LS Story: Patrice Iseli, un fan dans la Ville (2/2)
LS Story: Patrice Iseli, un fan dans la Ville (2/2)
Deuxième et dernière partie de notre entretien avec un passionné de sport ultime dans le cadre de notre galerie historique sur le Lausanne Sport, il s'agit de Patrice Iseli. Ce Monsieur est un personnage connu dans tout le paysage du sport romand car il dirige le service des sports municipal le plus important de la région. Dans une Ville de Lausanne qui consacre un budget important à des infrastructures sportives et aux activités qu'elle y propose à l'intérieur, Patrice Iseli joue aussi les "marieurs" entre personnes qui ont le même intérêt pour la compétition. Le Lausanne Sport lui doit la rencontre entre Jean-François Collet et Alain Joseph, le duo président/vice-président qui a précédé Bob Ratcliff de la société INEOS. C'est aussi un grand observateur couplé d'un acteur motivé pour faire du LS un club de référence au niveau suisse et un jour, à nouveau sans doute, au niveau continental. Dans cette interview, Patrice Iseli raconte sa vision, évidemment proche de celle de son entourage dans le milieu politique lausannois (Oscar Tosato, le municipal des sports à la Ville de Lausanne est souvent lui aussi auprès de Patrice Iseli pour apporter le soutien politique à un club qui a de nouveaux investisseurs et dirigeants depuis deux ans) ainsi que de nombreuses anecdotes sur l'histoire pas toujours simple du LS... Dans le football, la vie n'est jamais un long fleuve tranquille de toutes façons. C'est sans doute pour cela qu'on l'aime tant.
Que pensez-vous du retour du LS dans une Super League qui compte plusieurs clubs romands historiques, la perspective – post Covid19 – de voir plusieurs derbys par saison?
Patrice Iseli: Disons déjà que de façon générale moi j'ai vraiment l'espoir que l'année prochaine les quatre clubs romands soient en Super League (l’entretien date du 26 juin). Ce serait quand même magnifique. Après c'est vrai que de retrouver notamment les derbys avec Servette, ce sont plein d'histoires qui resurgissent. Avec quand même, il faudrait vérifier les chiffres, cette impression que contre Servette on perd un peu plus. Contre Servette FC c'est toujours compliqué.
Pourtant Servette FC, c'est un club qui a un peu le même profil que Lausanne Sport ?
Oui mais je ne sais pas pourquoi, il y a une petite forme de complexe sociétal et culturel. Il y a quelque chose avec Servette FC. Je suis fortement marqué par ce fameux match d'il y a vingt ans, c'est souvent difficile contre Servette.
Et de voir des Lausannois partir pour FC Servette, ça vous a toujours révolté?
Les derbys, cette rivalité régionale, c'est toujours bon. Mais en revanche, j'aime beaucoup Genève. Mon épouse a eu son anniversaire la semaine passée. J'ai pris congé et on est allé toute la journée à Genève parce qu'on aime cette ville. Je n’ai donc aucun problème avec Genève. On baigne dans les mêmes eaux. Après ce qui est moins bien, c'est la rivalité des «supporters», encore une fois je mets les guillemets pour le mot « supporters ». C'est très clairement pour la police les matchs les plus à risque de la saison. Un match Lausanne Sport-Servette, en terme de bagarres, c'est le pire. Et c'est encore une fois, pour moi, c'est la gangrène du sport.
Et Sion alors on met cette affiche dans la catégorie Servette ou pas ?
Alors il peut y avoir des problèmes. J'ai le souvenir d'un match de Coupe suisse ici : Malley-Sion, au Bois-Gentil il y a une dizaine d'années. C'est Chapuisat qui entraînait sauf erreur Malley (j’ai un doute car il a entraîné les deux clubs à la même période). Mais il y avait des supporters qui étaient venus... Je pense que de manière générale il y a un capital sympathie plus fort du côté de Sion. Historiquement les Vaudois aiment bien les Valaisans. La relation entre les deux est différente. Il y a des personnages qui ont marqué le foot suisse Gilbert Fachinetti à Neuchâtel Xamax en est un, Christian Constantin en est un autre avec le FC Sion.
