WRS : Ondes anglaises sur le Léman
WRS : Ondes anglaises sur le Léman
C’est l’histoire d’un véritable oasis radiophonique, une île déserte remplie de voix variées, de multiples accents, dont le dénominateur commun est l’anglais. Créée en 1996 (le 25 juin, jour de mon anniversaire) sous le nom de World Radio Geneva (WRG), cette station marqua son empreinte sur Genève en tant que voix anglophone majeure. Initialement axée sur une programmation "US Top 40 friendly", c'est-à-dire sur un modèle musique pop et informations, WRG évolua rapidement vers un média de référence grâce à sa transformation en World Radio Switzerland (WRS) en 2007.
Pendant ses six années d’émission, WRS diffusa des programmes emblématiques tels que Not So Foreign Affairs (une émission de débat sur les questions géopolitiques vues de Genève avec Stéphane Bussard et Daniel Warner), Dig It (jardinage), Food Scout (cuisine), The Connectors (conseils aux expatriés), et Soundcheck (émission musicale de nouveautés indie). Parmi les contributions notables figuraient aussi les chroniques d’experts comme Gadget Guru (avec son présentateur collectionneur Ian), les Buzz Band of the Week dans l'émission de Susan Flory (ancienne journaliste de la BBC et de CBC), ainsi que les reportages captivants de Jordan Davis, couvrant des sujets aussi divers que le tremblement de terre ou Haïti ou la politique suisse, avec un angle genevois pour Haïté et anglo-américain pour la politique suisse.
Genève puis la Suisse
Fondée à Genève en 1996 avec un actionnariat partagé entre la SSR SRG, Reuters, et le Journal de Genève, la station WRG s'est affirmée comme un pont entre les communautés anglophones et genevoises, une évidence tant le nombre d'anglophones est important dans la région. En 2000, la BBC racheta les parts de Reuters, établissant un nouveau partenariat (40 % BBC, 40 % SSR). En 2007, sous l’impulsion d’Armin Walpen (directeur de la SSR-SRG) et de Gérard Tschopp (directeur de la RSR), WRG devint WRS et se transforma en une chaîne nationale diffusant sur le DAB à travers toute la Suisse, répondant à un mandat de service public visant à toucher les expatriés anglophones et les anglophiles dans toute la Suisse.
Un succès lémanique
Malgré son implantation réussie auprès de la communauté anglophone du bassin lémanique, WRS eut du mal à percer au niveau national, notamment en Suisse alémanique et au Tessin. En 2013, la SSR, sous la direction de Roger de Weck, décida de se retirer de la gestion de la station, vendant pour un franc symbolique la radio à Anglo Media Group et à G Media, revenant ainsi à un modèle commercial plus modeste. Sous le mandat de Philippe Mottaz, WRS - version SSR-SRG - connut des moments forts comme les soirées avec expatriés de la Suisse entière au Pickwick Pub de Bâle, ainsi qu'à Zurich et à Berne, la venue de Julian Assange à Genève, ainsi que les différents Swiss Music Awards commentés dans les matinales de la Station (The National présenté par Conor Lennon et Carla Drysdale). Le concert intimiste de Duran Duran à Klosters, avec des invités de marque dans l'assistance tels qu’Annie Lennox (Eurythmics) et Zoe Ball (BBC Radio 2), marqua également les esprits de la jeune équipe. En tant que responsable de la musique et envoyé spécial occasionnel sur des festivals, j’ai eu l'opportunité de développer une programmation curieuse, ouverte sur la musique suisse en anglais (langue très utilisé par les groupes suisses de musiques actuelle) ainsi que des relations dans l'industrie musicale helvétique et internationale, notamment en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en France, en Allemagne, en Autriche et en Italie. Notre radio rayonnait à la fois dans le pays mais aussi sur le marché voisin dans le milieu de la musique actuelle. La radio a pu mettre des groupes genevois comme Mama Rosin et Aloan, ou encore biennois comme Pegasus ainsi que la fine fleur de l'alternative music made in Switzerland (Sophie Hunger, My Heart Belongs to Cecilia Winter, Peter Kernell, Liricas Analas).
