Lettre de la Ligne Maginot
Lettre de la Ligne Maginot
Le 29 mai 1940, à 20 heures. Ma toute petite Reine chérie, un tendre baiser Chouquette. J'ai le droit de t'écrire 10 lignes. C'est peu. Néanmoins, tu seras heureuse d'apprendre que je suis bien, sans une éraflure. Toujours au même endroit. J'ai beaucoup pensé à toi, ma Nonette toute amour. Tu devais être bien inquiète. Je te souhaite tout de suite une bonne fête, ainsi qu'à notre Bijou chéri, car je ne sais pas encore quand je pourrais rentrer. Adieu ma gaminette chérie. Bon courage, espérons, à bientôt. Dans un baiser où je vous tiens toutes deux, ton Grand, ton Gamin. Baisers à tous. Albert Flohr, équipage A.25, secteur fortifié de Boulay, France
Il s’agit d’une petite lettre envoyée par mon père à ma mère depuis la Ligne Maginot. Ce printemps-là, et pendant de nombreuses semaines, l’envoi de courrier a été interrompu. Ma mère se faisait un souci d’encre en pensant au sort réservé à son mari.
En effet, dès 10 mai 1940, les forces du Troisième Reich envahissent les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la France. Le 22 juin, le gouvernement français de Pétain signe l’armistice. Armistice refusé par les militaires. Les soldats enfermés dans la Ligne Maginot ne se sont pas rendus à l’ennemi. Mais ils ont été emmenés comme prisonniers en Allemagne et enfermés dans un Stalag.
A propos de l’ouvrage 25, M. Séramour, historien spécialiste de la Ligne Maginot m'a écrit en juin 2020 :
"L'ouvrage A 25 était l'ouvrage d'Anzeling, un gros ouvrage d'artillerie de la Ligne Maginot qui n'a été remis aux Allemands que début juillet 1940, sur ordre du gouvernement français. Il se trouve non loin de la ville de Boulay, en Moselle."
Ce qui explique la note de ma mère, datée de 1983, trouvée dans son album de photos :
"Albert a été fait prisonnier le 4 juillet 1940, jour anniversaire d'un an de sa petite fille. Considérés comme "prisonniers d'honneur" parce qu'ils ne s'étaient pas "rendus" en juin 1940, ses camarades et lui ont marché jusqu'en Allemagne, avec leur fusil et tout leur "barda* sur le dos. Beaucoup tombaient sur le bord de la route".
Voir aussi sur notre histoire : Récit de deux évasions :
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