On appelle ça une désertion, une insoumission à un pouvoir militaire qui ne correspond pas du tout aux valeurs du jeune photographe-reporter qu'est André Gazut dans les années 50. Embauché au mensuel parisien "Réalités", il découvre l'horreur de la torture pratiquée par des militaires français en Algérie grâce aux clichés d'un de ses collègues, les auteurs de cette pratique paraissent très jeunes. Il en déduit facilement qu'il pourrait être de ceux-là. C'est assez de preuves pour le convaincre de fuir la France pour se réfugier en Suisse... et de "militer" à sa manière en devenant caméraman pour la TV, avant de devenir réalisateur et coproducteur pour "Temps Présent".
Nous devons à André une série de clichés réalisés à Bois d'Avault et à Cointrin le jour de l'arrivée de la délégation du GPRA de Tayeb Boulharouf qui nous permettent d'illustrer les six parties de cette conversation.
Texte d'André Gazut
"Résister à la guerre d’Algérie,
un parcours mouvementé
André Gazut, reporter photographe, qui refuse de porter les armes au moment de la guerre d’Algérie est incorporé comme infirmier parachutiste en 1959. Il déserte et se retrouve en Suisse romande. Condamné à trois ans de prison, il sera amnistié en 1966. Ce témoignage d’un jeune appelé face à la guerre d’Algérie se limite à évoquer les épisodes d’un anticolonialiste non-violent qui le conduisent à déserter.
Je ne suis né ni algérien, ni natif d’Algérie, ni de parents qui y ont vécu. En 1956, je suis un jeune français stagiaire reporter-photographe à Paris, interpellé par la guerre. Au sein de la revue Réalités, où je travaille, un confrère qui revient de Kabylie nous montre ses photos. Après avoir présenté une multitude d’images, il en montre une dizaine d’autres environ : « c’est aussi cela, la guerre d’Algérie », dit-il.
Le choc qui change une vie
Le choc. Un grand choc qui changera ma vie. Je découvre des appelés à peine plus âgés que moi qui torturent en présence d’un officier, Dans deux ans, j’aurai 20 ans et serai moi aussi appelé. J’avais déjà lu dans Le Monde, Témoignage chrétien de telles informations. Dans France observateur Claude Bourdet avait écrit le 13 janvier 1955, « Votre Gestapo d’Algérie ». L’auteur, ancien résistant déporté, compagnon de la libération a été inculpé d’entreprise de démoralisation de l’armée. Les partisans de l’Algérie française désignaient ces journaux comme la presse de l’anti-France. J’avais, par ces photos, la preuve de la pratique de la torture. Dans le numéro de Réalités de février 1957, aucune photo de torture n’est publiée. Y figure une image bien traditionnelle du début de l’interrogatoire du prisonnier par l’officier en présence d’appelés.
Si je comprends la lutte de libération algérienne, je suis aussi indigné par son usage du terrorisme à l’encontre des civils. Mais en Algérie, c’est la France, mon pays, qui torture et humilie.
Je ne veux pas devenir le nazi des Algériens, je ne serai pas complice de cette guerre coloniale. Il me faut chercher des livres sur l’histoire de sa colonisation et apprendre que sa conquête a été très violente et longue. En 1945, dans sa charte même, l’Organisation des Nations unies (ONU) a mis en cause la colonisation, alors que 750 millions de personnes dépendent de puissances coloniales, soit un tiers de la population de l’époque.
En 1957, le Général Jacques de Bollardière, en désaccord absolu, avec le Général Jacques Massu, condamne ouvertement l’usage de la torture. Il est le seul officier supérieur alors en fonction à l’avoir dénoncé. Il m’est inconcevable que l’on frappe de 60 jours d’arrêts de forteresse, ce compagnon de la libération, grand officier de la Légion d’honneur, médaille de la Résistance, Croix de Guerre 1939-1945.
Que faire face à ce monde fou quand le pouvoir ne poursuit pas le crime mais celui qui le dénonce ? Jeune adulte désemparé, je veux savoir comment faire quand je serai appelé par l’armée. Je découvre la non-violence dans un article de l’abbé Pierre qui mentionne deux noms, lire la suite ici : notrehistoire.ch/entries/04YzA...
"Dis voir", l'appli
Les Romands batoillent, mais de Sierre à Saignelégier leur accent varie. Le chercheur Mathieu Avanzi lance une application mobile pour étudier la diversité du parler romand. Le projet « Dis voir » invite les utilisateurs à enregistrer leur voix sur leur smartphone, à deviner des mots typiquement romands, et à tester leurs connaissances des accents régionaux.