Murith et les Alpes

MURITH ET LES ALPES

Publié en 1810, Le guide du botaniste qui voyage dans le Valais est le premier livre consacré à la flore valaisanne. L'objectif du chanoine Laurent-Joseph Murith est double: d'une part rassembler les découvertes, celles des botanistes de son époque ainsi que les siennes propres, d'autre part les présenter au public, afin d'inspirer, écrit-il, «le goût de la botanique parmi ses concitoyens et d'attirer sur le Valais l'attention des botanistes étrangers». À la fois œuvre de vulgarisation et corpus scientifique, le Guide relate dix-huit excursions dans les différentes parties du Valais, au cours desquelles Murith ou ses aides observent systématiquement la flore et collectent des spécimens. De nombreuses espèces sont nouvelles pour le Valais, parfois même pour la Suisse.

Le public auquel s'adressait Murith était celui des botanistes et des amateurs d'explorations alpines. Ce public existe toujours. Les botanistes modernes trouveront à comparer la flore d'alors avec l'actuelle, la répartition des espèces végétales ayant été modifiée par les changements de température survenus depuis le début du 19e siècle, ainsi que par l'impact des activités humaines sur les différents milieux. Les amateurs de voyages alpins sont là, eux aussi, qui apprécieront, en plus des descriptions de paysages qu'ils affectionnent, la longueur des itinéraires et la rapidité avec laquelle Murith et ses compagnons les parcouraient. Le public d'aujourd'hui peut cependant s'avérer plus étendu, les contemporains de Murith n'ayant pu ressentir à son égard l'attrait qu'exerce la perspective du passé, qui nous fait voir leur époque comme un sujet de curiosité, et Murith tel un personnage à redessiner au crayon de l'histoire.

Lorsque paraît son Guide, le voyage en Suisse est en vogue. Après avoir été perçue pendant des siècles comme un monde effrayant, la montagne inspire au 18e siècle et au 19e siècle naissant, des sentiments aimables; on vient de toute l'Europe, beaucoup en Valais, découvrir ce «refuge de la vie simple et des mœurs pures[1]». Plus fondamental, l'esprit des Lumières perdure. En plus d'être un monde à aimer, la montagne est à étudier. L'origine et la nature des roches, la diversité de la végétation, les variations atmosphériques, le développement des glaciers, l'âge de la terre, l'évolution des espèces présentent quelques-unes des énigmes que les savants et les naturalistes européens élucident peu à peu. En plus de comprendre, il leur faut nommer, décrire, classer, dans un effort collectif visant à inventorier l'ensemble du vivant. Le travail de Murith se situe dans cet essor.

Dès les premières pages du Guide, il présente la communauté des botanistes qui, à son époque, s'occupent de la flore valaisanne**.** Il a vu leurs collections. C'est ce matériau que Murith ambitionne de rassembler et de compléter. Il dit en particulier son admiration pour les travaux de Johann-Christoph Schleicher[2] et Jean-François-Aimé-Philippe Gaudin[3], avec lesquels il entretient des relations fécondes. Son hommage le plus soutenu va cependant à Abraham Thomas[4], qu'il qualifie de «nouveau Colomb». Garde forestier originaire du canton de Vaud, Thomas a déjà travaillé pendant plusieurs années pour le compte d'Albrecht von Haller. Explorant les vallées les plus reculées, il y a collecté une partie des plantes qui permirent au savant bernois de constituer la première flore helvétique. Murith convie le lecteur à apprécier le portrait qu'en fait le poète allemand Friedrich von Matthisson, témoignant qu'Abraham Thomas peut «reconnaître chaque plante des Alpes, sans exception, au premier regard, et souvent de très loin, connaissant la classe, l'ordre, le genre et l'espèce[5]». Murith le sollicite pour mener à bien son projet. Pendant plus de dix années, ils collaborent. L'un des fils Thomas, Louis[6], se joint à eux. Le jeune naturaliste finira par prendre la relève de son père et partira, seul, recueillir dans les montagnes des plantes pour Murith.

Le Guide en est un véritablement, au sens où Murith décrit de manière détaillée les itinéraires et le temps requis pour les parcourir. Il nomme les plantes observées et la période de leur floraison. Un tel guide n'aurait pas aujourd'hui la même forme. Murith emploie en effet le mode épistolaire, alors apprécié en littérature. Onze lettres sont signées d'Abraham Thomas, sept le sont de Murith, seule la lettre XVIII, datée du 5 août 1806 est signée de Louis Thomas. Murith explique en partie sa méthode: «J'avais eu soin d'écrire la relation de mes courses, et Thomas m'envoyait le journal de celles que mes occupations ne me permettaient pas de faire avec lui. Je donnai à ces relations la forme de lettres (…)» Il s'agit donc d'une correspondance fictive traitant d'expériences vécues.

