Guillaume Katz: "Lausanne-Servette, c'était LE match"
Guillaume Katz: "Lausanne-Servette, c'était LE match"
Tome 2 de notre spécial derby lémanique "Passion d'un derby pas comme les autres" ce vendredi au Stade de Genève à 20 heures. Le Servette FC reçoit le Lausanne Sport pour une première confrontation en trois saisons de championnat de 2e division, la Challenge League. L'ancien joueur du LS Guillaume Katz a accepté de nous livrer quelques impressions sur ses plus beaux "Lémanico" et plus généralement sur son lien au LS.
Lausanne Sport, c'est une sacrée saga. Commençons par le palmarès et les quelques chiffres qui situent l'envergure du club de la Pontaise: 17 finales de Coupe de Suisse, 116 ans d'existence depuis la création du FC Montriond en 1902. Le club qui a eu mille vies, dont une faillite en 2003, s'est appelé surtout Lausanne Sport, ou le LS si vous êtes un ami intime qui avez souffert avec le naufrage de la structure à l'époque de la gouvernance du Polonais Waldemar Kita. Aujourd'hui leader provisoire de la Challenge League (au 29 août 2018), le LS a changé complètement d'ère et peut voir l'avenir plus sereinement. Lausanne espère la remontée en Super League, la seule qui y du sens pour son existence.
Du Lausanne Football & Cricket Club au LS
L'ex-FC Montriond a démarré son histoire au plus haut niveau suisse en 1902. Il avait en réalité existé sous une autre forme, plus amateur, en 1896 sous le nom de Montriond Football Club. Ce n'est pas pour autant le plus ancien club de la capitale romande. Les historiens du foot situent justement à Lausanne la création du tout premier club européen non-britannique, sous le nom du Lausanne Football and Cricket Club, un club fondé par des étudiants anglais installés dans la ville du bord du Lac Léman. Montriond jouera au premier championnat suisse pour la saison 1897/98, de quoi lancer l'équipe vers un futur plus ambitieux, mieux structurer et de construire les fondations du FC Montriond en 1902, date de la création de l'ASF, l'association suisse de football. C'est en 1920 que Montriond devient le Lausanne Sport.
Roger Vonlanthen fut un joueur et un entraîneur du LS. Né à Genève, il a aussi chaussé les crampons sur les terrains du club de sa ville à la fin de sa carrière. A la fin des années 70, il a entraîné l'Equipe de Suisse. (Bibliothèque de Genève)
Un moment qui reste gravé dans les mémoires des plus anciens fans du LS, c'est cette finale de Coupe de Suisse en 67 face à Bâle et la grève des joueurs qui a été improvisée suite un penalty sifflé et inscrit contre eux dans les derniers instants du match. Les Lausannois ont protesté contre cette décision arbitrale, assis sur la pelouse. Un jeune joueur nommé Pierre-Albert Chapuisat. Le père de Stéphane Chapuisat, surnommé Gabet, a vécu ce jour-là ses premières minutes de jeu et sa première défaite avec le LS. Le club a perdu cette rencontre par forfait 3-0. Ce qui reste à ce jour un événement unique au monde.
53 ans de disette nationale en Super League
Le dernier des sept titres remonte à 1965. Les deux dernières des 9 victoires en Coupe de Suisse datent de 1998 et 1999. En Europe, le LS a parfois fait des coups d'éclats mémorables. En 1978-1979, l'équipe du LS se fait éliminer de la Coupe de l'UEFA par l'Ajax Amsterdam puis gagne au deuxième tour de cette même Coupe lors de la saison 2000/2001 face au même Ajax, avant de perdre en seizième de finales contre le FC Nantes (on en reparle avec Guillaume Katz ci-après). Le bilan de Lausanne en Coupe de l'UEFA est d'ailleurs positif, 20 matchs joués, 10 gagnés pour 8 perdus et 2 nuls.
Un Lundi de Pâques 2010 de rêve, le FC Lausanne-Sport bat St-Gall chez lui. 2 à 1 dont un but de Guillaume Katz qui sera expulsé en 2e mi-temps (Collection RTS/Reportage Bernard Jonzier)
Un fan du LS devenu joueur embématique
Retraité des terrains pro, recruté par le LS au service marketing sportif du club, Guillaume Katz, défenseur central historique du LS aux 176 matchs de Challenge League, aux 76 matchs de Super League et aux 11 caps européennes, a grandi avec les couleurs bleue et blanche. Alors quand un derby grenat se pointe en ligne de mire aujourd'hui, les émotions resurgissent. Il sera éloigné de la Praille pour cette première confrontation en trois ans dans le cadre d'un championnat pour cause de déménagement mais cela ne le perturbe pas, le "Lausanne", son "Lausanne" a une histoire riche qu'il souhaite valoriser auprès des nouvelles générations.
L'équipe de Suisse de football en 1966 à la Pontaise, avec à gauche Köbi Kuhn et qu centre André Grobéty et Ely Tacchella, le premier a joué au Servette FC avant de passer dix ans au LS, le deuxième neuchâtelois d'origine a joué aussi au LS dans la même période. (Collection Bibliothèque de Genève)
"Servette FC-LS, on devait agender ce match. C'était LE match de la saison à ne pas rater. Et c'est un peu différent aujourd'hui car on les rencontre quatre fois. Autrefois, il n'y avait que deux rencontres." Le derby, une belle affiche dans laquelle les joueurs s'investissent un peu plus que le reste de la saison. "Plus concentré pour viser la victoire, pour aussi faire plaisir aux supporters" décrit Guillaume Katz, conscient de l'enjeu. Pour revenir aux précédents matchs historiques, l'ancien défenseur du LS place les matchs de l'Europa League à un endroit spécial de sa mémoire. Ces matchs, effectués grâce aux exploits de Lausanne en Coupe de Suisse la saison précédente (finale perdue 6-0 au Parc Saint-Jacques de Bâle, mais les Bâlois étaient champions de Suisse. Le finaliste déçu de la finale se retrouvait pour le coup automatiquement qualifié pour une place en phase de qualification pour la Coupe de l'UEFA devenue Europa League.
