En 1933, Dinu Lipatti - alors âgé de seulement 16 ans - participe au Concours international de piano de Vienne. Alfred Cortot - membre du jury - est fasciné par sa jeunesse et sa fougue, suggère qu'on lui remette le premier prix, mais les membres du jury lui préfèrent un autre pianiste. En protestation, Cortot démissionne du jury et quitte Vienne, en invitant Dinu Lipatti à venir travailler auprès de lui en France.
L'année suivante, Dinu Lipatti se rend donc à Paris et entre à l'École Normale de musique. Il peut ainsi perfectionner son jeu pianistique auprès de Cortot et d'Yvonne Lefébure, suit également des cours de compositions auprès de Paul Dukas et d'Igor Stravinsky et des cours de direction d'orchestre dans la classe de Charles Munch. Il fréquente également le salon de Nadia Boulanger: cette excellente pédagogue remarque immédiatement son talent, un lien étroit s'établit entre les deux artistes. En plus de l'affection qu'il porte à Nadia Boulanger, Dinu Lipatti voit en elle un modèle musical et une mère spirituelle. Ses années parisiennes furent donc très fructueuses.
C'est également à cette époque qu'il commence une carrière de concertiste, dès 1936, il part en tournée, se produisant aussi bien en soliste qu'en compagnie d'autres musiciens: il aimait en effet beaucoup la musique de chambre. Durant ses années à l'École normale de Paris, il forma un trio avec des amis étudiants, notamment avec la violoniste Ginette Neveu et le violoncelliste Antonio Janigro. Il fera même une tournée en Suisse avec ce dernier et réalisera avec lui plusieurs enregistrements qui ne seront toutefois jamais édités de son vivant. Parmi les partenaires de chambre de prédilection figure son compatriote Georges Enescu, compositeur, pianiste et violoniste qui était également son parrain et son mentor.
Après leur retour en Roumanie, Dinu Lipatti et son épouse Madeleine Cantacuzène, elle-même professeur de piano réputée, décident toutefois de fuir leur pays et de se réfugier en Suisse.
C'est ainsi qu'en 1943, en pleine guerre, ils s'établissent à Genève. Le début ne fut pas facile du tout, mais - grâce à son immense charisme et son talent - Dinu Lipatti est rapidement accepté par le monde musical genevois. Déjà en avril de l'année suivante il commença d'enseigner au Conservatoire.
Jusqu'à la fin, dans sa lutte contre la leucémie, Dinu Lipatti a conservé une volonté, une énergie incroyable. À son décès, il résidait dans la villa Bianchi à Chêne-Bourg, hélas détruite quelques années plus tard. Sa mémoire y reste cependant, évoquée par un buste, oeuvre du sculpteur roumain Vasile Rus Batin, de Cluj-Napoca.
Dinu Lipatti repose dans le cimetière de Chêne-Bourg, aux côtés de sa mère Anna, et de son épouse Madeleine. Un parc à Chêne-Bourg porte son nom.
Écouter ce ficher audio (https://www.notrehistoire.ch/medias/115341) pour un court - mais splendide - hommage qui lui fut rendu sur les ondes de Sottens au lendemain de son décès, par Ernest Ansermet, Igor Markevitch, Henri Gagnebin, Aloys Mooser et Béla Siki.
Le portrait illustrant ce descriptif est un extrait d'un instantané pris lors de son dernier récital au Festival de Besançon, 16 septembre 1950, provenant des archives de la Bibliothèque Nationale de France.
Cet instantané est extraordinaire: Dinu Lipatti était épuisé par sa maladie, mais dès qu'il s'est mis à jouer, son énergie incroyable est revenue, ce que l'on voit très bien sur cette photo.
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