Murith évoque dans son introduction les difficultés ressenties au moment de prendre la plume. Non sans humour, il rappelle que «le Valais n'est pas l'école du style». Il n'en manque cependant pas, rythmant sa narration d'une syntaxe incisive; par exemple lorsqu'il s'engage à décrire la géographie valaisanne: «Un fleuve coule au fond de cette vallée…» Comment dire plus sobrement la majesté du Rhône? Cette sobriété lui sert à maintes reprises, pour évoquer pas à pas les accidents du relief, les paysages, les émotions que lui inspire la rencontre avec les plantes. Murith devient écrivain voyageur. Une difficulté confronte cependant le lecteur lorsque survient l'énumération des espèces. Comme cela se pratique entre botanistes, Murith utilise les noms latins plutôt que les vernaculaires. Le lecteur non-latiniste, non-botaniste doit faire un effort. Pas en vain, car pour peu que l'on se sente piqué par la curiosité et, à chaque lettre, un peu plus attaché à l'entreprise du chanoine naturaliste, cette nomenclature d'abord hermétique s'avère, in fine, instructive.

«Né dans les montagnes du Valais…», ainsi Murith, parlant de lui-même, commence-t-il son introduction à l'édition de poche. C'est à Sembrancher, au bord de la Drance d'Entremont, dans une demeure patricienne que Laurent-Joseph Murith voit le jour, le 10 juin 1742. Issue d'une lignée de tanneurs, sa famille est originaire de Gruyère. Il fait ses humanités au Collège des Barnabites, à Aoste, puis chez les pères jésuites à Sion. Dans la première lettre de son Guide, Murith rappelle que son goût pour la botanique et la minéralogie s'est éveillé «dès les premières années» de son entrée à l'hospice du Grand-Saint-Bernard. La maison hospitalière est en effet cette chrysalide où il va se former. Situé au cœur des Alpes, à près de 2500 mètres d'altitude, sur le col qui sert depuis des millénaires au franchissement entre le nord et le sud de l'Europe, l'hospice est, dès sa fondation en 1050 par Bernard d'Aoste[7], considéré comme un haut lieu de la chrétienté. La raison étant que les chanoines y exercent gratuitement l'hospitalité et le sauvetage des voyageurs, l'année durant[8]. Tout autour s'élèvent les Alpes; dès le seuil, c'est un univers de pentes escarpées, de crêtes, de sommets, un pays de lumière et de vent.

Les «premières années» dont parle Murith doivent être comptées à partir de septembre 1760, lorsqu'il commence son noviciat, à l'âge de 18 ans. La science qui l'occupe d'emblée n'est cependant ni la botanique ni la minéralogie, mais l'archéologie. Aussitôt que les études, les offices et les tâches hospitalières lui en laissent le temps, il participe avec d'autres chanoines aux fouilles entreprises sur le Plan-de-Jupiter, un replat rocheux situé dans la partie occidentale du col du Grand-Saint-Bernard. On y voyait encore les vestiges d'un temple romain[9]. Creusant la terre maigre, ils exhument des centaines de monnaies, des fragments de statuettes en bronze, des plaques votives enfouies depuis plus de treize siècles. Arrêtés par la neige, ils profitent des huit à neuf mois d'hiver pour étudier et identifier leurs découvertes. Murith en établit le premier catalogue. La pièce enregistrée sous le No 1 est une statuette de Jupiter, bras gauche brisé. Des annotations faites par le chanoine Alfred Pellouchoud, en 1954, indiquent le mois et l'année de la découverte de certains objets. La première trouvaille, datée de 1759, est attribuée au chanoine François-Christian Catellani. Il s'agit d'une plaque votive gravée dans le bronze. Deux autres plaques sont signalées comme ayant été trouvées par Murith lui-même, pendant l'été 1763.

Entre-temps, le 22 septembre 1761, Murith prononce ses vœux solennels - chasteté, pauvreté, obéissance - confirmant son appartenance à la congrégation des chanoines réguliers du Grand-Saint-Bernard. En 1762, le chapitre de la congrégation lui confie une charge de quêteur, afin de contribuer à doter l'hospice des ressources nécessaires au maintien de l'hospitalité[10]. (Mission d'autant plus vitale que dix ans plus tôt, en 1752, la bulle In Supereminenti du pape Benoît XIV a dessaisi la congrégation de ses propriétés au sud des Alpes. Les chanoines ont certes recouvré le droit d'élire leur prévôt, mais ils ont perdu la plus grande partie de leurs ressources financières.) S'absentant ponctuellement de l'hospice pour aller quêter en Haut-Valais et dans les cités alémaniques de Bâle et de Soleure, voire en Alsace[11], Murith poursuit en même temps ses études de philosophie et de théologie dans le cadre du séminaire. Il reçoit la prêtrise le 20 septembre 1766. Inspirant de toute évidence le respect et l'estime de ses pairs, il est nommé en 1769 secrétaire du chapitre et maître des novices puis, l'année suivante, clavandier. Cette dernière fonction est spécifique à la congrégation du Grand-Saint-Bernard. Le clavandier est responsable de l'approvisionnement de l'hospice et du bon accueil des passants[12]. Enfin, en 1775, à 33 ans, Murith est désigné prieur claustral de l'hospice du Grand-Saint-Bernard.

