J.M. LECLAIR, Concerto pour hautbois en ut majeur, Heinz HOLLIGER, OCR (EIR), Alain MILHAUD, 1960
J.M. LECLAIR, Concerto pour hautbois en ut majeur, Heinz HOLLIGER, OCR (EIR), Alain MILHAUD, 1960
Jean-Marie Leclair fut l'un des plus grands violonistes et compositeurs français du 18e siècle, l'un des archétypes du virtuose-compositeur, dont l'oeuvre reflète en grande partie l'activité d'interprète.
"[...] Né à Lyon le 10 mai 1697, fils aîné d'un passementier, c'est le métier paternel qui aurait dû être le sien; mais il apprit la danse en même temps que la passementerie et en 1722, il était premier danseur et maître de ballet à l'Opéra de Turin. Deux ans plus tard, il partit pour Paris, où il publia un premier livre de sonates. De retour à Turin, il prit des leçons de violon avec l'illustre Somis et, en peu de temps, devint un virtuose de grande renommée. En 1732, nous le retrouvons à Paris comme «Ordinaire de la Musique de la Chapelle et de la Chambre du Roy». Plusieurs longs séjours à l'étranger agrandissent encore sa réputation; il revient définitivement à Paris en 1743, musicien célèbre et fortuné. Sur la fin de sa vie, devenu hypocondriaque, il alla vivre seul hors des portes de la ville, dans une banlieue mal fréquentée; c'est là qu'on le trouva le 23 octobre 1764, assassiné [...]".
Jean-Marie Leclair est resté connu avant tout pour ses sonates de violon. Il a toutefois composé beaucoup d'autres oeuvres, qui sont moins connues. Son concerto pour hautbois (ou flûte) est resté l'une des perles du répertoire de cet instrument. Il apparaît dans une collection imprimée vers 1730 - son opus 7 - portant le titre «Six Concerti a tre Violini, Alto e Basso per Organo c Violonce/lo op. VII». Pour le troisième concerto de cet opus 7, la partition indique que les solos peuvent se jouer «sur la Flûte Allemande ou le Hautbois». Il y a plusieurs raisons à ça: d'une part le hautbois était un instrument toujours présent dans l'orchestre baroque, d'autre part Leclair était ami avec Michel Blavet, le plus grand flûtiste du XVIIIe siècle - et qui a aussi développé avec beaucoup de virtuosité le côté italien de la flûte traversière. Il se produisit souvent avec Leclair d'ailleurs, plus souvent que n'importe quel autre instrumentiste de son temps.
Une courte description:
"[...] Le premier mouvement est un Allegro énergique et caractéristique de la manière italienne; le Finale un Allegro assai brillant et dansant qui met particulièrement en relief la vivacité de l'instrument soliste. Entre ces deux mouvements rapides se place un Adagio en la mineur, avec des tutti pathétiques en rythme pointé et des soli d'une plénitude d'expression mélodique extraordinaire, ornés de tous les éléments décoratifs propres au style baroque.
L'oeuvre est d'une sûreté de style étonnante; la hardiesse des harmonies, la richesse d'invention situent ce concerto bien au delà de la plupart des oeuvres similaires du 18e siècle [...]".
Les deux citations ci-dessus proviennent du texte publié au verso de la pochette du disque SMS 2305.
Sur ce disque Musical Masterpiece Society / Guilde Internationale du Disque SMS-2305 les concertos pour hautbois de Jean-Sébastien Bach et Jean-Marie Leclair sont interprétés par le jeune Heinz HOLLIGER, qui venait d'obtenir un premier prix au Concours International d'Exécution Musicale de Genève 1959:
"[...] AU CONCOURS INTERNATIONAL D'EXÉCUTION MUSICALE
La première séance avec orchestre
M. Peter Fuchs, de Zurich, premier hautboïste à entrer en lice, possède une sonorité moelleuse et joue avec finesse en phrasant posément. Quelques bavures techniques ici et là. Son camarade français, Jacques Vaudeville, témoigne d'un jeu un peu plus facile et ses exécutions, sans avoir peut-être le même charme, sont d'un dessin légèrement plus net. Mais sitôt qu'apparaît M. Heinz Holliger (de Langenthal), on ne songe plus à détailler le jeu de l'exécutant, car on se trouve en présence de l'artiste véritable qui dépasse dès lors son instrument. [...]" Franz WALTER dans le Journal de Genève du 1er octobre 1959, en page 9.
