Termen, la mine d'ardoise

Termen, la mine d'ardoise

octobre, 1945
Photographe amateur inconnu
Yannik Plomb

De l'ardoise nous en trouvons principalement dans la région préalpine. Résistante et facile à débiter, elle était utilisée surtout comme matériel de couverture de revêtement de sol, de plateau de table ou d'élément de corniche et pour fabriquer des tablettes à écrire et des mines de crayon, A côté de nombreuses carrières à ciel ouvert couvrant les besoins locaux, des gisements sis en Valais Sembrancher, Leytron, Termen, Ried-Brigue alimentaient un marché plus vaste. La première mention d'une ardoisière en Suisse remonte à 1565 à Engi. Victimes de coûts de production élevés et de la concurrence, certaines exploitations furent abandonnées, Engi en 1961, Termen en 1972.

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Ancienne maison à Villa, photo Lüscher Nyon 1945

Depuis le début de la guerre et maintenant encore, il n'est pas facile de se procurer des tuiles pour couvrir les toits des bâtiments que l'on vient de construire, la pénurie de charbon, en effet, a restreint dans de grandes proportions la fabrication des objets en terre cuite. Comme il n'était guère possible de remplacer les tuiles par de la tôle ou des plaques de cuivre, les métaux nous faisant défaut tout autant que le charbon, il a fallu revenir à la mode d'autrefois. On s'est donc remis à couvrir les toits de belles et solides ardoises de chez nous qui elles, heureusement ne nous manquent point. Il faut avouer, d'ailleurs que, bien souvent, le paysage a tout à gagner de ce retour à l'humble ardoise qui convient à toutes les contrées et ne dépare jamais un site pittoresque, tant elle est discrète en sa robe de couleur grise. Si tout le monde sait ce qu'est un toit d'ardoise, peu de gens connaissent les endroits où l'on en trouve et quelles sont les différentes manipulations par lesquelles passe le schiste brut, depuis son extraction, en mine ou en carrière, jusqu'au moment où l'ardoise soigneusement calibrée est livrée au couvreur.

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C'est là tout le travail fort intéressant, et que nous allons essayer de vous expliquer brièvement. Dans le Haut-Valais, à Termen, il existe une mine d'ardoise. Ordinairement, l'on exploite l’ardoise dans des carrières à ciel ouvert. Dans le cas particulier, l'exploitation est souterraine, la qualité des gisements de schiste profond étant, à cet endroit meilleur qu'en surface. L'on entre dans la mine par un couloir où courent des voies Decauville, sur lesquelles roulent des wagonnets chargés de plaques d'ardoise et que l'on lire à l'aide d'un treuil, lorsque la galerie monte légèrement.

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Très rapidement, le couloir s'élargit, pour former enfin une véritable salle d'une douzaine de mètres de longueur, large de huit mètres et dont la voûte s'élève à environ 5 mètres au-dessus de nos têtes.

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Dix hommes travaillent dans cette caverne artificielle. On entend le bruit de leurs pics détachant les épaisses plaques de schistes qui tombent avec un bruit sourd. On voit les petites étoiles des lampes à carbure qui percent l'obscurité.

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Au fond de cette salle s'amorce une galerie montante qui nous conduit à près de deux cents mètres de profondeur, dans une seconde salle aussi grande que la première et où travaillent également une dizaine de mineurs.

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A la faible lueur des lampes, on remarque que le schiste se détache des parois, en blocs ou en plaques, avec une extrême facilité. Il faut cependant faire attention de ne pas fragmenter inutilement les morceaux détachés, afin de pouvoir en faire par la suite des ardoises de dimensions convenables. En suivant le wagonnet lourdement charge, et qui roule lentement, nous sortons de la mine, toute retentissante des coups de pics et de marteaux. A l'extérieur nous allons voir comment on fabrique une ardoise.

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Tout d'abord, il y a le clivage des dalles détachées dans la mine. A l'aide de longues lames d'acier, ressemblant à des ciseaux de menuisier, on fend le schiste, à épaisseur voulue, dans le sens naturel de ses couches. Ensuite, avec une forme et un poinçon, on dessine les contours de l'ardoise sur les fragments obtenus par le clivage. Un ouvrier découpe alors l'ardoise, en suivant le trace du poinçon et en utilisant un instrument fort primitif, qui ressemble à s y méprendre, à un coupe-pain !

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Par ordre de grandeur, les ardoises sont entassées sur un chariot qui les conduit à un téléphérique, dont les câbles plongent vers la plaine. Tout cela semble évidemment très simple. Et, cependant, comme dans tous les métiers, il faut un apprentissage, avant de devenir un bon ardoisier. Il faut reconnaitre le sens des couches naturelles du schiste, afin de ne point faire éclater la précieuse dalle. Il faut savoir l'endroit où l'on peut donner le léger coup de marteau qui révèlera la « veine » du schiste. Il y a là un coup de main et d'œil à acquérir.

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En quittant Termen, nous avons entendu un joyeux bruit de métal heurté. C'était l'heure du repas, le meilleur moment de la journée, avec celui de la sieste, durant laquelle on respire un peu de bon air, en oubliant la mine, avec ses galeries et ses parois suintantes, d'où se détache le schiste qui deviendra la jolie ardoise couvrant nos maisons.

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Journal et feuille d’avis du Valais, 7 novembre 1945

Photographies collection personnelle

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Yannik Plomb
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9 avril 2024
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