La communauté religieuse de l'hospice compte alors une douzaine de chanoines. La maison est telle qu'en témoignent les estampes de l'époque, imposante et solitaire au cœur des montagnes - son clocher est encore apparent, il sera caché dès lors qu'un étage sera ajouté, au cours de la première moitié du 19e siècle. Hormis l'absence de confort et l'organisation des offices, alors en cours de remaniement, la vie quotidienne n'y est guère différente de ce qu'elle est aujourd'hui. Suivant la règle de saint Augustin et les constitutions de leur congrégation, les chanoines mènent une vie de prière et de partage, leur sacro-sainte devise Hic Christus adoratur et pascitur, «Ici le Christ est adoré et nourri», rappelant la souveraineté de leur vocation hospitalière. Les passants sont nombreux et de toutes conditions, qui montent à l'hospice hiver comme été, par nécessité le plus souvent, pour franchir les montagnes dans un sens ou l'autre, par sympathie aussi, pour rencontrer les chanoines dans leur lieu si renommé.

En hiver, les religieux s'adjoignent le service de marronniers, ces guides qui vont avec les fameux chiens à la rencontre des voyageurs. Les témoignages ne manquent pas, du service rendu par ces animaux prompts à trouver le chemin dans la neige et la brume. Il n'est pas rare non plus que les secours arrivent trop tard. Un obituaire[13], dans lequel chaque prieur claustral depuis 1677 consigne les morts en montagne, rappelle la fréquence des tragédies. En 1774, il neige abondamment dans les Alpes valaisannes. À la date du 7 avril, le prieur Louis-Antoine Luder rapporte qu'une avalanche partie du Mont-Mort, à proximité de l'hospice, emporte un groupe d'une vingtaine de marchands et soldats qui traversaient le lac gelé en direction de l'Italie. Seuls sont épargnés le marronnier, qui se trouvait en tête, et le dernier de la troupe. Sur les lieux dans les instants qui suivent, Murith et ses confrères parviennent à sauver trois hommes[14]. Devenu prieur, Murith enregistre au moins quatre décès entre 1777 et 1778. Les chiens, qui sont gardés à l'intérieur de la maison, ne servent pas qu'à porter secours aux égarés : un jour, le prieur Murith s'en sert habilement pour intimider des voleurs[15].

Parmi les gens de lettre et de science qui fréquentent l'hospice au cours de cette période, Murith rencontre Sir William Hamilton, ambassadeur de Grande-Bretagne à Naples, spécialiste des antiquités étrusques, grecques et romaines. Murith lui offre deux ex-voto[16], sans doute pour le remercier de l'avoir éclairé au sujet de pièces découvertes au Plan-de-Jupiter. Quant aux personnalités qui influenceront sa vocation de naturaliste, il est possible que Murith fasse la connaissance d'Abraham Thomas dès 1763, quand celui-ci herborise avec son père, Pierre, dans les environs du col du Grand-Saint-Bernard[17] ; possible également qu'il rencontre Horace-Bénédict de Saussure[18] dès 1767, lorsque le 1er août de cette même année, le savant genevois effectue près de l'hospice des mesures de température[19]. Rien ne confirme formellement l'occurrence de telles rencontres. En revanche, il est certain qu'au cours de l'été 1774, Murith guide Saussure dans les montagnes alentour, d'abord sur un sommet proche du Pain-de-Sucre - probablement le Mont-Fourchon - puis au sommet de la Chenalette et sur les pentes enneigées du Mont-Mort[20].

Ses responsabilités ecclésiales ne laissent guère de temps libre au chanoine naturaliste. C'est seulement, écrit-il dans son introduction au Guide, lorsque «la relâche d'occupations plus essentielles» le lui permet qu'il se livre à l'étude des sciences. La priorité sans équivoque de la vie religieuse explique, selon ses termes, qu'il se mette «un peu tard» à la botanique. Il est présumable que son amitié naissante avec Saussure encourage Murith à se consacrer d'abord à la lithologie et à la minéralogie. Gardant la botanique pour de futures recherches, Murith commence à étudier et collecter les minéraux. Il s'initie en même temps à l'usage des instruments de mesure et aux calculs permettant de définir l'altitude.

La première lettre connue de sa correspondance - réelle, celle-ci - avec Saussure est datée du 12 mars 1776[21]. Le chanoine remercie le savant du baromètre que celui-ci lui destine, puis annonce qu'il lui enverra un échantillon rapporté d'une mine d'or du Valais; il finit en disant tout l'espoir qu'il a de voir son cabinet d'histoire naturelle, à Genève. Selon la lettre du 18 mai 1778[22], sa curiosité a été satisfaite: Murith se félicite d'avoir pu examiner de près «toutes les productions les plus riches, les plus belles, les plus rares que la nature a dispersées dans les quatre parties du monde» ; témoignant sa reconnaissance à l'égard de Saussure, qui lui a de surcroît offert des minéraux, Murith avance que la congrégation du Grand-Saint-Bernard le regardera toujours comme étant le «fondateur» du cabinet d'histoire naturelle de l'hospice.

