Le château du Signal - de sa construction aux enchères
Le château du Signal - de sa construction aux enchères
L'on a longtemps spéculé que le château de Sauvabelin aurait été construit par un prince russe. En verité, son constructeur et premier propriétaire était d'origine vaudoise et s'apellait Jules Diserens.
Né à Paris en 1855, enfant illégitime d’Isaline Diserens, une jeune domestique au service d'une famille riche, Jules a été élevé dans la région lausannoise et à Genève. Après des études à l’École industrielle de Genève, il a trouvé un emploi de précepteur auprès d'une famille d'émigrés français qui dirigeaient une manufacture de soie à Moscou. En 1886, il s'est marié avec Louise Chalmel, une fille adoptive de ses employeurs qui avait été une de ses élèves. Quelques ans plus tard, il a lancé, avec trois associés, une entreprise à Saint-Pétersbourg qui a connu un grand succès, surtout par les èquipements électriques qu'elle vendait à la marine marchande et militaire russe. En peu de temps, Jules a ainsi pu faire fortune.
Après une pneumonie qui l'a forcé à prendre des cures en Allemagne et en Suisse, Jules Diserens s'est retiré de son affaire russe. Il a décidé d'investir sa fortune dans des constructions de luxe sur les hauteurs de Lausanne. Il a d'abord acheté une grande parcelle de terrain en contrebas du Signal de Sauvabelin et y a fait bâtir un château pour lui et sa famille qui est depuis connu sous le nom de château du Signal.
Fig. 1. Le château du Signal en fin de construction en 1902. La famille Diserens reçoit des visites dans le jardin du château. Le propriétaire Jules Diserens est debout et porte un chapeau de paille. Louise Diserens-Chalmel, son épouse, est assise à côté de lui. Les trois fils Charles, Louis et Georges se trouvent en avant-plan. Les visites sont Henri Chalmel, frère de Louise, en uniforme français, à côté de sa fiancée Rose Levri, ainsi que deux cousines Chalmel. La femme de chambre Fanny Gavillet porte un costume traditionnel vaudois. Archives de la famille Diserens.
La famille Diserens a quitté le château en 1907 et s'est installé dans une villa voisine que Jules avait également achetée. Il a divisé la parcelle du château et a fait construire au bord de la route du Signal une villa à deux appartements, appelée la villa du Mont, ou du Signal (route du Signal 20). Il a cherché d'attirer pour ces immeubles de luxe de riches locataires d'Angleterre, des Etats-Unis et de Russie. Une année c'était un prince russe de la famille Galitzine qui a loué le château, d'où vient sans doute la rumeur que le château aurait été bâti par ce prince.
Fig. 2. Brouillon d'annonce de location pour le château du Signal, écrit par Jules Diserens. Vers 1907/08. Archives de la famille Diserens.
Pour entretenir ses plans immobiliers, Jules Diserens a dû s'endetter de plus en plus. Ceci s'est encore accentué quand il a fait bâtir, avec quelques associés, le somptueux Hôtel Majestic, situé en face du château du Signal. Pour finir, à l'arrivée de la Première Guerre mondiale, la clientèle riche espérée ne venait plus du tout et Jules a fait faillite. Le château et les autres biens immobiliers ont été vendus aux enchères en 1916 et Jules et sa famille sont retournés à Moscou dans l'espoir de se construire une nouvelle vie prospère. Mais à peine étaient-ils tous installés, la révolution à éclaté et ils ont dû trouver des moyens pour survivre aux horreurs du régime bolchévique. Ce n’est qu’en 1920 que les Diserens ont pu rejoindre la Suisse par un train de rapatriement avec la perspective de devoir repartir à zéro.
Fig. 3. Annonce de vente aux enchères du château du Signal, publiée dans la Gazette de Lausanne le 23 septembre 1916.
L'histoire plus complète de Jules Diserens (mon arrière-grand-père) et de sa famille est documentée dans mon livre Bonheur éphémère en pays lointains.
Cher monsieur Daniel Schümperli, bien vu votre travail avec ce qui en sort au bout de celui-ci. Il est certain que vous n'aimer guère les choses faites à moitié et je vous en remercie de bon coeur
Amicalement Renata
Grand merci d'avoir levé le voile sur l'histoire de cet édifice!