Le Père Girard

Le Père Girard

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Marcel Morel

Le Père Girard est sans contredit, après Pestalozzi, le pédagogue le plus éminent qu'ait produit la Suisse moderne.

Jean Girard (il prit le nom de Grégoire en entrant en religion) était né à Fribourg le 17 décembre 1765. Des souvenirs de son enfance, qu'il a pris soin de nous conserver lui-même en un style piquant et original, nous ne citerons que deux traits saillants et décisifs. C'est d'abord l'anecdote de la femme du Vully, petite contrée montagneuse qui se mire dans les flots bleus du lac de Moral. Cette bonne paysanne était la fournisseuse de légumes de la maison Girard, et ne manquait jamais de mettre en réserve dans sa corbeille quelque bon fruit ou quelque raisin choisi pour le petit Jean, qu'elle avait pris en affection et qui la payait de retour. La bonne femme était protestante. Un jour, comme le précepteur des enfants Girard leur expliquait le passage du catéchisme qui dit que « hors de l'Eglise catholique, apostolique et romaine il n'y a point de salut », le petit Jean demanda si la bonne femme du Vully serait aussi damnée? Sur la réponse affirmative du précepteur, Jean se mit à fondre en larmes. Mais la mère de l'enfant, femme aussi sensée que spirituelle, était accourue à ses cris et le rassura en ces termes : « Jean, ne pleure pas, ton précepteur est un âne, Dieu ne damne pas les bonnes gens ». L'oracle avait parlé, Jean Girard se le tint pour dit ; il appelait plus tard cette façon de penser la théologie de ma mère. Il resta fidèle jusqu'au dernier soupir à cette théologie. Mais cette fidélité même devait lui coûter cher et fut la cause d'une partie des malheurs de sa vie.

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Marcel Morel
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27 janvier 2012
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