En juillet 1778, Murith guide à nouveau Saussure dans les hauteurs à l'ouest et au nord du col[23]. Un autre savant genevois, Marc-Auguste Pictet[24], les accompagne. Le chanoine leur montre notamment un filon de «fer spéculaire magnétique», où Saussure prélève deux échantillons. Puis il les mène dans la région de la Pointe-de-Drône, jusqu'à une curiosité qu'il y a découverte lors de ses explorations: un rocher dont la surface est polie comme un miroir. Le lendemain, les trois hommes prennent la route de Bourg-Saint-Pierre et, depuis le village, font l'ascension, en partie à dos de mulet, jusqu'au glacier de Valsorey, que Saussure avait vu en 1767 et qu'il désire revoir. Le même été, Murith retrouve un personnage connu de Saussure, Marc-Théodore Bourrit[25]. Écrivain, peintre, chantre de la cathédrale de Genève, Bourrit pratique également l'alpinisme; il s'intéresse à tout ce qui a trait aux milieux et aux itinéraires alpins. Murith l'a guidé l'année précédente au Pain-de-Sucre, ce sommet emblématique du Grand-Saint-Bernard ; ils se sont également rendus au glacier de Valsorey, où Bourrit s'est inquiété en voyant le chanoine s'enfoncer dans les cavités sous-glaciaires, pour reparaître, une heure plus tard, réjoui de ce qu'il y avait contemplé. Cette fois-ci, Bourrit sollicite Murith pour explorer les confins du val de Bagnes[26]. Ils montent le long de la Drance, rejoignent le col de Charmotane, marchent deux jours parmi les glaciers, dorment deux nuits chez des bergers; scrutant l'immensité à travers leurs longues-vues, ils se savent parmi les premiers à parcourir ces régions reculées. Au retour, les deux voyageurs font halte à Sembrancher dans la maison natale du chanoine, où Murith père les accueille. À cette période, Murith n'est plus prieur claustral; le chapitre de la congrégation l'a nommé curé à Liddes, paroisse dépendante du Grand-Saint-Bernard, à quelques lieues de l'hospice.

En prenant ses quartiers à Liddes, Murith quitte en même temps la vie communautaire propre à l'hospice et la nature âpre de la haute montagne; il devient le pasteur d'une société villageoise entourée de pâturages et de forêts. Ses responsabilités ne diminuent pas; les charges de son nouveau ministère comprennent la messe quotidienne, le catéchisme aux écoliers, les visites aux familles, les deux messes du dimanche, suivies de l'office des vêpres, la bénédiction des mariages, les baptêmes, les enterrements, la célébration des fêtes liturgiques, auxquelles s'ajoutent les tâches administratives telles que la gestion des terrains et des bénéfices paroissiaux. Le curé doit encore trouver le temps de se recueillir pour les sept offices du jour, de laudes à complies. Dans la cure, Murith a installé sa bibliothèque, son cabinet d'histoire naturelle, consistant essentiellement en minéraux, et son médailler rempli de monnaies exhumées lors des fouilles archéologiques. Profitant de chaque heure de loisir, il explore la nature du val d'Entremont et du val Ferret; veillant toujours tard le soir, à l'œuvre tôt le matin, il travaille au catalogue de ses monnaies romaines et gauloises trouvées au Grand-Saint-Bernard et sa région, plus de 500 pièces[27]. Il écrit à son ami Horace-Bénédict de Saussure.

Dans sa lettre datée du 6 février 1779, Murith dit attendre l'occasion de lui faire parvenir un silex poli, ainsi que des échantillons de mines exploitées à Saint-Maurice, puis il annonce, sans donner de détail, son projet de gravir le Mont-Vélan[28]. Il a pu contempler maintes fois cette colossale cime glacée depuis le col du Grand-Saint-Bernard; il continue de l'apercevoir depuis les environs de sa nouvelle demeure. Après une nuit passée dans un chalet d'alpage, Murith part à deux heures du matin, le 31 août, en compagnie de deux chasseurs[29]. En plus de quelques provisions de bouche, ils emportent un baromètre, deux thermomètres, une boussole à niveau. Pendant plusieurs heures, s'aidant mutuellement dans l'obscurité, ils escaladent les rochers et gravissent les pentes enneigées. L'un des chasseurs, effrayé, rebrousse chemin. Équipés de crampons et de bâtons ferrés, Murith et son unique compagnon poursuivent leur avancée sur la glace. En parvenant au sommet, ils découvrent le spectacle des Alpes dans le soleil matinal, dominées par la pyramide du Mont-Blanc. Explorant pendant quatre heures les environs de la calotte sommitale, Murith effectue des mesures barométriques et de températures destinées aux calculs de l'altitude, qu'il évaluera ultérieurement à 11534 pieds[30]; il examine les roches, feuilletées, mêlées de quartz; il remarque une guêpe qui agonise sur la neige, des «vestiges» de chamois[31], un papillon en vol.

