L'obélisque de Finges
L'obélisque de Finges
Selon ce site, "Le village de Finges/Pfin est parvenu à une certaine notoriété lors de la bataille de la forêt de Finges. C’est ici que les troupes françaises ont écrasé la résistance haut-valaisanne en mai 1799. Le monument de Finges commémore aujourd’hui encore cet affrontement."
Cet obélisque a été dressé à l'occasion du centième anniversaire de la bataille de Finges. Selon cette source " Ce monument est le signe le plus marquant qui rappelle aujourd’hui en Valais les événements de 1798-1799."
- L'inscription de 1899 dit : "A nos pères, 1799"
Suit un texte en latin dont Louis-Fred Tonossi donne cette traduction :
"A nos ancêtres morts sur l'autel de la patrie pour protéger avec courage le pays de leurs descendants."
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En 1949, à l'occasion du 150ème anniversaire de cette bataille, un banc nous invite à nous souvenir de ces événements. Le journal "le Rhône" évoque cette commémoration ici mais y apporte une critique historique :
"...le monument élevé sur les lieux mêmes du combat dira aux générations futures les sentiments patriotiques et la bravoure de nos ancêtres.
En ce 150e anniversaire de ces faits d'armes, nous n'arracherons pas les fleurs de la couronne qui sera déposée sur le socle de l'obélisque de Finges et qu'auront tressée des mains fidèles.
Nous serons d'ailleurs un des premiers à aller nous recueillir durant quelques instants sur les lieux témoins de glorieux exploits qui devaient être sans lendemain. N'est-il pas bon d'oublier un peu la froide réalité des faits pour laisser à la tradition le soin de broder sur des souvenirs qui finirent par s'estomper ? L'histoire de tous les pays et de tous les temps s'entoure toujours d'un peu de légende et de merveilleux ; et ce n'est pas mal qu'il en soit ainsi.
La bataille de Finges en est à cette phase. Pourtant, les récits que nous avons entendu dans notre prime jeunesse au sujet des combats qui se livrèrent dans ces bois profonds n'ont plus dans les bouches actuelles le même accent de patriotisme et de foi."
- Inscription sur le banc de pierre nous invitant au souvenir de cette bataille.
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1999 : un bicentenaire aux oubliettes !
Etonné de constater qu'aucune commémoration n'avait eu lieu en 1999, je me suis adressé à "Valais en question". Voici :
QUESTION
Bonjour,
En 1799 a eu lieu la bataille de Finges. 100 ans plus tard, sur les lieux mêmes du combat, on organisait une grande fête populaire réunie autour d’un obélisque qu’on a dressé pour la circonstance. En 1949, nouvelle commémoration plus modeste : un banc est ajouté devant le monument. La presse de l’époque, le journal « le Rhône » en particulier en donne un écho plutôt retenu. On est loin de la liesse qui avait prévalu en 1899.
Il semblerait que le bicentenaire n’ait pas été l’occasion d’une commémoration. Ce fait d’armes « héroïque » a-t-il été sciemment oublié ? Si oui, est-ce parce que la bataille de Finges évoquait tout de même une sorte de guerre civile où des Bas-Valaisans joints aux Vaudois et aux Français ont lutté contre des Hauts-Valaisans ?
NOTRE RÉPONSE
Bonjour,
Le Nouvelliste du 27 mai 1999, disponible en ligne à cette adresse, s'interroge sur cette "non-commémoration" du bicentenaire de la bataille de Finges et voici les hypothèses émises par le NF en 1999 :
"En ce mois de mai, le bicentenaire de la bataille de Finges aurait pu être commémoré. Il est passé sous silence ! Est-ce à cause des enjeux électoraux ? (...)
Le Valais aurait dû s'en souvenir, comme en 1889 lors de l'érection de l'obélisque marquant le 100e anniversaire ou comme en 1949 lors du 150e. Il n'en fut rien. Le chemin conduisant au monument, propriété de l'Etat du Valais, est introuvable, car dissimulé par des buissons. Aucune signalisation ! Des banderoles rouges et blanches interdisent l'accès. (...)
Questionné sur le bicentenaire de la bataille de Finges dont le territoire se trouve sur la commune de Loèche, le président Gaston Oggier a été ferme : « On ne fête pas une bataille dans laquelle les Haut-Valaisans se sont faits massacrer. » Maurice de Courten de Chermignon-Dessous, cousin de Régis-Louis de Courten qui écrivit à cette époque le « Journal de ma campagne » , est d'un tout autre avis : « On ne célèbre pas une défaite, mais après deux siècles on doit la commémorer, car c'est devenu un fait historique. L'histoire nous enseigne à juger sans haine ni parti pris . La connaissance du passé avec ses ombres et ses lumières est toujours utile. »
Avec nos meilleures salutations,
La Médiathèque Valais
Et encore...
Consultez aussi ce document de l'A9 évoquant, dans le cadre du tronçon Sierre - Est, le "village de Pfin et Hameau de Pfyngut".