Le lundi suivant, Franz WALTER écrivait dans le Journal de Genève du 5 octobre 1959, en page 9:
"[...]Conclusion du Concours international d'exécution musicale
Samedi soir, le traditionnel concert final des lauréats a marqué la fin du présent concours international. Quatre premiers prix ont finalement enrichi la moisson de cette année, dont deux réservés au seul hautbois et un concentré sur un duo piano-violoncelle, alors que dans la discipline du piano, un vainqueur très brillant, M. Jean-Paul Sévilla a réussi à attacher un certain éclat à son premier prix. Son interprétation renouvelée du concerto en mi bémol de Liszt devait confirmer d'ailleurs tout le bien que l'on peut penser de ce jeunes artiste et de son talent singulièrement équilibré, déjà très mûri et d'une parfaite santé spirituelle. Mais le moment le plus rare de la soirée nous le devons tout de même, je crois, au mouvement lent du concerto de Marcello interprété par le hauboïste Heinz Holliger dont la sonorité a un cachet si personnel et émouvant et le phrasé une délicatesse et une flexibilité miraculeuses. Ce qui n'enlève rien d'ailleurs des mérites très évidents de son camarade français Jacques Vandeville au talent probe et fin. [...]"
Les extraits du Journal de Genève cités ci-dessus sont rendus accessibles grâce à la splendide banque de données de letempsarchives.ch, qui est en accès libre sur la toile, une générosité à souligner!
Heinz HOLLIGER, peut-être à l'époque du Concours de Genève 1959: je n'ai pu trouver aucunes informations sur cette photo - si une personne visitant cette page devait en savoir plus, toutes informations m'intéressent -> commentaire ou couriel!
Sur ce disque de la «Musical Masterpiece Society» / «Guilde Internationale du Disque», Heinz Holliger est accompagné par un orchestre nommé «Orchestre de chambre romand», le tout étant placé sous la direction du chef d'orchestre genevois Alain MILHAUD
Cet «Orchestre de chambre romand»... Il doit s'agir en fait de l'éphémère «Ensemble Instrumental Romand», qui fut fondé en 1959-1960 par Alain Milhaud. Dans la Gazette de Lausanne du 16 avril 1960 en page 5 on peut en effet lire:
"[...] Fondé par Alain Milhaud il y a quelque mois, l'Ensemble Instrumental Romand poursuit des buts on ne peut plus louables: décentraliser la musique hors des grandes villes de notre pays, en donnant des concerts de valeur dans des cités passablement prétéritées, musicalement parlant, et fournir des occasions de travailler aux jeunes musiciens qui, au sortir du Conservatoire, manquent généralement de débouchés pratiques.
Nous avons entendu l'Ensemble Instrumental Romand à Vevey, au cours de la tournée qu'il effectue actuellement. Le programme était composé d'oeuvres de Corelli, J.-S. Bach, Sandor Veress, Cimarosa et Mozart. D'emblée nous avons été frappé par le sympathique état d'esprit qui anime les jeunes musiciens de cet ensemble. Doué d'un véritable tempérament de chef, aux gestes sobres et précis, Alain Milhaud a su leur insuffler son enthousiasme et son dynamisme. Aussi ses exécutions, vivantes et colorées ontelles conquis le public veveysan qui réserva aux jeunes interprètes un accueil véritablement triomphal.
[...] Un des atouts importants de l'Ensemble Instrumental Romand est évidemment la participation que lui accorde Heinz Holliger, hautbois, premier prix du dernier Concours international de Genève. Ce merveilleux instrumentiste, doué d'une exceptionnelle sensibilité, était l'interprète du Concerto pour hautbois et orchestre en fa majeur de J. S. Bach. On peut regretter que, par instants, le soliste, capable des nuances les plus délicates, ait été couvert par les cordes qui, en fonction du soliste, paraissaient un peu épaisses. Nous retrouvions Heinz Holliger dans deux mouvements du Concerto en do majeur de J.-M. Leclair, accordés en bis à la fin du concert. [...]" cité de la Gazette de Lausanne du 16 avril en page 5.
Même chef, même soliste, mêmes oeuvres: ce disque SMS-2305 ne peut avoir été enregistré qu'à cette occasion, et doit être l'un des premiers disques de Heinz Holliger.
À noter qu'il existe aujourd'hui un orchestre portant le nom d'«Ensemble Instrumental Romand», mais qui fut fondé bien plus tard - en 1995 - par Eric Bauer, et qui n'a certainement aucune liaison avec celui de ce disque, autre que le nom.
L' enregistrement que vous écoutez...
Jean-Marie Leclair, Concerto en ut majeur pour instrument à vent, 3e concerto de l'opus 7, Heinz Holliger, hautbois, Orchestre de chambre romand (Ensemble Instrumental Romand), Alain Milhaud, SMS-2305
1. Allegro 05:35 (-> 05:35)
2. Adagio 06:05 (-> 11:40)
3. Allegro assai 03:57 (-> 15:37)
Provenance: Musical Masterpiece Society / Guilde Internationale du Disque SMS-2305
"Dis voir", l'appli
Les Romands batoillent, mais de Sierre à Saignelégier leur accent varie. Le chercheur Mathieu Avanzi lance une application mobile pour étudier la diversité du parler romand. Le projet « Dis voir » invite les utilisateurs à enregistrer leur voix sur leur smartphone, à deviner des mots typiquement romands, et à tester leurs connaissances des accents régionaux.