Murith fait part à Saussure du succès de son ascension dès le 5 septembre; il dit regretter de ne l'avoir pas eu à ses côtés: «Vous auriez été à même de comparer dans un cercle immense toutes les montagnes et leurs différentes hauteurs…[32]» Cette première ascension du Mont- Vélan s'inscrit nécessairement dans l'histoire de l'alpinisme; elle démontre surtout la façon dont Murith conçoit la quête scientifique: sans craindre de donner de sa personne, sur le terrain, par l'observation directe de la nature. Cette qualité doit contribuer à l'estime que Saussure lui voue. Le savant genevois le sollicite en 1785 au sujet de l'origine des blocs de granit visibles dans le val d'Entremont. Dans sa lettre du 18 mai[33], Murith lui donne une première réponse, nourrie d'observations préalables, puis il se rend le 9 août aux affleurements granitiques de la Pointe-d'Orny, au-dessus de Champex, où il prélève des échantillons qu'il compare avec le granit des blocs des environs de Liddes, distants de plusieurs kilomètres. Cet examen lui donne la certitude qu'il s'agit bien de la même roche. Il en fait part à Saussure dans une deuxième lettre datée du 13 août[34].

Horace-Bénédict de Saussure demeure partisan de la théorie neptuniste[35], selon laquelle les montagnes se sont formées par sédimentation dans l'océan primordial. Il ne sait pas que les blocs erratiques présents dans les Alpes et au-delà ont été charriés par les glaciers[36]. Sa conviction est que ces «blocs roulés» ont été déposés à différentes hauteurs des flancs de vallées lorsque, après «un cataclysme antérieur à toutes les époques historiques, il se fit une violente débâcle des eaux, qui entraîna (…) des fragments de montagne[37]». Dans ses deux lettres, Murith évoque l'origine des blocs de granit de l'Entremont en reprenant le terme de «débâcle» employé par Saussure. Ce seul indice prouve que Murith distingue sans équivoque les objets de la foi des objets de la science. En parlant lui-même de «débâcle», le chanoine naturaliste acquiesce aux vues de Saussure ; il admet que depuis le temps de la Création, celle-ci s'est transformée.

Il n'y a pas lieu, ici, de rechercher beaucoup plus loin la manière dont Murith se figure les correspondances entre foi et science. Tout au plus remarque-t-on dans son Guide une référence au Créateur, dans une lettre attribuée à Abraham Thomas, la septième, comme si le propos venait de son correspondant plutôt que de lui-même: «On dirait que le Créateur a voulu ici donner, en grand, le modèle des plus formidables fortifications: des murs, des bastions, des remparts taillés à pic dans le roc (…)» Murith ne juge pas nécessaire d'en dire plus pour désigner ce qu'il sait être à l'origine des choses.

Dans sa lettre du mois de janvier 1786[38], Murith annonce à Saussure qu'il lui fait parvenir un échantillon prélevé dans une mine exploitée à Sembrancher, qui lui paraît contenir «du plomb blanc, ou chaux de plomb». Il poursuit, en félicitant le savant «d'avoir atteint sur la côte du Mont-Blanc la 1re hauteur pratiquée en Europe». Quelques mois plus tôt, en septembre 1785, une nouvelle tentative d'atteindre le plus haut sommet alpin avait mené Saussure, Bourrit et leurs guides jusqu'au pied de l'Aiguille-du-Goûter. Murith en avait été informé par Bourrit, lequel lui avait donné des explications sur les mesures d'altitude, «mais d'une manière si obscure, écrit Murith, que je n'y ai rien compris de précis». Horace-Bénédict de Saussure affirmera que l'altitude atteinte à l'Aiguille-du-Goûter était alors la plus haute «qu'aucun observateur connu» ait atteinte jusqu'alors en Europe. Ni lui ni Murith ne recherchaient la gloire de conquérir les sommets alpins, ou ils y auraient consacré plus d'efforts; il est vrai que les instruments de mesure étaient en cours de perfectionnement et manquaient de précision. On remarque cependant que l'altitude de 1907 toises observée par Saussure au faîte de son ascension[39] était sensiblement inférieure à celle où se trouvait Murith au sommet du Vélan, six ans plus tôt[40].

Horace-Bénédict de Saussure rapporte que Murith, à Liddes, «aime et cultive avec beaucoup de succès l'histoire naturelle[41]». S'il excelle en minéralogie, Murith s'intéresse aussi à la conchyliologie - l'étude des coquillages - à l'ornithologie, à l'entomologie, exerçant dans chaque domaine son goût pour l'observation et la systématique. Les «premiers succès» de ses courses botaniques, que Murith évoque dans la première lettre du Guide, suggèrent qu'il a enfin le temps, au début des années 1790, de s'initier à la reconnaissance et à la nomenclature des plantes. Est-ce à cette période qu'Abraham Thomas lui remet un exemplaire du livre d'Albrecht von Haller, Historia Plantanum Helvetia? Murith annotera minutieusement cet ouvrage précurseur; à la nomenclature proposée par Haller, il préfère en effet celle, plus concise, de Carl von Linné. Pour chaque espèce nommée par Haller, Murith inscrit l'équivalent linnéen. Il commence un herbier.

