Felix WEINGARTNER, chef-invité de l'Orchestre de la Suisse Romande
Felix WEINGARTNER, chef-invité de l'Orchestre de la Suisse Romande
Felix WEINGARTNER a souvent été invité à diriger l'Orchestre de la Suisse Romande - quasiment en voisin, car de 1927 à 1935 il était chef titulaire de l'Orchestre symphonique de Bâle («Sinfonieorchester Basel» SOB), directeur de l'«Allgemeine Musikgesellschaft (Basel)» et de la «Musik-Akademie der Stadt Basel». À partir de 1936, Felix Weingartner et son épouse, Carmen Studer, chef d'orchestre et femme de lettres, prirent domicile à Lausanne.
Felix Weingartner en 1927, Zuercher Illustrierte, 1927, Cahier 4, Page 4
Comme Felix Weingartner était très lié avec la Suisse Romande, un hommage lui fut rendu en première page de la Gazette de Lausanne lors de son décès:
"[...] S'il y avait encore une Europe musicale, on pourrait écrire qu'elle vient de perdre un grand chef d'orchestre.
Né en 1863 à Zara en Dalmatie, cet Autrichien a parcouru une magnifique carrière. Après des études au gymnase de Graz et muni d'une bourse du gouvernement, Weingartner était parti pour le Conservatoire de Leipzig. Puis il devint l'élève de Liszt, retiré à Weimar. Grâce à la recommandation du vieux maître il fut, à 22 ans, nommé directeur du théâtre de Koenigsberg. C'est là qu'il commença son apprentissage du théâtre lyrique, où il devait trouver plus tard le succès comme chef d'orchestre d'opéra. Il fut ensuite appelé à Hambourg, puis à Mannheim, enfin au «Hofoper» de Berlin, où il dirigea également les concerts de l'orchestre de la «Philharmonie». Il y demeura jusqu'en 1898. Mais la subordination du chef d'orchestre à l'intendant général alors de règle en Allemagne lui pesant, il reprit sa liberté pour s'établir à Munich où il conduisit l'Orchestre Kaim. De là, il voyageait à travers les pays d'Europe, où il fut bientôt reconnu comme un des maîtres de la baguette. À Paris, il dirigea à l'ancien Cirque d'été, l'orchestre des Concerts Lamoureux. Dès lors, et avec un succès qui s'affirmait toujours davantage, il y revint chaque année, sauf de 1907 à 1910, où il accepta la direction du Théâtre Impérial de Vienne.
En 1927, Félix Weingartner fut appelé à diriger le Conservatoire de Bâle, où il exerça une influence considérable et créa une classe d'orchestre qui eut beaucoup de succès, Il y donna une magnifique impulsion à la vie musicale bâloise: c'est alors qu'il demanda la naturalisation suisse. En 1935 il s'en retourna vivre un temps à Vienne, d'où il revint s'installer dans la Suisse romande, qu'il ne devait plus guère quitter.
Weingartner a beaucoup composé. À 20 ans déjà il avait vu le théâtre de Weimar jouer son opéra «Sakountala», dont il avait aussi écrit le poème. Il en a fait d'autres: «Genesius» et «Oreste», sans histoire!... L'importance de ses travaux d'orchestration s'est marquée dans la «Grande fugue op. 33» de Beethoven, dans l'«Invitation à la valse» de Weber, dans de fort belles versions de concert de l'«Alceste» de Gluck et du «Joseph» de Méhul. Il a composé également trois symphonies, des oeuvres de musique de chambre et de nombreux lieder, des musiques de scène pour «La tempête» de Shakespeare et le «Second Faust» de Goethe. Jamais il n'a laissé passer l'occasion de se faire valoir comme compositeur et aussi comme musicographe. Dans son ouvrage sur l'«Art de diriger», il a mis le suc de son expérience et dans son écrit sur Bayreuth il a fait quelque bruit, car il osait y défendre l'héritage de Wagner contre ceux qui en avaient la garde. Enfin, c'est à lui qu'on doit le seul effort entrepris pour rechercher la véritable intention de Berlioz dans certains passages de son oeuvre: ce faisant, il s'est assuré des titres à la reconnaissance des musiciens français.
Cependant les meilleurs de ses ouvrages sont ceux qui ont trait à l'exécution des symphonies classiques, car là, il est vraiment dans son élément. Ceci nous ramène au chef d'orchestre qui était de la plus haute classe. Il a été l'un des interprètes les plus objectifs, les plus directs aussi de Schubert, de Mozart et de Beethoven. À l'exception de Lamoureux et de Nikisch, nous ne croyons pas qu'aucun grand dirigeant nous ait insufflé autant que Weingartner, la conviction que c'était bien là le chef-d'oeuvre conçu par l'auteur. Il a été un grand chef aussi par cette culture générale que la sensibilité la plus subtile ne saurait remplacer. On devinait que les musiciens y étaient sensibles. Sous sa baguette chacun d'eux donnait son maximum et pourtant, au cours des répétitions, l'orchestre n'avait pas été préparé par la parole mais par le geste.
Félix Weingartner est mort quelques jours après Emile Sauer, qui a été non seulement un des plus grands pianistes de son temps, mais aussi un très pur artiste. Celui-ci a écrit qu'on trouvait chez son ami «le sentiment le plus fin du style, l'évidence, la simplicité, le talent d'indiquer le plus petit détail sans pourtant perdre jamais la ligne principale, la noblesse du maintien et du geste sans ornements et sans préciosité. Il ignore la recherche des effets, les grimaces, les torsions de membres et la danse au pupitre et de la sorte, il traduit d'une manière saisissante les oeuvres des maîtres classiques».
Nous n'aurions pu mieux formuler notre opinion sur le grand chef qui vient de disparaître.
R. de C [...]"
Portrait fait par ??, publié en couverture de la revue Le Radio du 23 janvier 1931, No 407, en couverture
Cité de la Gazette de Lausanne du 9 mai 1942, page 1.
Felix Weingartner et son épouse Carmen, concert au Conservatoire de Budapest, 1932, photos publiées dans le Zuercher Illustrierte, 1932, cahier 8, page 247
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