Manque de moyens et ambitions contrariées
La SSR, cependant, sous-estima les efforts nécessaires pour faire de WRS une chaîne nationale pérenne, particulièrement en Suisse alémanique. Bien que des projets de fusion avec Swissinfo aient été envisagés, dans l'esprit du BBC World Service ou de RFI, ceux-ci n’ont jamais abouti. Malgré cela, entre 2012 et 2013, WRS augmenta son audience, et fut élue meilleure radio suisse deux années consécutives lors des Swiss Radio Days. Le virage vers une programmation musicale mêlant classic rock et tubes du Top 40 contribua à élargir son public, avec l'aide de consultants allemands spécialisés, nous conseillant sur des chansons que le public germanophone appréciait. Ce fut un coup de maître en termes d'audience, le ressenti à l'intérieur de la station ne fut pas tout aussi agréable, les producteurs, animateurs, journalistes appréciant modérément l'afflux de groupes de rock FM des années 80-90 sur une antenne si ouverte à la modernité.
L'héritage de WRS
Des personnalités comme Jordan Davis (correspondant à Washington pour la RTS), Helena Humphrey (correspondante à Washington pour la BBC), Jo Fahy (journaliste à Swissinfo), Conor Lennon (communicant à l’ONU à New York), Dave Goodman (responsable de la communication de l'Eurovision Song Contest), et Michelle Mischler (cadre supérieure au World Economic Forum) ont toutes vécu un moment important de leur carrière à WRS avant de poursuivre vers des chemins internationaux gratifiants. La station servit de tremplin pour des talents suisses francophones comme Delphine Sage, Chloé Din, et Marc Menichini, qui travaillèrent en production et journalisme, principalement hors antenne avant d'intégrer la RTS Radio à Lausanne.
Rendre l’antenne sur les bords du Léman
Finalement, la dernière soirée de WRS à La Nautique de Genève marqua la fin de cette aventure radiophonique avec un goût d'inachevé pour beaucoup de mes ex-collègues, pour ma part j'avais décidé de rejoindre le groupe régional de radio BNJ pour continuer à progresser dans ma découverte de la Suisse et de ses propositions médiatiques. Avec Petula Clark chantant "Downtown" pour clore cette soirée, WRS tira sa révérence, redevenant une station privée quelques heures après sous la direction de Mark Butcher (ancien animateur de WRG et WRS période SSR-SRG) avec l'apport d'une nouvelle personnalité de radio nommée Kate Cullen. Bien que la radio ait cessé d'émettre en tant que station publique, WRS laissa une empreinte durable, notamment en promouvant la musique suisse anglophone et en offrant une plateforme unique pour les expatriés. Pour ma part, ces quatre années, de 2009 à 2013, resteront gravées dans ma mémoire comme une période de grande créativité et d'innovations musicales dans tous les domaines, le rock, la pop, le jazz vocale et les musiques du monde. Mon travail aujourd'hui continue à résonner. Lors d'un récent concert à la Catalpa de Carouge, des artistes comme Fai Baba, Long Tall Jefferson, et Paul Märki de Löwenzahnhonig se souvenaient encore de l'influence de WRS pour leur métier, leurs collègues artistes, eux qui produisaient et s'occupaient de promotion (pour Long Tall Jefferson) de leur musique dans les radios et les festivals de tout le pays. Irrascible, le distributeur et Two Gentlemen, le label lausannois furent aussi des partenaires très fidèles de la station permettant à la radio de mettre sur pied une soirée musicale de grande qualité à l'auditorium Ernest Ansermet de la RTS (aujourd'hui Ecole de Musique Actuelle de Genève).
Photo de Jo Fahy, Helena Humphrey et Dave Goodman (copyright World Radio Switzerland)
Archives LGBTIQ+
A l'initiative de la Ville de Lausanne, de la plateforme notreHistoire.ch, des associations Voqueer, Lilith et Remember me, une collecte d’archives LGBTIQ+ est lancée à Lausanne le 8 février 2025. Quels sont les lieux, les événements, mais aussi les personnalités ou les objets qui ont marqué la mémoire du mouvement LGBTIQ+ ? A vous de nous le dire, grâce à vos documents.