La religion au service du pouvoir
La religion au service du pouvoir
Sitôt les cendres de la Révolution française éteintes, Napoléon s’est empressé d’associer à nouveau l’Eglise à son projet politique. Plutôt que de lui assurer une autonomie et une indépendance, il l’a littéralement instrumentalisée en exigeant d’elle une parfaite soumission. Le sacre de Napoléon où le pape lui-même n’est qu’un simple figurant qui assure de sa caution le nouvel empereur d’Occident en est un exemple frappant. S’il ne veut pas subir les foudres de l’autorité, le clergé n’a qu’à bien se tenir et se soumettre à l’autorité du despote éclairé. Trop fréquentes, les fêtes religieuses seront réduites en nombre.
Invention de la Saint-Napoléon
Par contre, une fête nouvelle est instituée : la Saint-Napoléon, un saint hypothétique dont l’existence même est mise en doute. Quand ? Le 15 août, date de la naissance de Bonaparte. Elle éclipse passablement l’Assomption (fériée depuis 1802) et a nécessité l’ « invention » d’un saint qui porte le nom de l’empereur. « La création de cette fête civique, fête de souveraineté qui eut un réel impact populaire, se double de celle d’un office liturgique, inscrit dans le calendrier ecclésiastique… liant ainsi l’Eglise à l’Etat dans un nouveau rapport de force. »
La prière pour l’empereur
Une circulaire datée du 19 avril 1806 oblige le clergé à mentionner le nom de l’empereur, à la suite de celui du pape et de l’évêque dans le canon de la messe.
Célébration de la Saint-Napoléon en Valais
De 1810 à 1813, le Valais est rattaché à la France sous le nom de Département du Simplon. A l’instar de toutes les autres régions, il est astreint à suivre les règles édictées par l’Etat français, dont le culte à Napoléon. Les archives cantonales conservent quelques « traces » de l’organisation de cette fête. Par exemple, le 3 août 1813, le maire de St-Maurice, de Quartéry, soumet son projet de fête au préfet du département le comte Rambuteau. Voici le programme des festivités :
- La fête sera annoncée la veille par le son de toutes les cloches des différentes églises et par plusieurs coups de boites (canon ?) qu’on tirera à la tombée de la nuit.
- Le même tirage et le même mouvement des cloches sera répété le jour de la fête à quatre heures du matin.
- A dix heures les différentes autorités de la ville se réuniront pour se rendre à la grande messe dans l’intervalle de laquelle il sera prononcé un discours analogue à une circonstance aussi intéressante. Les offices seront suivis d’une grande procession qui se fera autour de la ville, après laquelle on chantera un Te Deus solennel accompagné de tout l’orchestre.
- Après-midi il y aura tirage à la cible ordinaire où il se fera une distribution de prix en meubles neufs d’étain fin.
- A la tombée de la nuit il y aura illumination dans toute la place publique principale de la ville.
- Les billards, cafés, auberges seront ouverts jusqu’à minuit précise.
- Il est projeté un grand bal qui aura lieu pendant la même nuit.
En guise de conclusion :
A la fin de sa vie, relégué à Sainte-Hélène, Napoléon a voulu être enseveli selon les rites de l’Église catholique et romaine. Les souffrances qu’il a endurées dans cet exil, physiques et surtout morales, l’ont peut-être amené à considérer la religion non seulement comme un moyen de gouvernement, mais comme le dernier mot à l’énigme de l’existence.
Illustration :
En-tête d'affiche pour la St-Napoléon du 15 août 1811 à Sion; photo : Pm Epiney
Sources :
1. Archives cantonales Sion : CH AEV, AC/AB St-Maurice Pm 409
2. Un article très fouillé : Saint Napoléon, un saint pour la nation; contribution à l’imaginaire politique français par Vincent Petit
Cher monsieur Pierre-Marie Epiney, merci pour encore un de vos excellent récits avec en plus un article très fouillé comme vous le dite vous même. A cela je me permet d'y ajouter en complément un lien ici dessous en souhaitant bonne lecture à vous et à tous: fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Na...