Saisonnières et saisonniers, 80 ans de labeur à Genève

La liste est longue. Des difficultés à se projeter dans un pays qui n'est pas le sien, une vie à la dure, une adaptation perpetuelle quand bien même celle-ci a rééllement pu commencer pour des immigrés qui ont choisi de tout quitter pour travailler ici. Ont-ils seulement toujours eu le choix? On continue. Des conditions de vie stressantes, dégradantes, disqualifiantes, des rêves et des chantiers intimes inachevés, interrompus par le manque d'argent. Bref, être saisonnier en Suisse et venir de très loin pour travailler n'a pas ressemblé à un chemin tracé à l'équerre. Le parcours de vie a plutôt pris la forme d'un croquis fait de bosses. Avec des "hauts" et surtout des "très bas". De la difficulté d’être de cette famille de constructeurs invisibles de la Suisse, de l'embarras d'être des travailleurs déclassés, de la douleur de n'être que des « petites mains » au service de la communauté dans son ensemble, au service des patrons propriétaires d'établissements hôteliers ou de resturants et économes. Une exposition a commencé à Genève. Elle aborde ces parcours des saisonniers et des saisonnières qui ont "fait" la ville et le canton. A voir et à partager jusqu'au 24 novembre.

Des individus ont choisi la Suisse comme lieu de travail, en tant que femmes et hommes de ménage - techniciens de surface dirait-on de l’autre côté du Salève et du Jura - et qu'en ont-ils retiré? A l’initiative de la Ville de Genève, Les Archives contestataires, le Collège du Travail et Rosa Brux se sont mis autour d’une table pour concevoir une exposition qui retrace le parcours des saisonnières et des saisonniers à Genève entre 1931 et 2019.

L’expo a débuté avant-hier et va se dérouler jusqu’au 24 novembre. Il s’agit de mettre en valeur le travail de ces immigrés venus faire les « saisons », avec un permis de courte durée pour ériger des nouveaux quartiers-cités.

Avec une approche artistique et historique, mémorielle et aussi il faut bien l’avouer émotionnelle, « Nous, saisonniers, saisonnières Genève 1931-1932 » témoigne de la dureté des conditions de vie de ces détenteurs A. L’exposition donne la voix à ces « sans-voix » des saisons et aux immigrés du labeur provisoire, précaire, mal considéré.

L’expo questionne les nombreuses questions encore en suspens aujourd’hui. L’Union européenne et la Suisse s’opposent sur la question des conditions de travail au sein de la Confédération.

D’autres événements en marge de l’exposition sont organisés

« Lettres ouvertes », une série de portraits de saisonniers filmés dans des lieux symboliques de Genève et destinés à être vus par les familles restées au pays. Les témoignages sont accompagnés d’objets chers aux personnes interviewées.

Mardi 12 novembre, 18h30-20 heures, Maison Internationale des Associations Rue des Savoises 15 à Genève. Entrée libre. Quelques autres films sur les Saisonniers d’Espagne :

« Pour vivre ici/Saisonniers d’Espagne » Claude Goretta (1963, 19 minutes)

Un documentaire d’une rare empathie réalisé au début des années 60. Claude Goretta y parle des étrangers deux fois « par le passeport et l’isolement ».

« Album de famille » Fernand Melgar (1993, 54 minutes)

Le réalisateur vaudois interroge ses parents Florinda et Fernando sur leur vie de saisonniers espagnols dans les années 60-90 avec des documents filmiques d’époque et des photos personnelles. Il dresse le portrait d’individus réduits à leur force de travail.

Mercredi 30 octobre, 18h30 Fonction Cinéma, Maison des Arts du Grütli Rue Général-Dufour 16 à Genève

Rencontre-débat sur les conditions de travail en Suisse et sur les migrations hier aujourd’hui et demain.

Mardi 19 novembre 19-21 heures, Maison Iternationale des Associations, Rue des Savoises 15, Genève. Entrée libre. Deux échanges d’expériences de migration :

« Rester ou repartir : un dilemme de la migration » en collaboration avec l’Université populaire albanaise. Dimanche 3 novembre, 16-17 heures, Le Commun, Rue des Bains 28, Genève, entrée libre.

« Les enfants dans les situations de migration précaires » en collaboration avec le Centre de contact Suisse-Immigrés. Dimanche 10 novembre, 16-17 heures, Le Commun, Rue des Bains 28, Genève, entrée libre.

Photo issue de la collection de Pierette Frochaux-Chevrot sur notreHistoire.ch.

David Glaser

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