Ses responsabilités ecclésiales lui valent quelques déboires, en 1790: après qu'il eut lu, en chaire, une sentence de justice en faveur du bénéfice paroissial, ses paroissiens de Liddes le chassent à coups de pierre[42]. L'année suivante le voit nommé prieur de la communauté de Martigny. Murith déménage à nouveau son cabinet d'antiquités et d'histoire naturelle; il continue à descendre de la montagne vers la plaine. Ainsi est-ce depuis Martigny qu'il réalise la majeure partie de ses recherches en botanique. La première course relatée dans le Guide est datée de 1793, la dernière, de 1806. En avril 1801, L. Bridel observe que Murith complète ses collections de plantes alpines[43]. La collecte des plantes n'ayant de sens, botaniquement parlant, que si elle s'accompagne des données de terrain, Murith rédige son « Catalogue des plantes du Vallais (sic), avec le tems (sic) de leur floraison dans chaque mois [44]». Ce manuscrit à l'écriture minutieuse, établi sur un cahier de 66 pages, servira de matrice au catalogue final des 1930 espèces publié dans l'édition in-quarto.

Entre-temps, Murith prend part à un événement historique, non de science, mais de guerre. Mai 1800, l'armée napoléonienne, 40 000 hommes, franchit le col du Grand-Saint-Bernard pour aller combattre les Autrichiens; Murith et le chanoine Henri Terrettaz sont sollicités pour accompagner le premier consul depuis Martigny jusqu'à l'hospice. À Bourg-Saint-Pierre, Napoléon est pourvu d'une monture. Le peintre David en fera un cheval fougueux; Murith était là pour voir qu'il s'agissait d'une mule. Il n'en rendra pas moins hommage au conquérant dans son Guide, au moment d'évoquer la construction de la route du Simplon commandée par Napoléon: «La route hardie qu'on vient de tailler dans ces rochers immortalisera à jamais le nom de l'Empereur (…)»

La même année 1800 paraît à Paris un opuscule intitulé Le Mont-Joux ou Le Mont-Bernard[45], par le diplomate français Michel-Ange-Bernard de Mangourit[46], qui a résidé plusieurs mois en Valais. Mangourit invite Murith à se prononcer sur plusieurs aspects du Grand-Saint-Bernard. Il y est question de sujets historiques tels que le passage d'Hannibal et de ses armées par le Mont-Joux au 3e siècle av. J.-C., hypothèse défendue par Murith, et l'origine de Bernard de Menthon, fondateur de l'hospice. Murith s'exprime également au sujet de l'utilité des chiens et du danger des avalanches; il explique la manière de soigner les personnes gelées, évoquant l'usage médicinal que les chanoines font de l'Achillea genepi. La faune alpine est abordée, avec ses ours et ses loups; concernant les premiers, il fait une remarque surprenante, affirmant qu'ils sont «très carnassiers dans les grands froids de l'hiver», alors même qu'en hiver, c'est connu, les ours dorment plus qu'ils ne chassent. Concernant les rapaces, ses notions sont empreintes de préjugés populaires: «Les oiseaux de proie sont un fléau des Alpes.» La mention qu'il fait des marmottes est intéressante sur le plan climatique: «Les marmottes vont jusqu'au pied des glaciers, et il y en a plus de cent toises au-dessus de l'hospice du Mont-Bernard.» Or, il n'y a plus de glacier aujourd'hui dans les parages de l'hospice.

Murith achève de rédiger son «Catalogue géologique[47]», dans lequel il décrit, en cinq parties, la nature des roches de différentes régions du Valais. Vers 1805, Mangourit l'introduit à l'Académie celtique, future Société des antiquaires de France. Dans le mémoire qu'il adresse pour publication à cette société savante, Murith présente les inscriptions et les monnaies romaines du Grand-Saint-Bernard[48]. De toute évidence, il éprouve alors le besoin de conclure les travaux qui l'ont occupé au cours des décennies précédentes, et de synthétiser, sous forme manuscrite, l'ensemble de ses connaissances.

En 1809, Murith pose pour le peintre Félix Cortey[49], du Châble, qui réalise deux portraits. Dans l'un, le prieur de Martigny porte l'habit de chœur, soit une soutane recouverte d'un rochet à manches resserrées et d'un camail rosacé, typique de la congrégation du Grand-Saint-Bernard depuis le 17e siècle. Il tient en main un livre, probablement un bréviaire. L'autre portrait le représente en soutane et rochet réduit en sautoir. D'une main, il tient une loupe et, de l'autre, une pince refermée sur un spécimen végétal, difficile à identifier. Sur la table sont posés des fleurs et des minéraux, principaux objets de son intérêt pour les sciences naturelles. Les armoiries de la famille Murith sont reconnaissables dans la partie supérieure gauche de chaque tableau; s'y ajoutent les insignes du chapeau et des glands, indiquant respectivement l'état d'ecclésiastique et celui de prêtre. Dans la partie inférieure droite, le peintre a inscrit les qualités de son sujet, notamment le rang de notaire apostolique, témoignant de son érudition théologique. En arrière-plan, une bibliothèque fait valoir deux ouvrages emblématiques de ses travaux scientifiques: Les antiquités du Valais, évoquant le manuscrit envoyé à l'Académie celtique, et Le guide du voyageur botaniste en Valais, titre que Murith envisageait initialement de donner à son principal ouvrage de naturaliste, publié l'année suivante.

