Les mémoires d'un cheval, 1984
Chers amis aujourd'hui, on me donne la parole. Aussi je m'empresse de vous décrie ma vie qui est toute de dévouement, car j'aime mon maître et il me le rend bien car lui aussi m'aime. Je suis né en Irlande voyez-vous quel honneur, être Irlandais,comme cela sonne bien. Un jour je me vis petit frêle couché sur la paille. Je faisais mille efforts pour me mettre sur les jambes. le soleil qui filtriat à travers la fenêtre me caressait de ses doux rayons. Il me donnait l'envie d'aller trotter dans le gazon. Je me souviens que lorsqu'il luisait d'un grand éclat Alfred venait me détacher et j'allais gambader dans la prairie. Oh ! Quelle joie pour moi de me rouler dans l'herbe tendre, où les fleurs me chatouillaient de leur parfum odorant, les tours d'adresse que je faisais dans mon enclos attiraient les enfants curieux. J'étais si aimable à voir, que les passant s'arrêtaient pour me contempler.Quand la bise du soir ondulait l'herbe des champs, je comprenais alors que le jour était à son déclin et qu'il me fallait rentrer, Je regrettais car j'aimais tant ces après midi de grand air et de liberté. De mes petits sabots je grattais le sol de l'écurie pour demander du fourrage. Alors Alfred arrivait.
Après m'être bien gouverné, je me couchais et je m'endormais bercé par le cri cri des grillons. Je faisais de si jolis rêves qui faisaient la joie de mon esprit. En pensée je me trouvais dans les pâturages entrain de broutter, gambader, trotter. Le matin lorsqu'il faisait frais je restais au chaud dans l'étable près de ma mère dame Bichette, tandis que la rosée prenait place dans mon enclos.
Quels heureux jours je passais pendant le temps de mon enfance ! Peu à peu ma vie commençait à être plus pénible. J'avais deux ans et on me nommait poulain.Pendant quelque temps on m'apprit à tirer, la voiture, un char. Pour les premières fois je trouvai ce fardeau pénible et je suai. J'attendais alors avec impatience l'heure du repas et la sieste ! Mais je sus encore vite tirer et je devins un fort et beau cheval.
Un beau jour des messieurs arrivés de Suisse firent une inspection dans nos rangs. Il en choisient un bon nombre. Je fûs parmi eux. Je quittai donc ma patrie et nous voilà sur la mer, le bâteau glisse sur les flôts. Combien de temps le voyage dura-t-il ? Je ne saurai vous le dire. Après le bâteau, le train, par la petite lucarne nous voyons défiler des plaines immenses, des montagnes. Elle est donc si loin cette Suisse ? Notre voyage se fit sans accident, à part quelques petits tamponnements. Quelques fois la trépidation du train nous faisait vaciller et perdre l'équilibre. Oh ! Un arrêt ! Il se prolonge, va-t-on enfin nous sortir de cette prison ? Oui c'est cela, car des garçons d'écurie ouvrent enfin la porte nous saisisent par le licol nous mènent dans les grandes écuries de Berne. Me voilà désigné comme cheval de la régie fédérale. Quel bouleversement ma vie est toute changée.C'est une année d'apprentissage que je vais faire. Gymnastique, équitation saut que sais encore ? Comprenez-vous combien il faut de docilité de souplesse et d'élégance pour être une vraie monture. De jeunes soldats entrèrent en recrue, et chacun d'eux parmi nous vient faire son choix. Me voilà au service d'un jeune maître. Dès les premiers jours nous nous comprenons. Je devine qu'il est doux et bon, et lui sait lire dans mes grands yeux la bravoure même. Il me donne le nom de Caporal, fixa sur mon dos une selle. Désormais nous étions bon amis. dans les camps d'équitation nous nous élancions sur la piste de toute notre ardeur, les sauts étaient franchis et les obstacles abattus. Plusieurs fois même je remportai des prix. A côté de cela j'adorais la musique.Oh ! Alors marcher au pas de la fanfare ou d'un tambour, mes oreilles se dressaient et mes jambes tépignaient je ne me sentais plus. Plusieurs fois j'ai figuré dans des cortèges. Dans les défilés on m'admirait et adressait à mon cavalier des félicitations.
Savez-vous aussi que quelquesfois des officiers un peu timides se servaient de Caparal pour apprendre à monter à cheval? J'ai été brave serviteur de l'armée j'ai accompli de longs jours de service.Mon patron qui était un grand marchand de chevaux me vendit à un paysan et il savait que chez ce nouveau propriétaire je serai traîté avec bonté. Aussi avec grand regret et appréhension j'ai quitté la belle ferme des trois sapins pour venir à Mézières. Mais je n'avais rien à craindre dans mon nouveau domicile car on me traita avec ménagement.Tout de suite je me rendis compte que j'étais bien tombé. Pendant la saison des grands travaux on me donnait un compagnon. Oh ! Alors que j'étais content, Je savais manifester mon plaisir par des hénnissements joyeux. Mon maître qui savait lui aussi lire dans mes grands yeux, me tapait amicalement sur l'encolure. Si parfois le travail était rude, mon petit André et ses soeurs m'apportait un peu de Pain et même croyez moi un carré de sucre. J' accomplissais ma besogne consciencieusement. Jamais serviteur ne fût plus fidèle, j'avais cependant un petit défaut.
A l'abreuvoir il fallait me tenir par la longe sinon je prenais la fuite. La carinière au vent les jambes tendues je faisais du galp à travers les les champs. Après quelques écarts je rentrais docilemet attiré parfois par un peu de sucre.
En été je supportais la chaleur du jour sans broncher. Les taons s'acharnaient à mes flans, alors de ma longues queue qui traînait presque par terre, je les chassais. Souvent aussi les enfants de la maison grands amis s'armaient de branches feuillus venaient à mon secours pour débarrasser mon poitrail des mouches ennuyeuses.
De temps en temps attelé à la voiture j'allais au marché ou faire une petite promenade, lorsque je n'étais pas trop fatiqué. Car mon maître me nénageait il avait grand soin de mes vieux jours.Petit à petit mes forces déclinaient, bientôt je n'osais plus me coucher, de crainte de ne pouvoir me relever. Un beau dimanche on prit une photo j'avais sur mon dos mon petit ami.
Ainsi le souvenir de Caporal restera car jamais maître et serviteur ne furent plus unis. Ensuite je repris le chemin des trois sapins pour dire un dernier adieu à mon cavalier.
C'est dommage que Dieu qui fit si bien les choses ne créa point un paradis pour récompenser le dévouement et la fidélitté des serviteurs si dociles.
Caporal vécu 27 ans
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