle d'audience. Au XVIIIe siècle une série de bâtiments qui hébergent des boutiques bordent le fossé du côté du tilleul. Ces boutiques sont remplacées dans la deuxième moitié du XIXe siècle par des immeubles de plus en plus hauts qui cachent peu à peu le château. Ces immeubles sont détruits par la commune de Bulle à partir de 1968.
En 1854 des prisons sont aménagées dans l'aile sud du château. En 1946, de nouvelles cellules sont ajoutées dans l'angle nord-est. Le château est classé monument historique d'importance nationale à la suite d'une campagne de restauration supervisée par la Confédération entre 1921 et 1930. À l'occasion de la construction du nouveau Musée gruérien, un passage public qui traverse le fossé est ouvert en 1976.
De nos jours, le château abrite la préfecture de la Gruyère, le tribunal et la gendarmerie. Il est propriété de l'Etat de Fribourg. La cour intérieure est ouverte au public.
© Musée gruérien et Service des biens culturels du canton de Fribourg
À voir aussi: Les secteurs «Une ville dans son élan» et «Des contours en mouvement» de l'exposition permanente La Gruyère, itinéraires et empreintes, au Musée gruérien.
Pour en savoir plus Daniel de Raemy, Châteaux, donjons et grandes tours dans les Etats de Savoie (1230-1330), Cahiers d'archéologie romande 1998, Volume 1.
Marc-Henri Jordan, Le château de Bulle, Pro Fribourg, n°93, 1991
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