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Aux sources du Moyen-Âge en Suisse (350 à l'an 1000)

6 février 2020

Ce vendredi 7 février commence une exposition importante "Aux sources du Moyen àge", après avoir été installé au Musée d'histoire de Sion (au Pénitencier), elle s'installe pour presque cinq mois au Musée cantonal d'archéologie et d'histoire de Lausanne. La Suisse romande au Haut Moyen-Âge, ce n'est pas seulement l'objet de cette exposition, c'est aussi le thème du livre dirigé par Lucie Steiner et avec la collaboration de notre partenaire de Passé Simple Justin Favrod. Une publication qui raconte avec force documents (des plans, des cartes, des photos d'objes retrouvés lors de fouilles archéologiques, des gravures et autres illustrations...) les bouleversements de ces six siècles dans le domaine religieux, dans la façon de vivre et de se réorganiser socialement. En effet, on assiste à la transformation d'un empire romain qui s'est essoufflé avec une série d'arrivées de peuples germaniques dans notre région romande. Cette fin de l'empire romain correspond, jusqu'à la fin de l'an 1000, à une christinisation importante.

Flashback, on est au 5e siecle, au début du Haut Moyen-Âge, la région autour de Genève-Lausanne-Avenches-Agaune-Sion se christianise par volonté impériale. En 407, les peuples germains mettent en place leur organisation sur un modèle romain. Parmi ces peuples, il y a les Vandales, les Suèves ou les Burgondes qui assoient leur autorité en s'adaptant au latin, ce sont les prémisses de notre société helvétique multilingues français et allemand. Entre les 5 et 10e siecle, le siège des pouvoirs migre des campagnes à la ville. De nouvelles villes sont créées, notamment dans la région de Colombier-Neuchâtel avec une bascule du pouvoir de l'une à l'autre de ces deux cités. Dans la deuxième partie de cette période, des heurts se produiront un peu plus à l'ouest et au sud de la cité du bord du lac et de la Tène. La plaine de l'Orbe sera en effet le théâtre d'un épisode guerrier qui aura de grandes répercussions sur le bassin lémanique. "Hucbert, duc du pays d’Outre-Jura et abbé civil d'Agaune, se révolte contre son roi et beau-frère Lothaire II. Il est battu et tué devant Orbe en 864" lit-on dans le livre. L'aristocrate Conrad lui succédera et il donnera le pouvoir à son fils Rodolphe Ier, proclamé roi de la Transjurane à Agaune en 888. Autre "révolution", en toute fin de Haut Moyen-Âge, en 999, le pouvoir en Valais va changer de forme. Cette année-là, on assiste à la fin d'une politique locale régulée par l'Evêque de Sion, il recevra le pouvoir comtal sur le haut de son diocèse alors que le bas deviendra le comté du Chablais dépendant d'Agaune... (pages 36 et 37).

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Dans le livre, riches sont les descriptions des habitats, des lieux de culte, des reliques, des façons de faire évoluer ces mêmes lieux avec des sépultures autour, l'emplacement des cimetières, la multiplication des baptistères au fur et à mesure de la croissance de la christianisation... Les maisons au 5e siecle sont construites avec des techniques de l’antiquité pour privilégier des matériaux périssables comme le torchis pour les toits, ce qui se transforme en dépôts de terre noire, identifiables ensuite par les archéologues lors des fouilles. Lors des premiers siècles du Moyen-Âge, les habitations sortent de terres près des villas romaines. Il y a des éléments archéologiques très intéressants découverts dans des fouilles de de Gamsen et d'Oberstalden en Haut-Valais. Ils permettent de déterminer qu'à partir du 5e siècle, l'ancien tissu villageois cède la place à un habitat dispersé composé de plusieurs groupes de bâtiments (habitations, greniers, étables, abris, forge)... des habitations, parfois semi-enterrles sont édifiées en maçonnerie sèche, les bâtiments utilitaires étant construits en matériaux légers, el plus souvent en bois, mais également en torchis..."

On trouve des détails très intéressants sur le Haut Moyen-Âge dans les objets religieux ou vestimentaires. Dans les boucles de ceinture, les objets de trésors d'église (des enveloppes de reliques proches-orientales, le reliquaire dit de Teudéric...), on trouve trace des talents esthétiques des créateurs comme de la force du symbole spirituel. Cette période de l'humanité fascine car il est mal connu. L'objectif de l'exposition qui s'ouvre ce vendredi est de justement mettre la focale sur cette période qui a vu naître un grand Roi connu de tous: Charlemagne. Le Roi des Francs qui régnera sur son territoire (après la mort de son père Pépin le Bref de 768 à 814, devenant dès le 5 juin 774 le Roi des Lombards et Empereur d'Occident le 25 décembre 800) a peut-être un peu trop fait de l'ombre aux autres histoires passionnantes de cette éporque post-romaine. L'exposition lausannoise et le livre paru chez Infolio proposent justement aux visiteurs et aux lecteurs un panorama sur les coutumes, l'art et l'artisanat ainsi que sur le vivre-ensemble dans cette période autrefois décrite comme obscure. Une riche exposition sédunoise puis lausannoise, un magnifique livre, le Haut Moyen-Âge n'a peut-être jamais aussi bien traité qu'en cette nouvelle année et cette nouvelle décennie.

Par David Glaser, web éditeur et responsable de notreHistoire.ch

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