Vincent Steinmann (chef du marketing du LS), Patrice Iseli, Florence Bardot et Bob Ratcliff d'INEOS et Oscar Tosato, municipal des sports, à la Tuilière
Il y a eu, probablement un des grands dirigeants du LS avant, comme le président Truan, un autre que je citerai c'est Alfred Bezzola. Mais il n'y a pas eu à Lausanne un homme qui incarnait à ce point son club du LS, son club. Constantin, c'est le propriétaire de son club à Sion, Fachinetti aussi, mais c'était encore autre chose, une autre époque. Avant les matchs, tous ses joueurs venaient chez lui et c'est madame qui faisait à manger, les contrats c'était une poignée de main, il y avait un autre relation. Il incarnait sa ville avec son accent neuchâtelois. Je n'ai pas le souvenir de présidents aussi populaires à Lausanne, comme Gilbert Fachinetti à Neuchâtel ou Christian Constantin à Sion. Chez nous, nous avons eu un dirigeant rejeté comme Waldemar Kita. Philippe Guignard a endossé un tout petit peu ce rôle, mais, d’une part, il n’injectait pas son argent dans le club et, d’autre part, il n’est pas resté suffisamment longtemps. Jean-François Collet est peut être resté plus longtemps.
Parlez-moi de Jean-François Collet...
C'est une jolie histoire à mes yeux, parce que c'est clairement moi qui ai amené Jean-François Collet au LS. Quand le club a failli de nouveau, il y a quelques années, redescendre en Challenge League. Le président était Bernard Jaton. Cette année-là. il y avait un petit groupe, de quatre ou cinq personnes, qui avait demandé à discuter avec moi. Et je me souviens que c'était au Buffet de la gare de Lausanne à midi. A l'époque le club allait à vau l’eau et dans ce petit groupe il y avait Alain Joseph qui était là depuis peu de temps, il débarquait un peu. Moi j'étais en relation avec Jean-François Collet que j'avais connu dans le cadre de la coupe Davis, qu'on avait organisée en 2004 à Lausanne (ce fut un événement incroyable et c'est Jeff Collet qui l’avait organisé avec sa société Grand Chelem). Donc depuis cette époque, je le connaissais bien. A l'époque, il était intéressé à acheter le LHC. Ça ne s'était pas fait, mais je savais que son sport de cœur c'était le foot, pas le hockey. Quand on était au Buffet de la gare, on discutait de ce qu'il fallait faire pour sauver ce club. Je me rappelle, j'étais sorti du repas, j'avais pris ma voiture, pris mon téléphone et appelé Jeff en lui disant : « je crois qu'il faut que tu rachètes le LS. Il y a notamment un gars très bien, qui s'appelle Alain Joseph, dans le groupe de personnes intéressées. » Et c'est parti comme ça, il a racheté le club. Ils ne se connaissaient pas encore ces deux-là mais après ils sont devenus très proches. Jeff fut ensuite l'employé d'Alain, c'est-à-dire qu'il a vendu le club à Alain Joseph, qui l'a ensuite vendu à INEOS. Puis, sa société qui organise les événements Grand Chelem a également été vendue à Alain. Mais Jeff en est resté directeur. C'est Jeff tout seul qui a maintenant repris Neuchâtel Xamax.
Donc quand vous êtes arrivés en affaire à Lausanne, pour le service des sports, votre rôle c'était de mettre ensemble les gens, et parfois prendre des décisions ?
C'était circonstanciel, ça c'est passé comme ça. C'est vrai on a dû pas mal s'impliquer à différents moments dans le club, pour aider à le sauver.
Est-ce que c'est le même taux d'implication pour le Stade-Lausanne-Ouchy ou d'autres dans la région ?
