La Télévision Suisse Romande est née dans le salon d'un maison du XVIIIe siècle Repérage

1 novembre 1954
Jean-Jacques Lagrange
Les archives de la RTS

Le 1er Novembre 1954, la Télévion Suisse Romande (TSR) reprend le studio de la TV Genevoise installé à la villa Mon Repos, dans le parc de la Perle du Lac, à Genève. La TV Genevoise y diffusait ses émissions depuis le 28 janvier 1954. Avec la TSR, les émissions seront diffusées les lundi, mercredi, jeudi, vendredi et samedi, de 20h. à 21h.30. Le mardi est jour de relâche pour l'entretien technique des équipements et le dimanche doit rester sans télévision, selon la décision du Parlement, afin de « respecter le jour du Seigneur »!

Le studio situé dans le salon de la villa Mon Repos mesure 6m. sur 12m soit 72m2 ! Les PTT (qui sont en charge de la technique pour la TV) l'ont équipé de deux caméras électroniques PYE pour faire des émissions en direct (ce dont ne disposait pas la TV Genevoise) qui complètent les deux Télécinéma 16mm et 35mm qui permettaient à la TV Genevoise de diffuser ses programmes entièrement réalisés sur film 16mm.

Ce lancement précipité de la TSR, alors que l'émetteur de la Dôle prévu pour la chaine romande n'est pas terminé, peut s'expliquer par la livraison du car de reportage PYE qui permet au Conseil fédéral et à la SSR de gérer provisoirement le conflit entre Genève et Lausanne sur l'attribution du Centre TV romand. C'est un compromis pour la période expérimentale en Suisse romande : Genève reçoit le « Centre fixe provisoire » avec le studio de Mon Repos et Lausanne reçoit le "Centre mobile provisoire » avec le nouveau car de reportage !

Une équipe réduite

Le directeur de la TSR est Frank R. Tappolet, qui a été formé à la TV de Zurich. Il y a trois réalisateurs: André Béart, Jean-Claude Diserens et Jean-Jacques Lagrange. Ils réalisent chaque soir toutes les émissions en studio ou à l'aide du car, ainsi que les régies d'émission. Au studio, deux caméramen : William Baer, chef opérateur et Jacques Margot, également chargé de faire les photos de plateau. Jacqueline Baer est la scripte. Enfin, l'équipe de la TSR compte encore cinq techniciens pour la vidéo et le son et une décoratrice: Hugo Kleis à laquelle succédera Jean-Pierre Guillermet.

A Lausanne, le car de reportage PYE est livré début décembre et une équipe dirigée par Alain Rossel, chef technique, peut le prendre en main et faire les premiers essaus hors antenne. Cette équipe comprend Roger Bovard, chef opérateur, Frank Pichard caméraman, un électricien et quatre techniciens pour la vidéo et le son, une script girl, une secrétaire et un régisseur: Dominique Cavin

Comme l'émetteur de la Dôle n'est pas terminé, les émissions sont émises sur l'émetteur de la TV Genevoise situé sur la Tour de la Rippaz, construit par les étudiants de l'Institut de Physique. Il est opérationnel depuis le 28 janvier 1954. L'émetteur de la Dôle entrera en fonction le 1er février 1955.

En direct

Toutes les émissions sont en direct et il n'y a aucun enregistrement possible de la vidéo jusqu'à l'installation d'un kinescope en 1959 ! La première émission de la TSR enregistrée le 31 janvier 1958 sur le kinescope de SRG à Zurich sera « La Valse » de Maurice Ravel par l'OSR dirigé par Ernest Ansermet. Les photos de ce dossier sont les seuls témoignages de toutes les émissions réalisées en direct.

Chaque soir, l'émission TSR commence avec le Téléjournal diffusé la veille à SRG Zurich. Il s'agit de 15 minutes de news en film exclusivement qui sont commentées en cabine par Jean-Jacques Forestier ou Raymond Bech. Cette formule est imposée par le fait qu'il n'y a pas de liaison hertzienne entre Zurich et Genève. Donc, chaque soir la bobine film du Téléjournal, après diffusion à Zurich, est déposée par « hors sac » au wagon postal du train de nuit et récupérée à la gare de Genève par un collaborateur TSR pour traduction du commentaire allemand et est diffusée en différé !

Au printemps 1955, trois nouveaux réalisateurs viendront se joindre à l'équipe de départ : Paul Siegrist qui s'est formé en stage à la RTF, Raymond Bech journaliste et cinéaste qui prend le nom de Raymond Barrat comme réalisateur puis Pierre Matteuzzi, musicien qui s'est formé en stage à Mon Repos ainsi que d'autres collaborateurs, régisseurs de plateau et assistants.

Tensions entre Lausanne et Genève

Très vite, le studio de Mon Repos et ses 72 m2 se révèlera trop petit pour les projets d'émissions des réalisateurs. Au début 1955, le directeur de Radio-Lausanne, Jean-Pierre Meroz, profite de la situation et fait transformer son grand studio radio de 200 m2 en studio TV contrairement aux engagements pris par les deux villes. Un gril pour éclairage est installé et le directeur TSR Frank Tappolet y laisse le car de reportage y réaliser des émissions dramatiques et des variétés.

La réplique de Genève est immédiate. Radio-Genève et la Ville de Genève transforment la salle de répétition de l'OSR dans le bâtiment de Carl-Vogt en un grand studio de 400 m2 avec construction de deux régies image et son sur le toit du bâtiment ainsi que des locaux pour les TC 16mm et 35mm.

La SSR et les PTT à Berne interviennent pour faire respecter les engagements pris entre Lausanne et Genève alors que les réalisateurs invoquent les possibilités offertes par le grand volume du nouveau studio pour demander le déménagement.

En juin 1955, la TSR s'installe au Boulevard Carl-Vogt. De plus, la Direction générale de la SSR fait démonter le studio de Lausanne et les PTT équipent le nouveau studio de Carl-Vogt d'une troisième caméra PYE, d'une grue de studio pour caméra et d'une girafe-son.

Pour rester neutre dans cet imbroglio politique, le directeur TSR Frank Tappolet ne s'est pas déplacé à Carl-Vogt et a gardé son bureau à la villa Mon Repos où est aussi resté toute la logistique naissante qui se mettait en place (administration, comptabilité, montage film et tous les nouveaux collaborateurs engagés). Mais très vite, les locaux sont devenus exigus et la TSR a déménagé dans des bureaux loués dans un immeuble à la Place des Eaux-Vives.

La villa Mon Repos a été rendue à la Ville de Genève qui y a installé le Centre Européen de la Culture.

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28 juin 2012
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