En janvier 1810, Murith adresse à un ami lausannois[50] «un oiseau assez singulier, qu'on serait tenté de prendre pour un merle blanc», qu'il ne se rappelle pas avoir vu «ni dans Mr de Buffon, ni dans aucune collection». En octobre 1815, le naturaliste genevois Henri-Albert Gosse[51] le sollicite pour prendre part à la fondation de la Société helvétique des sciences naturelles. Affaibli, Murith ne peut assister à cette assemblée historique, mais il accepte d'être compté parmi les membres fondateurs. Il s'éteint un an plus tard, au prieuré de Martigny, le 9 octobre 1816, sûrement veillé par un ou deux de ses confrères.

En plus des deux portraits, du Guide et des documents déjà nommés*,* d'autres grands objets témoignent de son travail et de sa présence. Le plus important pour la botanique est l'herbier en deux volumes. Ses 370 folios en papier grossier présentent 1206 plantes. Les espèces y sont déterminées, d'abord de la main de Murith, à la plume, puis d'une autre main, inconnue celle-ci. L'écriture de Murith, toujours élégante et régulière, est très identifiable. On la retrouve sur les étiquettes de sa collection minéralogique, un important legs scientifique, fort de plus de deux cents spécimens. Comme les fleurs desséchées de l'herbier, ces pierres aux reflets de grenat, de cuivre, d'anthracite montrent Murith parcourant la montagne, observant la nature, «prenant note».

Pierre Rouyer/Musée de l'hospice du Grand-Saint-Bernard

[1] Éric Mévillot. «Une image identitaire alpine à travers les récits de voyages, XVIIIe-XIXe siècles. L'exemple du Valais (Suisse)», Revue de géographie alpine, tome 83, No 1, 1995, p. 67 à 87.

[2] L'Allemand Johann-Christoph Schleicher (1770-1834) s'est installé à Bex (VD) comme pharmacien et marchand de plantes. Conservé au Musée botanique cantonal de Lausanne, son herbier regroupe 8843 étiquettes, dont 2351 de lichens. In Musées et jardins botaniques cantonaux, musees.vd.ch

[3] Pasteur et botaniste vaudois, Jean-François-Aimé-Philippe Gaudin (1766-1833) est l'auteur d'une monumentale «Flora helvetica» en 7 volumes, dans laquelle il a décrit de nombreuses espèces nouvelles. Outre des mousses, des algues et des champignons, son herbier, conservé au Musée botanique cantonal de Lausanne, contient 3534 étiquettes de plantes à fleurs. In Musées et jardins botaniques cantonaux, musees.vd.ch

[4] Abraham Thomas (1740-1824) participa dès son enfance aux excursions botaniques que son père, le garde forestier Pierre Thomas (1708-1781), fit pour le compte d'Albrecht von Haller (1708-1777).

[5] Cité par Florian Cosandey, «Les naturalistes Thomas et leurs amis», Revue historique vaudoise, No 3, 1942, p. 95.

[6] Charles-François-Louis-Alexandre Thomas (1784-1823), dit Louis, quatrième fils d'Abraham Thomas.

[7] Chanoine Jean-Pierre Voutaz, «Saint Bernard d'Aoste, du Mont-Joux, de Menthon, des Alpes. Autant de noms pour l'homme qui a fondé l'hospice au XIe siècle: La vie de saint Bernard», Chne J.-P. Voutaz et P. Rouyer, Découvrir le Grand-Saint-Bernard, Martigny, 2013, p.12 à 19.

[8] Cette gratuité a cessé en 1942, mais l'hospice continue d'accueillir des dizaines de milliers de passants chaque année.

[9] Chrétien de Loges, Essais historiques sur le Mont St. Bernard, 1789, p.11.

[10] La fonction de quêteur a pris fin dans les années 1850. Le chanoine et historien Lucien Quaglia évoque la manière de procéder des quêteurs du Grand-Saint-Bernard, en rapportant le témoignage du dernier d'entre eux: «Ils trouvaient dans chaque localité un pied-à-terre, auprès d'une famille amie de l'hospice. Précédés d'un homme qui agitait une clochette, ils traversaient les différentes localités. Les gens s'assemblaient à un endroit convenu et apportaient au quêteur de l'argent ou des denrées. L'offrande terminée, le quêteur vendait à l'enchère les denrées reçues pour les monnayer puis s'en allait vers un autre village.» La Maison du Grand-Saint-Bernard, des origines aux temps actuels, Martigny, 1972, p. 423.

[11] Ibid., p.421; Pierre-Germain Tissière, «Notice sur le chanoine L.-J. Murith», Bulletin de la Murithienne, Nos 29-30, 1900, Saint-Maurice p.158.

[12] La fonction de clavandier - ou clavendier - demeure d'actualité à l'hospice du Grand-Saint-Bernard.

[13] Archives du Grand-Saint-Bernard, AGSB 2732, Obitorum.

[14] Michel-Ange-Bernard de Mangourit, Le Mont-Joux ou le Mont-Bernard, Paris, 1800. Réédition par le chanoine Jean-Pierre Voutaz, Sierre, 2002, p. 51.

[15] Marc-Théodore Bourrit, Description des cols ou passages des Alpes, Première partie, Genève, 1803, p. 260.