Complément apporté par Charly Arbellay :
A Propos de l’obélisque de Finges
L’obélisque commémorant le centenaire de la bataille de Finges (1799-1899) est l’œuvre de l’architecte Joseph de Kalbermatten de Sion. Il mesure 10 mètres de haut. L’œuvre a été réalisée dans du granit d’un bloc erratique de Monthey dont la carrière était exploitée par Louis Breganti. Cet entrepreneur fit venir d’Italie de nombreux tailleurs de pierre qui ont produit d’innombrables ouvrages. L’inauguration du monument a eu lieu le 22 mai 1899, lendemain de la Pentecôte. L’homélie a été prononcée en français par le chanoine Bagnoud et en allemand par le curé Blinden, devant une foule estimée de 10 à 12 000 personnes, parmi lesquelles de nombreux invités politiques et religieux.
- Le dessin de l’architecte Joseph Kalbermatten et l’œuvre achevée. Lithographie couleur, musée cantonal, Sion
photo Charly Arbellay
- La carrière de granit de Louis Breganti de Monthey en 1866 –
photo Emile Favre.
- La Forêt de Finges : le monument de 10 mètres semble un peu perdu. Photo Charly Arbellay
- Médaille commémorative frappée à l'occasion de centenaire de la bataille de Finges
Repli des Français
Dans les archives de mon père j’ai retrouvé cette lithographie colorisée derrière laquelle il est écrit : "En attendant les renforts, le bataillon Lollier se replie vers Sierre le 9 mai 1799 – Passage sur le Rhône à Finges. Auteur inconnu."
Bibliographie :
L’Ami du Peuple du 24 mai 1899. Le Confédéré du 8 avril 1899. Valais Naguère d’André Guex, Payot Lausanne 1978. Communication du 10.05.2005 de Gaétan Cassina.
Pour aller plus loin
L'historienne Muriel Théler-Borgeat signale ce document de Thomas Antonietti intitulé "les lieux de mémoires" et disponible ici.
Voir aussi ce document d'une autre fête populaire se situant à Sion dans la même période :
Difficile d'accepter de commémorer une bataille d'une partie du Haut Valais et de ses seigneurs "totalitaires" contre des citoyens du Bas-Valais, indépendantistes.
La commémoration de faits de guerre n'est pas nécessairement quelque chose d'honnête et de juste. Les Français commémorent Napoléon, mais celui-ci a été un des "bouchers" de l'Europe.
Alors, il est bon de revisiter l'Histoire, les gagnants n'ont pas toujours été très Humains, les civils pourront toujours témoigner des atrocités commises durant ces guerres... et au nom de quoi?
Merci monsieur Albin Salamin d'apporter votre réflexion bien clair et de ne pas laisser passer inaperçus les crimes envers l'humanité ou que cela soit, autant de plus quand c'est pour les honorer en les niant, les estampant et en les effaçant, enterrant au final la cruelle vérité
Lors des 200 ans de la bataille de Finges, je questionnais Gaston Oggier, personne très connue, ancien hockeyeur du HC Sierre et président de la commune de Loèche-Ville : "Pourquoi ne commémorez-vous pas le bicentenaire ?" Car rien n'avait été organisé. Réponse : « On ne commémore pas une défaite ! » Les blessures sont longues à se refermer !
L'article de Thomas Antonietti, intitulé "Les Lieux de mémoire" et paru dans les Annales valaisannes de 1998, propose une analyse remarquable de la commémoration de 1899. Les commémorations historiques, bien souvent, sont plus représentatives des valeurs de la période qui les organise que du passé auquel ils sont censés renvoyer. En 1899, les organiseurs, membres du clergé et descendants de familles patriciennes, valorisent le sentiment nationaliste du Haut-Valais, fondé sur la religion et l'appartenance politique: "Pour Dieu et la Patrie." L'idéologie conservatrice de l'époque instrumentalise la bataille de Finges et mythifie la résistance à l'étranger. Ces représentations aujourd'hui n'ont plus cours, et l'obélisque, dépouillé de tout message idéologique, ne signale plus qu'un fait historique. Lors du bicentenaire, on aurait pu rappeler, au-delà des problèmes politiques de l'époque, les souffrances inouïes que les Haut-Valaisans ont vécues à la suite de cette défaite, et la solidarité de beaucoup de Valaisans à leur égard. Solidarité marquée, par exemple, par l'accueil de nombreux orphelins. On aurait pu rappeler alors que la paix et la prospérité n'ont pas toujours été le lot de notre canton, et que le Valais a vécu ceux que vivent certains pays aujourd'hui.
Merci cher monsieur Nicolas Perruchoud pour votre intervention sensible et d'une grande valeur humaine, comme il devrait y en avoir beaucoup plus souvent, et ceci dans le monde entier pour des faits semblables.
Quelle pertinente analyse ! Merci Nicolas de ton éclairage.