Maurice André Kaspar : à la découverte d'un artiste Suisse
Maurice André Kaspar : à la découverte d'un artiste Suisse
Maurice André Kaspar était un aquarelliste prolifique et talentueux de Suisse, né le 11 juillet 1892 à Genève, Grand-Rue 16. Un peintre malheureusement peu connu. Son petit-fils René Bernard Dee, né à Bâle et résident de la ville de Brighton au Royaume-Uni, organise début août à Londres une exposition regroupant une sélection d’œuvres de l'artiste genevois (tous les détails à la fin de ce texte) en attendant d'autres événements en Suisse. René Dee a écrit une histoire de son aïeul.
Les parents de Maurice Kaspar se nommaient Otto Kaspar (Leutwil, Argovie, Suisse) et Julie Fanny Morin (Vich, Vaud, Suisse). Otto était un botaniste qualifié ainsi que pharmacien. Il avait sa propre boutique Grand-Rue 17 à Genève. Il a été élu comme premier president de la Société des pharmacies du canton de Genève entre 1900 et 1905. Otto Kaspar s’est marié deux fois et sa seconde épouse Julie Fanny Morin était une descendante d’une famille de pharmaciens déjà bien installée. Une pharmacie Morin a existé dans la Grand-Rue plusieurs années auparavant, cependant à un autre emplacement.
Sa cousine Constance gérait la pharmacie principale. Un des artistes suisses les plus connus au XIXe siècle Ferdinand Hodler vivait dans une demeure de Grand-Rue 33 entre 1881 et 1902, pas loin du domicile d’Otto Kaspar et de sa pharmacie. Il connaissait la future mère de Maurice Julie Fanny Morin avant qu’elle se marie avec Otto quand elle accepta de poser pour la version estivale de l’œuvre Le meunier, son fils et l'âne (1881-1888). Maurice fut influence par cette oeuvre et l’un de ses premiers tableaux a été effectué dans un système similaire à celui d’Hodler.
Education & carrière
Il a étudié au Collège de Genève (Collège Calvin) entre 1899 et 1909, puis à la Zurich Poly comme étudiant en architecture entre 1910 et 1913. Il obtint un diplôme d’architecte le 22 juillet 1915. En 1913, il devint un apprenti-architecte au bureau d’architecture Georges Peloux, boulevard Georges Favon, à Genève, entre août 1916 et avril 1917, il travailla pour E.C. & Alexandre Grammont à Lyon, en France. Le 11 mai 1917, il a été nommé technicien, attaché au service de santé de la Confédération Suisse ainsi qu’au Conseil municipal de Genève. Puis de mai 1918 à décembre 1946, il a œuvré en tant qu’architecte « santé et sécurité » pour le département des travaux publics de la Confédération et du Conseil municipal de Genève pour la République et le Canton de Genève.
Son travail consistait à rendre compte de l'état de solidité et de salubrité des bâtiments de la ville de Genève. Beaucoup d'entre eux, construits sur le Quai du Seujet, à Saint-Gervais et dans certaines parties de la vieille ville ont été jugés impropres à l'habitation. Les risques d'incendies potentiels et les conditions de vie étaient inacceptables. La décision, prise par la Municipalité de Genève de démolir ces grands quartiers historiques de Genève a été controversée et beaucoup, dont Maurice Kaspar se sont opposées à ces décisions.
Un groupe de soixante-trois architectes et ingénieurs se sont opposés à au projet de destruction et de reconstruction du quartier du quai du Seujet en signant une pétition qui fut rejetée par le Conseil municipal de la Ville de Genève le 17 décembre 1932. L'intérêt de Maurice Kaspar pour l'architecture et pour la beauté de la région, et l'histoire qui l'accompagne, l'ont poussé à peindre autant de différents emplacements que possible avant leur démolition. Il a fait de même avec de nombreux autres bâtiments «patrimoniaux» dans le canton de Genève et ailleurs en Suisse. Ses peintures sont donc un témoignage important de son passé, représenté spécifiquement à travers les aquarelles.
Styles artistiques
Maurice Kaspar était fasciné, par la forme et la beauté de bâtiments entiers ainsi que par de nombreuses autres structures qui possédaient des caractéristiques architecturales affirmées et intéressantes tels que les ponts, les roues hydrauliques, les escaliers, les portes et les passerelles, les arcades, les toits, les cheminées, les fontaines... La plupart des aquarellistes de l'époque se concentraient principalement sur des vues pastorales. Kaspar se distingue par son intérêt spécifique pour l'architecture. Il a voyagé en Italie à plusieurs reprises en 1914 en tant qu'étudiant en architecture. Ainsi qu'à Capri en 1921 et à travers la France bien plus tard. Maurice a également représenté les historiques Barques de Savoie (il n'en existe plus que deux) qui servaient au transport de la pierre extraite de Meillerie, un petit village du côté français du lac Léman. La pierre a été utilisée pour construire le tout premier bâtiment de la Société des Nations, aujourd'hui nommé le Palais des Nations. Une grande partie du bord du lac genevois a été construite en pierre de Meillerie.
Mariage & enfants
Maurice épousa Adèle Susanne Henriette (Georgette) Degallier le 19 janvier 1917 au Temple de Versoix, dans le canton de Genève. Adèle était la fille de Georges-Louis Degallier et de Marie Deshusses. (Georges-Louis a été deux fois maire de Versoix et propriétaire de la fabrique de confiserie de renommée mondiale à Versoix, les "Bonbons Deshus"). Ils ont eu trois enfants, deux filles, Edmée et Simone et un garçon, René. Ils vécurent à Pinchat, Carouge.