[16] Sir William Hamilton a vendu une partie de sa collection en 1772 au British Museum, où sont conservés les deux ex-voto offerts par Murith.

[17] Hans-Peter Fuchs, «Histoire de la botanique en Valais», Bulletin de la Murithienne, No 106, 1998, Saint-Maurice p.122.

[18] Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799).

[19] Horace-Bénédict de Saussure, Voyage dans les Alpes, t. 2, Neuchâtel, 1779-1796, p. 444.

[20] Ibid., p. 459.

[21] Bibliothèque de Genève, Département des manuscrits, Archives de Saussure, f. 282.

[22] Ibid., f. 284-285*.*

[23] Saussure, op. cit., p. 449 à 455.

[24] Marc-Auguste Pictet (1752-1825) ancien élève de Saussure, lui succéda à la chaire de philosophie naturelle de l'Académie de Genève. Il est à l'origine de la station météorologique installée à l'hospice en 1817.

[25] Marc-Théodore Bourrit (1739-1819).

[26] Bourrit, Descriptions des Alpes pennines et rhétiennes, Genève, 1781, pp. 42 et suivantes.

[27] Archives du Grand-Saint-Bernard, AGSB 5254, Catalogus numismatum.

[28] Bibliothèque de Genève, Département des manuscrits, Archives de Saussure, f. 286-287*.*

[29] Bourrit, Descriptions des Alpes pennines et rhétiennes, Genève, 1781, p. 91.

[30] Altitude donnée par Murith dans Différentes hauteurs prises avec M. le Cpt Wild, directeur des mines de LL. EE. Berne, par M. Murith, dans le Valais et duché d'Aoste, dans le voyage de 1787, AGSB 118. On suppose, par déduction, que la mesure utilisée par Murith est le pied de roi, ou pied de Paris, d'une valeur de 0,32484 mètre. L'altitude qu'il donne équivaut dès lors à environ 3746 mètres, alors que l'altitude reconnue au sommet du Vélan est 3727 mètres. Pour les équivalences métriques des anciennes unités de mesure, voir Horace Doursther, Dictionnaire universel des poids et mesures anciens et modernes, Bruxelles, 1840.

[31] Mangourit, op. cit., p. 46.

[32] Bibliothèque de Genève, Département des manuscrits, Archives de Saussure, f. 288-289*.*

[33] Ibid., f. 290-291*.*

[34] Ibid., f. 294-295*.*

[35] Deux théories contradictoires prévalaient au 18e siècle quant à l'origine des roches. Au neptunisme s'opposait le plutonisme, affirmant que les roches sont issues de l'activité volcanique.

[36] C'est en 1829, lors d'une séance de la Société helvétique des sciences naturelles à l'hospice du Grand-Saint-Bernard, que l'ingénieur Ignace Venetz (1788-1859) fait une première présentation de la théorie selon laquelle les glaciers alpins se sont étendus jusqu'au Jura. L'hypothèse selon laquelle les blocs erratiques ont été transportés par les glaciers n'est admise qu'à partir de 1837, lorsque le naturaliste américano-suisse Louis Agassiz (1807-1873) en fait la présentation à la même SHSN, in Société suisse de géomorphologie,unifr.ch

[37] Saussure, Voyage dans les Alpes, t. 1, Neuchâtel, 1779, pp.159-160.

[38] Bibliothèque de Genève, Département des manuscrits, Archives de Saussure, f. 296*.*

[39] Horace-Bénédict de Saussure, Voyages dans les Alpes, t. 2, Genève, 1786, pp. 570-571. On peut supposer, là encore par déduction, que la mesure utilisée est la toise de Paris, d'une valeur de 6 pieds de roi, ou 1,9490 mètre.

[40] Saussure lui-même avait calculé que l'hospice se trouvait à 1257 toises au-dessus du niveau de la mer, et que le Vélan s'élevait 663 toises plus haut, soit un total de 1920 toises au sommet. Voir Saussure, ibid., pp. 443 et 463. Ce sont les calculs de Marc-Auguste Pictet qui s'avèrent les plus justes: 1909 toises de Paris, ou 3720 m, très proches des 3727 m d'altitude au sommet du Vélan.

[41] Ibid., p. 448.

[42] Quaglia, op. cit., p. 452.

[43] Le conservateur suisse ou recueil complet des étrennes helvétiennes, t. 5, Lausanne, 1814, p. 262.

[44] Archives du Grand-Saint-Bernard, AGSB 5256b, «Catalogue des plantes du Vallais, avec le tems de leur floraison dans chaque mois».

[45] op. cit.

[46] Michel-Ange-Bernard de Mangourit, 1752-1829.

[47] Archives du Grand-Saint-Bernard, AGSB 5257.

[48] Le manuscrit a été égaré, puis retrouvé à la Bibliothèque nationale de France au début du 21e siècle.

[49] Félix Cortey, 1760-1835.

[50] Bibliothèque de Genève, Département des manuscrits, «Laurent-Joseph Murith, 1 lettre autographe signée à un naturaliste de Lausanne».

[51] Henri-Albert Gosse, 1753-1816.

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