Enfant du pays, biberonné aux exploits contre l'Ajax
"Je suis d'Echandens, près de Morges, j'ai donc grandi dans la région du Lausanne Sport. J'ai découvert des équipes mythiques comme l'Ajax d'Amserdam ou le FC Nantes qui venaient défier le LS à la Pontaise. Mais c'est vrai qu'en tant que joueur, à chaque derby, il y avait quelque chose de particulier. Un flot de messages de copains par SMS toute la semaine précédant le match. Les journalistes en faisaient aussi beaucoup avant les matchs. Aujourd'hui, ça s'est amplifié avec les réseaux sociaux. Ce sont souvent de très beaux matchs."
Guillaume Katz vivait jusqu'à cette semaine à Zurich. Et tout le monde là-bas lui parlait volontiers des deux équipes mythiques du bord du lac Léman. Une affaire d'adultes. "Les fans de foot alémaniques ont tous suivi les exploits du LS ou de Servette. Mais tout est à refaire avec les jeunes de maintenant" continue l'ex-joueur. Les millenials ne connaissent pas le passé du LS. Attention, le club veut soigner sa légende. Un travail de mémoire doit être fait. "Il y a les titres glanés par Lausanne. Il faut bien le redire aux jeunes, même si l'histoire est derrière nous, il faut redonner sa place au LS dans le sport suisse."
Avenir en bleu, blanc... et rose?
Aujourd'hui, c'est possible, les nouveaux propriétaires arrivent avec des moyens importants pour effectuer les changements qui nourriront sans doute les succès de demain. L'entreprise Ineos est justement ce nouveau propriétaire. Son CEO Jim Ratcliffe en bon fan de foot veut croire au succès de son club. L'entreprise britannique basée à Rolle est spécialisée dans la production pétrochimique et a déjà investi de l'argent dans le sport lausannois (il est le sponsor principal du LHC). Ineos a mis la main sur le LS à la suite du retrait du groupe Dentan (construction, travaux). "Il y a une énergie nouvelle. Le stade de la Pontaise laissera la place début 2020 à une nouvelle enceinte. Les juniors passent devant le stade tous les jours et le voient grandir. C'est une source de motivation pour les jeunes joueurs mais aussi pour les supporters" sourit Guillaume Katz.
Et la Pontaise dans tout ça? Deux souvenirs ont marqué Guillaume Katz, un match couperet que le LS avait gagné. Avec 9 points d'avance à trois journée de la fin, Lausanne pouvait finir sereinement mais il se retrouvait a jouer sa survie en Super League pour deux points de différence avec Servette FC. Le perdant quitterait l'élite. "On a gagné 3 à 0 dans une Pontaise garnie de 10'000 spectateurs. C'était le 29 mai 2013." Lausanne avait pu pousser un "Ouf" de soulagement. Guillaume Katz se souvient aussi d'un derby à La Praille, en Challenge League. "Le LS est mené 1 à 0. Mais à la faveur d'un doublé en dix minutes, on gagne là-bas." C'était le 25 septembre 2010 et à la fin de la saison, Servette échouera à trois points derrière Lausanne qui fêtera sa remontée directe en Super League, Servette devant passer par les barrages.
Vidéo d'archive*: En 99,* Servette gagne son 17 et dernier titre de champion de Suisse lors du derby lémanique devant 15'850 spectateurs à Lausanne, une "finale" de LNA.
Pour terminer de deuxième tome de ce spécial "lémanico", le classico du Léman, Guillaume Katz a décidé de revenir dans le canton de Vaud après son escapade à Winterthur. Lui qui a intéressé le championnat israélien et notamment l'Hapoel Tel Aviv, grâce à un père juif (Israël autorise des joueurs juifs ou de parents juifs à jouer comme joueurs nationaux dans son championnat), a certainement plus aimé jouer les matchs contre le CSKA Moscou, le Sparta Prague ou l'US Palerme en 2011, après avoir hissé son club en finale de Coupe de Suisse et s'être qualifié après avoir vaincu Banja Luka, Randers ou le Lokomotiv Moscou, une vraie folie pour le club et pour les spectateurs de la Pontaise dans une saison inoubliable pour un stade qui s'est repeuplé en autant d'affiches comme par magie, comme au bon vieux temps. "Quelle chance de rencontrer ces équipes avec ses joueurs internationaux." Une chance que Katz retrouvera en jouant avec son nouveau club de Première Ligue, Echallens. Un club qui a tiré le gros lot pour la Coupe de Suisse le 15 septembre face au FC Bâle, à la veille d'un autre "classico romand" en version Coupe de Suisse (donc à la vie à la mort), contre un certain FC Sion.
Par David Glaser
Pour lire le tome 1 de notre "spéciale derby", allez sur ce lien. Merci à Oliver Dufour pour la mise en relation avec Guillaume Katz.
Histoire des jeux vidéo en Suisse romande
Vous souvenez-vous de votre première partie de PONG, Mario ou Freecell? Ces souvenirs font partie d'une histoire proche que le GameLab de l'UNIL-EPFL cherche à documenter. Guillaume Guenat nous explique pourquoi les jeux électroniques sont aujourd'hui sous la loupe des chercheurs.