Réalisations artistiques & reconnaissance
Dans les années 30, un certain nombre de ses peintures ont été transformées en estampes, cartes postales et puzzles puis vendues dans le commerce en France, en particulier à Saint-Tropez et dans les villages de Haute Savoie. Ses peintures ont également été publiées plus tard dans un livre sur la Suisse et ses villages présentant également le travail d'autres artistes.
En 1936, Maurice Kaspar était membre fondateur de la "Palette Carougeoise", un petit groupe de treize artistes pluridisciplinaires de Carouge. Parmi, ces artistes figurent Pedro Meylan qui a esquissé le portrait de Maurice montré ci-dessous. La Palette s'est réunie pour promouvoir ses activités et faire connaître leurs différentes formes d'art dans une ville qui avait déjà une réputation artistique distinctive, en partie en raison de son architecture italienne et de son environnement bohème. 84 ans plus tard, la Palette Carougeoise est un groupe beaucoup plus important et très actif.
En 1939, Maurice André Kaspar est chargé de peindre le décor de la salle communale de Plainpalais à Genève à l'occasion du 50e anniversaire de la societé Gymnasia, le 4 février 1939.
Dans les années 40, Maurice fut chargé par un éminent résident de Carouge, Emile Belloni (1882-1953) de peindre 33 scènes définitives de la ville de Carouge où vivaient Maurice et sa famille. Ces tableaux ont ensuite été offerts au musée de Carouge en 2004 par Jean et Pierre Belloni. Le Musée les expose, à la fois en public et en privé, depuis 16 ans. Leur dictionnaire complet des artistes de Carouge (issus de toutes disciplines) comprend Maurice Kaspar avec une liste complète de son oeuvre et l'une de ses 33 peintures.
La connexion Deshusses-Degallier
La Villa "La Brulay" fut la demeure de la famille Degallier de 1874 à 1929. Initialement acheté par Jean-François Deshusses, fondateur des "Bonbons Deshusses" de renommée mondiale en 1852. Il remit son entreprise à sa fille, Marie Deshusses et à son mari Georges-Louis Dégallier le 6 juin 1874. Marie et Georges-Louis et leur famille de neuf enfants y ont grandi, dont la future épouse de Maurice Kaspar, Adèle Susanne Henriette Degallier. Louis a servi deux fois comme maire de Versoix et a hérité de ce qui est plus tard devenu "Bonbons Deshus" qui était le plus grand employeur de Versoix. Louis avait fait ses études en tant que pharmacien et utilisa ses connaissances en chimie à son avantage lorsqu'il rejoignit son beau-père dans l'entreprise de confiserie. Il fut élu bourgeois de Prilly, dans le canton de Vaud, en 1866. Il fut également député du Grand Conseil de Genève entre 1892 et 1895; un membre élu du Consistoire de Genève (le Conseil de l'Église protestante) à partir du 6 octobre 1896 et un membre actif du Parti radical.
Le père de Maurice Kaspar était également un membre actif du Parti radical et président de la Société genevoise des pharmaciens, le lien entre les familles Kaspar et Degallier a donc été établi de cette manière. La route à côté de la maison a été nommée Chemin Louis-Dégallier en son honneur. Un tombeau et un buste distinctifs pour Jean-François Deshusses occupent une place de choix dans le cimetière de Versoix, payés par la ville en reconnaissance du rôle qu'il a joué dans le développement de Versoix. La ville avait été dotée d'un nouveau port, de nouvelles conduites d'eau propre, de routes et de lignes de tramway à destination et en provenance de Genève.
Mort et hommages
Une nécrologie a été publiée dans le Journal de Genève, le 12 décembre 1946, pour Maurice André Kaspar, "architecte-paysagiste" qui s'est suicidé à l'âge de 54 ans le 3 décembre en se noyant dans l'Arve qui longe Carouge. Il a déclaré que «selon le désir du défunt, la famille ne pleurera pas et les honneurs ne seront pas payés». Sa propre peinture de l'Arve qui passe sous le pont de Carouge est en ce sens poignante.
Une nouvelle génération - une nouvelle inspiration artistique
En 2018, René-Bernard Dee a emmené le seul arrière-petit-fils de Maurice André Kaspar portant le nom de famille Kaspar, Alexandre Kaspar, pour visiter la maison Pinchat-Carouge de Maurice et de sa famille. Maurice et sa femme, Georgette, y ont élevé leurs trois enfants, Edmée, Simone et René et c'est aussi là que, en décembre 1946, ses cendres ont été répandues sous le cèdre, par eux, dans le jardin situé à l'arrière de la maison. Alexandre est lui-même un artiste inspiré par son arrière-grand-père.
Exposition
-Une première exposition publique de "The Life & Works of Maurice André Kaspar (1892-1946) - A Swiss Artist Revealed" se tiendra à la Royal Watercolour Society's Bankside Gallery à Londres en Angleterre, du 3 au 8 août 2021.
-Voir le catalogue numérique sur ce lien. Merci à René-Bernard Dee pour le texte ci-dessus et les photos d'illustration représentant les œuvres de son grand-père et des documents de l'histoire de sa famille.
-Pour en savoir plus sur l'exposition londonienne de Maurice Kaspar en août, un article lui a été consacré dans la publication municipale de Carouge.
Photo de couverture : un portrait au crayon de Maurice Kaspar par Pedro Meylan en 1944 (Pedro était un artiste renommé notamment pour ses sculptures)
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