Le mal du pays
Le mal du pays
Quel choc pour Hélène Epiney (1934) en ce 27 octobre 1950 ! Engagée comme "fille de cuisine" au service d'un ancien dignitaire brésilien en résidence à Genève, elle passait de son village d'Ayer où elle partageait sa chambre avec ses cinq frères et sœurs à une immense demeure comptant plus de 40 pièces.
Avant son départ, ses parents - fervents catholiques - s'étaient inquiétés de savoir si elle pourrait assister à la messe du dimanche. Si bien que quelques jours après son arrivée, à la Toussaint, après l'office, elle retrouva la tante de Genève qui lui avait trouvé cette place : elle lui tomba littéralement dans les bras, secouée d'un gros chagrin dû à l'ennui !
La jeune Hélène alors âgée de 16 ans apprit gentiment le travail d'employée de maison dans une demeure où cinq personnes servaient les "patrons". Monsieur était âgé de 84 ans et Madame de 75 ans. La personne à qui elle avait surtout affaire, la cuisinière, était âgée de 60 ans. C'est elle qui lui apprit les rudiments de son métier. Comme Hélène n'était pas très habile avec les casseroles, elle essuyait de vives remontrances : "Mais qu'est-ce que ta maman t'a appris ?" Cette question ne manqua pas de blesser profondément Hélène qui eut pourtant le sens de la répartie :
"Ma maman s'occupait de la campagne et elle n'a pas trop eu le temps de m'apprendre à cuisiner."
Un jour, pour lui faire plaisir, la cuisinière lui proposa de monter dans sa chambre écouter la radio : "Il y a quelque chose qui devrait te plaire !" En entendant les fifres et tambours de Saint-Luc, Hélène fondit en larmes.
Alors qu'Hélène était en place depuis 9 mois, la cuisinière l'invita à nouveau à entendre la radio. Toutefois, elle l'avertit : "Mais cette fois, ne pleure pas !" C'était le carillon de son village d'Ayer : il déclencha chez Hélène un nouveau torrent de larmes. Le "heimweh" avait une fois encore opéré.
Ce n'est qu'au bout d'un an et demi dans cette place qu'Hélène put enfin rentrer dans son Val d'Anniviers chéri. Malgré ce terrible ennui, elle ne regretta en rien cette place qui lui avait apporté une véritable expérience de vie et... quelques sous à ramener à la maison.
Nb: Avant le départ pour Genève, son papa, Adolphe Epiney, lui avait donné de quoi rentrer si elle s'ennuierait. Elle n'a pourtant jamais voulu toucher à ce pécule.
Récit de vie rapportée par Hélène Savioz-Epiney alors âgée de 85 ans. Enregistré à Sierre le 29 mars 2019.
La fille d'Hélène, Michèle, a eu la gentillesse de la conduire sur les lieux 63 ans plus tard. Voici une photo montrant une partie de la demeure aux 40 pièces :
et la vue sur la campagne environnante :
pour voir la vidéo du moment où Hélène se retrouve face à la demeure aux 40 pièces 63 ans plus tard, cliquez sur ce lien : https://www.notrehistoire.ch/medias/119238
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