Le couvent des capucins

Le couvent des capucins

19 septembre 2020
Pierre-Marie Epiney

Sous l'égide de l'Office du Tourisme de Sion, une visite du couvent des capucins a été conduite par Marie-Laure Ravanne (fille de Mirco, l'architecte vénitien) et Pascal Varone (architecte sédunois impliqué dans la dernière restauration en vue de l'amélioration des chambres).

  • Vue sur le jardin potager du couvent.

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Petit historique du couvent

En Suisse, la seconde moitié du XVIIème siècle verra s’opposer catholiques et protestants. On fait appel essentiellement à deux congrégations pour animer la Contre-Réforme : les capucins pour la prédication et les jésuites pour l’enseignement. En Valais, les protestants gagnent du terrain si bien qu’en 1603, la Diète valaisanne est obligée de choisir son camp : rester catholique ou devenir protestante. Elle choisit le catholicisme mais le pape, peu confiant dans les autorités de l'époque, ordonne l’envoi de capucins savoyards en Valais. Le chapitre de Sion leur offre un terrain hors les murs de la ville où ils pourront édifier un couvent.

En 1631, on pose la première pierre du couvent des capucins qui sera consacré en 1643.

Suit une période très favorable à l'ordre mendiant durant laquelle croit le nombre de capucins obligeant à des agrandissements et à des adaptations de l'ensemble conventuel.

Après le tremblement de terre : intervention de Fernand Dumas

Le séisme de 1946 oblige une consolidation des murs qui sera confiée à l'architecte Fernand Dumas (1892-1956), membre du groupe de St-Luc, qui fera appel à des artistes de renom dont Gino Severini (1883-1966).

  • Saint François recevant les stigmates, fresque de Gino Severini (1948)

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Dumas dessina un nouveau mobilier dont la grille séparant la nef du chœur.

  • Chœur des pères capucins avec, en fond, « Combustion plastique » 1967, œuvre Alberto Burri, artiste dans la mouvance de l’Arte povera qui prône le recours à des matériaux de récupération, toile de jute,

    bois, ou encore ici plastique brulé au chalumeau (stalles dessinées par Ravanne).

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Intervention de Mirco Ravanne (1962-1968)

Dans l'intention d'accueillir une soixantaine d'étudiants capucins, le père gardien du couvent Damien Mayoraz (1911-1980) fait appel à l'architecte-designer vénitien Mirco Ravanne (1928-1991), dont le parcours à Paris, avant d’arriver à Sion, l’avait notamment amené à travailler avec Jean Prouvé, avec qui il travailla sur le projet de l'abbé Pierre "La Maison des Jours meilleurs" destinée aux sans-abris [illustration et commentaire ici].

Architecte avant-gardiste, admirateur de le Corbusier, il compléta l'édifice par de remarquables structures en béton et fit de ce bâtiment une œuvre d'art totale dans laquelle il ne négligea aucun détail, s'occupant d'éclairages et d'acoustique et dessinant même le mobilier des cellules :

  • lit d'un moine capucin

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  • la chaise "Joëlle" du nom d'une fille de Mirco

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  • la bibliothèque individuelle

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  • évier par Kenjiro Azuma, un artiste japonais résidant à Milan

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Dans son livre «L’architecture du XXe siècle en Valais 1920 -1975», Michel Galletti parle ainsi de l'intervention de Ravanne : "L’intervention ne doit pas détruire. Elle doit respecter l’esprit de l’époque et les gens qui ont réalisé la construction. Ce n’est pas un exercice évident. Les travaux en cours au couvent s’inscrivent parfaitement dans cette démarche. Il faut s’adapter tout en préservant."

A l'époque de sa réalisation, la polémique a fait rage. Sa fille Marie-Laure en dit ceci : "Mon père en a beaucoup souffert même s’il en parlait peu.»

  • Bassin du cloitre conçu par Mirco Ravanne et Angel Duarte, remis à jour lors de l’intervention du bureau Pascal Varone

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En octobre 2010, les capucins ont offert leur couvent à la Bourgeoisie de Sion qui s'est engagée, en contrepartie, de prendre à sa charge les frais de rénovation et d'héberger les derniers frères. Le président de la Bourgeoisie précisait qu'il investirait 5 millions pour "permettre à Emera, fondation en faveur des handicapés mentaux, qui occupe déjà l’aile est du bâtiment, de bénéficier de nouveaux locaux dans l’aile sud."

[source]

Pour conclure, signalons que le couvent des capucins de Sion est l'un des rares bâtiments valaisans d'architecture moderne, inscrits à l'inventaire des biens d'importance nationale [source].

  • Un autre document du temps de l'importance de l'ordre des capucins en Valais. A Géronde, les capucins organisent une grande procession pour demander l'arrêt des tremblements de terre :
  • Saint-François, fondateur de l'ordre des capucins, voyant la croix dans le ciel, Hans Ludolff, 1646. Au fond Valère et Tourbillon :

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Voir cette vidéo où interviennent Pierre Cagna, architecte et Marie-Laure Ravanne, fille de Mirco Ravanne

Voir aussi cette vidéo de Bernard Jeker :

Voir aussi :

flash-sion.ch/?s=couvent+capuc...

Bibliographie succinte :

  1. Document édité par la Bourgeoisie de Sion à cette adresse
  2. Bulletin no 66 de Sedunum nostrum à cette adresse
  3. L'architecture du XXe siècle en Valais -1920-1975 ; Editions Infolio
  4. Clémentine Artru : extension et restauration du couvent des capucins à cette adresse
  5. Flash-Sion : un monument d'importance (inter)nationale à cette adresse
  6. Le couvent des capucins, une histoire mouvementée à cette adresse

Merci à Marie-Laure Ravanne et Coline Rémy pour leur relecture attentive de la page et leur proposition de corrections.

Au sujet des capucins, voici ce que disait Rose Bünter-Salamin (1927-2012) dans son blog

du 30 avril 2008 et retranscrit par sa petite-fille Ivana :

Les pères capucins de l’ordre de Saint-François faisaient partie de notre vie. Ayant fait le vœu de pauvreté, une fois dans le courant de l’année, une journée leur était consacrée. Ils rendaient visite dans nos familles pour récolter fruits, légumes, argent. C’était pour nous enfants journée de joie car nous recevions en retour, de leur part, des images saintes, à l’effigie soit de l’ange gardien, de la Vierge à l’Enfant, ou autre représentation.

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Pierre-Marie Epiney
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20 septembre 2020
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