Aux Soldanelles
Aux Soldanelles
Âgé de 5 ans, je me trouve ici devant notre maison des Soldanelles aujourd'hui remplacée par un grand locatif. Nous sommes à Pâques 1962. Mon petit sac recelait sans doute des œufs que j'allai cacher pour mon frère Dominique.
Cette image réveille des souvenirs enfouis :
- A l'étage au-dessus de nous habitait une femme très connue: Adeline Favre (1908-1983), l'accoucheuse qui a mis au monde 8000 enfants dans la région de Sierre. Comme nous n'avions pas de télévision, nous étions parfois invités à aller chez elle et son mari Louis. Le couple n'avait pas d'enfant. Ce qui fit dire au mari : "Nous, on n'a pas d'enfant. Les cerises du jardin sont pour vous."
Mais, à peine les cerises avaient tourné que Louis était sur l'arbre à ramasser les baies pour ses neveux.
Dédicace d'Adeline Favre pour mes parents :
- On chauffait au charbon et je me souviens qu'il fallait descendre en sous-sol pour y chercher le combustible à enfourner dans le petit poêle qui trônait à la cuisine. Un jour, mon frère Dominique y a introduit le porte-monnaie familial. On n'a pas réussi à le récupérer à temps. Dieu, quel drame !
- De temps à autre, la propriétaire de la maison, une vieille fille de Venthône dont le nom m'échappe venait nous rendre visite. Mon frère et moi recevions alors des injonctions pour nous tenir tranquilles et être, comme disait maman, "poli et honnête".
- Ma mère m'avait envoyé acheter du lait chez Kummer, une épicerie sise au bout de la rue. La caissière me rendit vingt centimes mais la tentation fut trop grande : je les échangeai contre quatre bonbons à 5 que j'oubliai sur le comptoir. Remords sans doute. Lorsque j'arrivai à la maison, je dus rendre des comptes : il manquait l'appoint. Je dus avouer mon forfait. Pour me punir, mon père glissa une pièce de quatre sous dans un sachet en plastique qu'il colla en face de mon lit en sorte que, dès je j'ouvrais les yeux, je le voyais.
- Déjà à l'époque, j'étais habité d'une "collectionnite" aiguë. Tout était bon à collectionner: les boutons, les boîtes d'allumettes, les pièces d'un centime et jusqu'aux... mégots de cigarettes. J'en avais parfois plein les poches, ce qui n'était évidemment pas du goût de maman, amie de l'ordre et d'une hygiène irréprochable.
- Un soir, alors que mon frère et moi étions couchés, la porte de la chambre s'ouvrit sur ma tante et mes parents. Tout de go, je demandai à ma tante : "Tante Frida, est-ce que tu as de la sciure dans la tête ?"
Cette question, je l'avais entendue en classe de la bouche de mon maître d'école. Inutile de dire ici la leçon à laquelle j'ai eu droit. J'avais 7 ans.
Voir aussi ces documents concernant notre voisine du dessus :
Une reportage de Canal 9 sur la maison Adeline Favre à Winterthur :
canal9.ch/maison-adeline-favre...
Selon ce site, "Adeline Favre est née à Saint-Luc, dans le val d'Anniviers, le 22 mai d'un printemps enneigé. Elle était la huitième des quatorze enfants de l'honorable famille Salamin. Très tôt, la curiosité lui fait découvrir ce qu'est une sage-femme puisque, à côté des divers travaux aux champs, elle va aider celle du village. Là, elle s'émerveille des égards qu'on porte à la profession et, contre le gré de ses parents, commence un écolage difficile à Genève. Elle rentre à Sierre, se marie et se met à l'ouvrage en 1928. Dès lors, d'abord à domicile, plus tard à l'hôpital, elle accouche plus de 8000 enfants dans la région."
Le livre racontant la vie d'Adeline Favre signalé par Monique Aebischer-Crettol :
Magnifique récit...qui me rappelle le "bon vieux temps"
Merci Jean-Louis de ton sympathique commentaire.
Témoignage très émouvant qui nous rappelle que les temps ont changé. Merci Pierre-Marie
Merci beaucoup Paul-André.
Merci Pierre-Marie pour ces anecdotes au parfum d'antan. J'ai été touchée en y découvrant aussi votre "voisine du dessous", Adeline Favre. Comme sage-femme à l'hôpital de Sierre, elle s'est également occupée de notre maman, qui avait alors 50 ans, lors de l'accouchement de notre petite soeur, son huitième enfant.