Souvenir du cours d'instruction religieuse Noël 1907

Souvenir du cours d'instruction religieuse Noël 1907

décembre, 1907
Edouard Jungmann Neuchâtel
archives de Pierre Auguste et Suzanne Chappuis-Jaques

Dans les archives conservées de Suzanne et Pierre Auguste Chappuis, cette photographie marquant la fin du cours d'Instruction religieuse à Neuchâtel, pour ces jeunes filles réunies autour du pasteur Daniel Junod.

Cette image est intéressante car elle met en lumière les liens sociaux assez puissants qui se sont tissés au sein de la communauté protestante dissidente.

Les noms et prénoms des participantes de trouvent au verso du carton photographique.

Se trouvent ici réunies deux jeunes filles provenant de milieux libristes. Au 1er rang inférieur , 4ème depuis la D, Suzanne Jaques-Chollet née en 1892, habitant Neuchâtel, issue, par sa mère Valentine Chollet, d'une famille bourgeoise et aisée, libriste de Moudon, et dont le père, Louis Jaques, a consacré une grande partie de sa vie à un travail missionnaire au Sénégal avec la Mission protestante de Paris .

L'autre jeune fille, au 3ème rang depuis le bas et 5ème depuis la G, Rose Dupasquier-Schweissgut née en 1891, habitant à Concise, vient également d'une milieu aisé, bourgeois et commerçant. Son grand-père, James Auguste Dupasquier 1794-1869 fut pasteur protestant à Môtiers, puis à Neuchâtel, premier président de 1849-1865 du synode de l'Eglise reformée instaurée par le régime républicain et président Société neuchâteloise des Missions. Il s'engagea en faveur d'un église neuchâteloise indépendante qui ne vit le jour qu'en 1873, après sa mort,

Comment l'église indépendante neuchâteloise est n-elle née ? En 1873, la loi ecclésiastique élaborée par le conseiller d’Etat Numa Droz , vise à « libéraliser » l’Eglise, tout en la maintenant sous le contrôle de l’Etat. Ce texte provoque la scission de l’Eglise réformée. De vives discussions surgissent entre les pasteurs qui défendent l’idéal d’une Eglise séparée de l’Etat et les partisans d’une Eglise considérée comme un service public, ouvert à tous. Alors que le principe de la révision de la Constitution, prévoyant une séparation de l’Eglise et de l’Etat, est rejeté en votation populaire la même année, le Grand Conseil décrète la mise en vigueur de la loi ecclésiastique. Comme ce fut le cas pour les pasteurs vaudois en 1845, une partie des pasteurs, face à cette décision de l'Etat, quittèrent l'Eglise nationale et formèrent une Eglise indépendante avec, rapidement création d'une faculté de théologie indépendante. C'est dans cette faculté que Daniel Junod s'inscrira en 1885 et deviendra pasteur.

Dans le contexte de la fracture religieuse en Suisse romande au XIXe siècle, leurs familles respectives avaient opté pour une Eglise libre, indépendante de l'Etat, elle avaient donc la même sensibilité et c'est tout naturellement qu'elles choisirent, pour l'instruction religieuse de leurs filles, le pasteur Daniel Junod de l'Eglise Indépendante de Neuchâtel.

Dans son livre "La fracture religieuse vaudoise 1847-1966" Jean Pierre Bastian se penche longuement sur les rapports sociaux qui se sont établis au sein l'Eglise libre.

La petite Eglise libre vaudoise se trouva ainsi imbriquée dès le départ et tout au long de son déploiement dans des réseaux multiples.Un même univers religieux et bourgeois d'interconnaissance à forte connotation huguenote renforçait les relations d'affaires. Les familles puissantes et fortunées qui la composaient en partie participaient des relations économiques édifiées sur la confiance dont le fondement était religieux, défini par une commune appartenance confessionnelle autant que par des alliances matrimoniales soigneusement sélectionnées .

Cette description s'adapte très bien à notre commentaire. Je ne sais les liens que pouvaient partager Suzanne et Rose du temps de leur adolescence, et je n'ai pas connaissance qu'elles aient gardé des contacts par le suite. Mais l'appartenance à la même communauté sociale et religieuse de leur famille se manifeste fort bien sous la forme d'une endogamie sociale.

Suzanne a épousé Pierre Auguste Chappuis, dont le grand-père Jean Louis avait été pasteur dissident en 1845 et qui a côtoyé durant sa vie professionnelle de régisseur un nombre important et majoritaire de familles libristes, en général fortunées et possédant de belles propriétés.

Rose Dupasquier a épousé René Burnand qui par son ascendance paternelle appartenait à la fois à une classe bourgeoise et possédante, avec des convictions religieuses dissidentes bien marquées, en particulier chez son père, Eugène et son frère Franz, mon grand-père

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Philippe Chappuis
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1 juillet 2024
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