Les aventures de Midzi
« Midzi »
C'était un samedi après-midi de septembre 1934. La Fête des Costumes à Montreux battait son plein et pendant le cortège, dans un groupe valaisan, l'on pouvait voir une jeune fille assise sur un mulet et ayant sur ses genoux un beau chat gris cendré ; de chaque côté du mulet pendait un panier dans lequel se trouvait un enfant.
Or, le deuxième jour du cortège, je remarquai que le chat n'y était plus. Je m'informai auprès de la jeune fille qui m'apprit, très chagrinée, que « Midzi » (c'était son nom) s'était échappé, probablement ayant eu peur des tambours ! Je promis donc à la jeune fille de l'aviser si jamais je retrouvais son minet !
Quelques temps passèrent ; un jour, une dame vint me demander de lui garder un chat qu'elle avait trouvé errant dans la rue. J'allai le chercher à son domicile et quelle ne fut pas ma surprise de reconnaître le chat du cortège de la Fête des Costumes.
Aussitôt je fis des recherches pour retrouver sa légitime propriétaire ; elles furent longues et laborieuses car un nombre important de groupes valaisans y avaient participé, et j'avais omis de noter l'adresse de la jeune fille.
Service juridique cantonal du Registre foncier Sion, le 30 octobre 1934
Monsieur F., Montreux
Monsieur,
Je vous accuse réception de votre lettre du 27 crt et vous remercie pour son contenu. C'est ma compatriote, Mlle Lucie Theytaz de Vissoie, qui a perdu le chat en question ; il s'est échappé du panier, et nous ne l'avons plus retrouvé. Sa propriétaire sera certainement heureuse de rentrer en sa possession. Je vous remercie pour votre peine, et vous prie d'agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.
R.-M.
N.B. Je communique votre lettre à l'intéressée.
Enfin je découvris que cette personne et mon protégé venaient de Vissoie et après avoir correspondu avec elle, si heureuse d'avoir retrouvé son minet, nous tombons d'accord pour remettre Midzi à la première personne qui se rendrait de ces côtés.
Vissoie, le 1 nov. 1934
Monsieur F., Montreux
Cher Monsieur,
Je me plais à louer votre extrême obligeance, pour avoir bien voulu prendre soin de notre chat, et surtout d'avoir eu la délicatesse de nous en informer.
Nous vous remercions donc de tout cœur et vous prions de bien vouloir nous envoyer le chat par la prochaine poste, contre remboursement des frais de port et d'emballage.
Nous regrettons beaucoup de ne pas être assez riches pour vous donner une récompense. Cependant, s'il vous tenez peut-être à garder ce petit animal, vous pouvez le faire, il va sans dire, sans aucune rétribution pour nous.
En attendant de vos nouvelles, nous vous saluons bien cordialement et vous remercions de même. Lucie. T
Quelques temps passèrent; ne trouvant personne, j'expédiai Midzi dans un beau panier, mais, au grand étonnement de sa petite maîtresse, Midzi ne la reconnu pas ! Il devint même sauvage, et, caché sous un lit, refusait toute nourriture, si bien que je reçus une lettre de Vissoie me demandant de venir reprendre le chat.
Ce fut donc un beau dimanche matin de juillet que j'arrivai sur la place du village. Parmi la foule, une petite et gracieuse jeune fille en costume valaisan vint vers moi et me pria de la suivre, car, dit-elle, « on vous attend chez nous ».
Nous entrâmes dans un ravissant chalet où toute la famille me fut présentée. L'on me fit goûter une fine goutte accompagnée d'un bon plat de viande salée et d'un délicieux fromage du pays, puis l'on me conduisit dans la chambre où se trouvait Midzi. On avait eu soin de l'enfermer dans une cage à lapin, afin qu'il ne put s'échapper à nouveau ! Midzi me reconnut immédiatement et devint tout de suite si familier que tout le monde put le caresser ; Il fit même le beau sans se faire prier. Pendant le dîner, on le mit sur une chaise à côté de moi.
L'après-midi, la famille me conduisit au haut du village pour visiter une ancienne chapelle, remarquable par ses fresques. En longeant un petit talus, nous aperçûmes un nuage d'insectes que l'un de nous reconnut pour être un essaim d'abeilles de M. le curé, et qui était en train de quitter la ruche. Vite on alla avertir M. le curé qui nous demanda de l'aider à transporter de l'eau afin d'arrêter la sortie des abeilles, et après les avoir copieusement arrosées, elles réintégrèrent leurs ruches.
