La vache d'Hérens
Race d'Hérens
Elle occupe le centre du Valais, de Martigny à Sierre, y compris les hautes vallées latérales. La vache valaisanne est bien conformée et d'une extraordinaire vivacité. Cette race de petite taille (elle mesure de 115 à 120 au garrot), est caractérisée par une tête courte au large front, avec de petites cornes solides et des yeux vifs; est portée sur des épaules musculeuses et un poitrail très développé. La partie antérieure du corps est d'une structure saine et vigoureuse; les jambes très fines, ont des muscles d'acier.
Tout l'animal est constitué en vue de son mode d'existence, c'est-à-dire pour brouter sur des pentes raides et supporter les intempéries d'un climat âpre et capricieux. C'est la vraie race montagnarde, solide, sobre et d'un rapport excellent. La couleur de la robe varie à l'infini entre le café au lait et le noir jais. Le poids vif des sujets adultes ne dépasse guère 500 kilogrammes.
Elle a quelque analogie avec la race Dux (Autriche). Ses caractères ethniques sont assez nets pour en faire une race à part. Ce n'est pas, comme on l'a prétendu autrefois, un rameau de la race brune modifiée par des conditions d'habitat; c'est même une race très ancienne.
On a retiré en 1886, de fouilles à Martigny, une tête en bronze provenant probablement du IIe ou IIIe siècle qui a les formes et dimensions de celles de la race actuelle. On a bien pu s'en convaincre à la grande exposition agricole suisse de 1887 à Neuchâtel, où l'on avait placé un moulage de cette antique en regard du groupe des bestiaux d'Hérens.
Dans ces vingt dernières années, ce bétail a fait des progrès sensibles, grâce à une sélection bien menée. Sans atteindre la perfection, le bétail d'Hérens a acquis plus de finesse, plus de régularité dans la conformation, plus d'homogénéité dans le manteau et une aptitude plus marquée pour la production laitière.
Cette race est adaptée au sol sur lequel elle vit; elle rend de grands services dans ce pays avec voies d'accès difficiles, avec alpages rocailleux, à herbe courte et peu abondante, dont les pentes sont parfois si rapides qu'un bétail de petite dimension et au pied agile peut seul trouver une alimentation suffisante.
Les vaches sont assez bonnes laitières et le lait d'excellente qualité. Les animaux sont très rustiques, ont une endurance extraordinaire au travail, non seulement pour le trait, mais aussi pour le bât. Elle est réputée donner une viande très fine.
Quelques vaches connues sous le nom de reines se distinguent par une tête et une encolure assez vigoureuses et par leur humeur batailleuse; ce sont elles qui conduisent le troupeau et y exercent une véritable autorité. Malheur à la vache étrangère qui s'approcherait pour tondre un peu d'herbe réservée, c'est la lutte pour l'existence. Au printemps, à la montée à l'Alpe, les combats de reines sont fort curieux à observer, c'est une grande attraction et toute la population valide y assiste. Le montagnard valaisan est fier de son beau bétail, et la possession d'une "sonnaillière" - la Reine, Reïna - équivaut pour lui à un titre de noblesse ; c'est aussi le profit de tout le troupeau.
Voir : Combat de reines à l'alpage, Conthey, ca 1940 -Médiathèque Martigny Valais
Au commencement de juillet, quand les vaches partent pour l'alpage, on les fait sonnailler à tour de rôle pour savoir celle qui sera la Reïna. Celle-ci gardera pendant toute la durée de l'alpage la préséance sur le reste du troupeau; c'est à elle et à ses compagnes d'étable que reviendront de droit les herbages les plus succulents. Tout le village assiste à cette compétition et en suit les péripéties avec le plus vif intérêt.
Le premier jour de leur séjour sur l'alpage, les vaches de la race d'Hérens se combattent pour déterminer qui sera la reine de la saison à l'alpage.
Document Charles Henri Zufferey
Textes extraits de :
© Sion et ses environs, d'après Ferdinand Otto Wolf, Zürich, Orell Füssli & Cie., Editeurs, [1890]
© A. Borgeaud, Médecin vétérinaire, Professeur de zootechnie à l'Ecole cantonale d'agriculture de Lausanne. La Vie agricole et rurale, Paris : Baillière, 1916.
Superbe document, merci