Non, parce que c'est clairement le club phare en matière de foot. Le Stade Lausanne-Ouchy c'est différent, on est aussi impliqués mais plus au niveau des clubs formateurs, des juniors et cetera. Ce qui se passe maintenant c'est magnifique sur le plan sportif, mis disons que c'est presque un anachronisme sur le plan de l'ADN du club. Ce n’est pas un club qui a forcément pour vocation d'être en ligue nationale et il n’a ni les infrastructures pour ça ni l'histoire. Ils viendront jouer à la Pontaise, c'est sûr, dès la saison prochaine.
Je voulais terminer l'entretien par quelques noms sur questions, notamment des personnalités des joueurs qui ont marqué le LS, mais aussi quelques affiches européennes.
Stéphane Chapuisat, j'avais 25 ans quand il jouait ici. J'ai aimé ses fameux déboulés sur l’aile gauche. C'est le fils d'un joueur légendaire du LS et ça me plaît beaucoup. Il y a eu plusieurs joueurs comme Fabio Celestini ou Christophe Ohrel. Puis Eric Burgener, Richard Dürr, et Claude Ryf, j'étais à l'école avec lui. Le suédois Stefan Rehn qui était extraordinaire, un métronome, il orientait le jeu. Il y a eu les anciens, Miroslav Blažević qui avait fait jouer Burgener en avant-centre...
Y a-t-il d'autres photos du passé qui racontent quelque chose de votre passion pour le LS ?
Une des photos où je suis allé sur le terrain à Berne sur le terrain après la victoire du LS 4 à 1 face aux Young Boys en quart de finale de la Coupe suisse, bras dessus-bras dessous avec John Dragani.
Eric Parisod du Onze d'or, John Dragani l'entraîneur et Patrice Iseli au Wankdorf en 2009.
Comment analysez-vous la situation du club en 2020 ?
Le club, ces vingt dernières années, a eu plus de bas que de hauts, presque deux faillites, des relégations et plus aucun titres majeurs (ndlr : il a été champion suisse de Challenge League après cet entretien). Il y a eu deux matchs contre Moscou en 2010-2011, c'est la dernière fois qu'on voyait la Pontaise presque pleine. Malgré toutes ces traversées du désert, il y a un noyau de fidèles, l'enjeu pour le club est de fidéliser de nouveaux supporters. Le club est extrêmement dynamique pour essayer de faire venir les fans.
Je ne suis pas allé à Moscou mais j'ai vécu d'autres matchs de près. Comme celui contre les Irlandais de Cork. Avant les matchs européens à la Pontaise, on était invité par les dirigeants du club pour un repas. On était à l'Hôtel de la Paix à Lausanne, on était environ quinze personnes dans une salle. Jeff Collet était président du LS à l'époque. Ce n'est pas son truc les « officialités » et ce jour-là il dit « on a des cadeaux pour vous » aux dirigeants de Cork et il remet un sac-cadeau à chaque dirigeant de Cork. Mais c'étaient les cadeaux de l'équipe adverse destinés aux dirigeants du LS qu'il a commencé à distribuer… On avait beaucoup rigolé de cette confusion. Il y avait une ferveur lors de ces matchs européens, j'espère revivre ça.
Patrice Iseli porteur d'une parole pleine d'espoir pour le futur du LS lors de l'inauguration du stade de la Tuilière
Votre passion pour le football européen va être satisfaite avec le nouveau LS ?
On a une vocation de sport international à Lausanne, de l'administration du sport international. Nous sommes la capitale olympique, nous hébergeons le CIO et une cinquantaine de fédérations sportives internationales. Il y aurait une cohérence à avoir une équipe qui joue au niveau international. Nyon a une vocation du foot international avec l 'UEFA. Nous, il nous faut un club qui s'installe en première division et joue les premiers rôles.
Pour lire la première partie de cet entretien, cliquez sur ce lien.
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