M. le curé, pour nous remercier, nous invita tous à aller boire un verre à la cave : c'était 2 heures de l'après-midi. À 6 heures du soir nous y étions encore, dégustant toutes les fines gouttes du Valais, Fendants, Dôle, vins des glaciers, etc. Ca se termina par un bon verre de Kirch. Je n'en menais pas large, mais un bon souper m'attendait et la famille T. m'avait fait réserver une place dans le car à côté du chauffeur pour que l'air frais du soir me remit un peu d'aplomb…
Je partis donc avec Midzi dans son panier, non sans avoir remercié chaudement ces braves gens du charmant accueil dont j'avais été l'objet.
Arrivé chez moi, Midzi reconnut le logis et manifesta sa joie en me faisant caresses sur caresses.
Aujourd'hui il a 13 ans ; il est devenu une superbe bête, d'un type très spécial avec son museau allongé et ses grandes et belles moustaches, ce qu'il lui donne l'allure d'un tigre. Mais c'est une bonne nature et c'est la bonté même, car lorsque l'on m'apporte un chat malade ou blessé, il le lèche et l'entoure de bons soins tout en ayant l'air de lui dire : « Tu es tombé en de bonnes mains ».
Voilà donc l'histoire de Midzi qui participa au cortège du 1er jour de la Fête des Costumes, en septembre 1934 à Montreux et me procura de chères amitiés valaisannes.
P. Faucherre
Agent de la société protectrice des animaux Montreux-Villeneuve, et membre de la SPA de Vevey depuis 25 ans.
Vissoie, le 15 déc. 1934
Mes chers protecteurs de mon Midzi,
C'est avec un cœur joyeux que je viens vous remercier pour votre bon égard envers mon petit Minet, et surtout je n'oublie pas de vous remercier mille fois pour les photos auxquelles j'ai eu grand plaisir de revoir son portrait. Sans doute la séparation m'a causé dans les premiers temps de tristes pensées. Mais je dois me convaincre qu'il s'est fait des patrons bien meilleurs que moi. Et je vous assure qu'il ne se repentira pas d'avoir vu Montreux. Je suis heureuse de savoir que l'été prochain vous viendrez à Vissoie. Je vous y attends avec grand plaisir. Et mon Midzi, il ne se fera pas prier pour reprendre la route du canton de Vaud. J'aimerais bien être à sa place. En ce beau pays que j'ai tant admiré, car c'était la première fois que j'y allais.
Ainsi je vous quitte, cher Monsieur et Madame, en faisant part de tous mes remerciements pour vos bons soins. Et vous présente mes cordiales salutations et Joyeux Noël.
Un bécot à mon Midzi.
Lucie T.
Vissoie, le 25 nov. 1935
Monsieur et Madame F.,
J'ai reçu votre envoi qui m'a fait grand plaisir, surtout de voir que vous vous occupez encore de l'ancienne patronne de Midzi.
J'ai dû constater d'après les photos que Midzi est vraiment heureux que j'envie presque sa place, vos photos sont très bien faites.
En attendant votre visite à Vissoie, je vous envoie les salutations de toute la famille à vous M. et Mme, à votre bonne maman, à Midzi et à son compagnon, « Roli » à qui je souhaite un prompt rétablissement.
Mes bonnes salutations et remerciements.
Lucie T.
Vissoie, 25 nov. 1937
Monsieur F., Montreux
Monsieur,
Quelle surprise vous nous avez faites en nous envoyons votre aimable lettre, vous avez fait un grand plaisir à toute la famille. Nous pensions souvent à vous, mais nous ne savions pas ce que vous étiez devenu. Mais maintenant que vous avez donné signe de vie, vous viendrez nous rendre visite. Si vous venez pendant l'hiver, nous ferons une bonne partie de ski dans les mayens de la vallée.
Mais ce sera préférable au printemps quand les abeilles de M. le curé sortent de leur ruche. On aurait encore l'occasion de rendre visite à sa cave …
Monsieur, je vous prie de bien vouloir envoyer une carte le jour de votre arrivée à Vissoie pour que nous ne soyons pas absents du village.
Recevez, Monsieur, les salutations de toute la famille, et merci.
Lucie T.
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